mercredi 24 décembre 2014

Les treize desserts de Noël et autres traditions gourmandes

En Provence, le mois de décembre est l’occasion de magnifier l’identité culturelle de la région, à travers sa langue, ses coutumes et traditions religieuses. Tout commence le 4 décembre avec la Sainte Barbe. Ce jour-là, on met du blé à germer dans trois soucoupes. Si les tiges poussent drues, l’année à venir sera prospère. Le blé germé est ensuite installé près de la crèche, au milieu des santons.

Le 24 décembre commence avec le rite du cacho-fio : le plus âgé et le plus jeune de chaque famille allument ensemble l’énorme bûche en fruitier destinée à brûler trois jours et trois nuits, pour célébrer le feu nouveau. Ensuite, on prépare les agapes rituelles. La table de fête est dressée avec trois nappes superposées de taille décroissante : une pour le Gros souper du 24,  à base de poissons, une pour le menu du 25, riche en volailles, et la dernière pour le soir, où on sert les restes. 

Le Gros souper est servi le 24 au soir, avant d’aller assister à la messe de minuit ou à la pastorale. Il est composé de plats maigres, mais n’en est pas moins fastueux : une soupe à l’ail, suivie de poissons accommodés de légumes, cardons, céleris, épinards. Puis on dispose sur la table les treize desserts (en référence au Christ et à ses 12 apôtres) que l’on déguste au retour de la messe, accompagnés de vin cuit.
Les treize desserts (calenos), la plus connue des coutumes de Noël, est une tradition d'opulence commune à plusieurs sociétés méditerranéennes, les desserts et leur nombre variant selon les lieux. Y figurent la fougasse, le nougat blanc, aux noisettes, pignons, pistaches, le nougat noir, au miel  et amandes. Les quatre mendiants : figues sèches, raisins secs, noix et amandes, symbolisant les ordres religieux Franciscains, Dominicains, Augustins et Carmes. Les fruits frais : poires d'hiver, pommes, raisin, oranges, melon, dattes. Les pâtes de coings, fruits confits et autres sucreries. Les oreillettes, calissons ou croquants…

Ces desserts, plus ou moins splendides selon l'aisance des familles, sont évoqués dès 1683 dans l’Explication des usages des Marseillais, puis vers 1820, dans la Statistique des Bouches-du-Rhône. La première mention du nombre treize n'apparaît qu'en 1925, dans un numéro spécial du journal du Félibrige, association de défense de l'identité provençale fondée par Frédéric Mistral (1830-1914). L'année suivante, la romancière Marie Gasquet précise qu'à Noël il faut treize assiettes de friandises, douze avec les produits du pays, du jardin, la treizième beaucoup plus belle, remplie de dattes, pour rappeler l’origine orientale de Jésus.
Des traditions gourmandes qu’on peut donc interpréter ou réinventer, selon son inspiration, ses moyens, son humeur. Joyeux Noël à tous !

Article publié dans le JTT du 25 décembre 2014.

lundi 22 décembre 2014

Les Boîtes à lire

Samedi matin, M. Bouchet, sénateur-maire de Tain l'Hermitage, a procédé à une double inauguration originale, dans les locaux de la gare SNCF puis ceux de la mairie : Deux Boites à lire ont été mises en service, c'est-à-dire garnies de livres, grâce à la complicité de participants offrant des ouvrages déjà lus. Prenez, lisez puis rapportez : l'indication est claire, les livres déposés sont mis gratuitement à la disposition du public, à charge ensuite de les remettre en circulation. 
Les boites à lire vont se multiplier à Tain, avec deux autres installations prévues à la Poste, puis au Camping, pour lequel les livres en langues étrangères sont recherchés. Les services techniques ont réalisé des boites pratiques, à deux étages : pour enfants en bas, pour adultes en haut, qui ne demandent qu'à être remplies. 

Promouvoir la lecture en mettant des livres à la disposition des usagers, stimuler la solidarité entre lecteurs, est une initiative à encourager. De nombreuses villes ont déjà adopté cette lire-attitude. A Bordeaux, une dizaine de boites sont présentes dans les rues. Et même à Delle, un rayonnage modeste accueille  les dons à la gare SNCF. 
Pratique : C'est le moment de faire du vide dans vos étagères.
Ecologique : Offrez une nouvelle vie à vos livres.
Convivial : Partagez vos coups de coeur !
Une merveilleuse façon de prolonger l'esprit de Noël.

Article publié dans le JTT du jeudi 18 décembre 2014.

jeudi 18 décembre 2014

Boucles de Noël



Vous vous souvenez de mon amie Elena, artiste russe?  Eh bien, pour Noël, elle a fabriqué des petites merveilles pour décorer vos oreilles...

Festives, gourmandes, hivernales ou classiques (cœurs, fleurs), vous pouvez les commander directement par mail : yel-fedorovich@yandex.ru
Pour 10€, elles sont à vous !



lundi 15 décembre 2014

Saveurs du terroir : l'atelier Nectardéchois

La foire aux arbres organisée à Pailharès, dans l'enceinte de l'atelier Nectardéchois, a permis de mettre en valeur cette coopérative spécialisée dans la fabrication de jus et nectars de fruits locaux. Visite de l'atelier, discussion avec les salariés, dégustation, vente, les clients en ont profité pour faire le plein de saveurs d'automne.

La différence entre jus et nectar ? Le jus est obtenu par simple pressage, sans aucune adjonction, il concerne surtout les fruits à pépins. Le nectar est plutôt réservé aux fruits à noyau, dont la chair est réduite en purée, puis allongée d'eau de source et sucrée.
Une dégustation à l'aveugle était organisée, pour identifier les différentes boissons proposées à la vente. Dur, dur , car si les jus simples, pomme, poire, abricot, cerise, fraise, pêche, sont relativement faciles à distinguer, les mélanges composés gardent tout leur mystère : pomme/coing, pomme/kiwi, pêche/abricot... Mention spéciale à la boisson de saison, Automne, obtenue en combinant pomme, poire et pêche de vigne.

Comment cette coopérative fonctionne-t-elle ? Deux activités : la fabrication et la vente, à partir de fruits cueillis à la maturité idéale. Des clients à chaque étape : les producteurs locaux, qui font presser leurs propres fruits, et repartent ensuite avec leurs bouteilles pleines, à consommer ou commercialiser sur les marchés. Les particuliers, qui peuvent apporter leurs fruits à partir de 100 kg minimum, pour une consommation personnelle. Les restaurants, commerces, épiceries, qui veulent promouvoir les jus et nectars fabriqués localement. Et tous les adeptes de boissons naturelles issues des fruits de Drôme-Ardèche.

Né en 1998, de la volonté de faire vivre un savoir-faire ancestral en Ardèche Verte, l'atelier Nectardéchois développe une production artisanale, avec une volonté de qualité, de mise en valeur du terroir, et de respect des saisons et de la nature. Une initiative qui a permis de créer des emplois, et de contribuer à l'animation du village de Pailharès.

Vente aux particuliers à l'atelier Nectardéchois,
Le Calvaire, 07410 Pailharès.
04 75 06 12 18   www.nectardechois.fr

Article publié dans le JTT du jeudi 11 décembre 2014.

vendredi 12 décembre 2014

Chronique littéraire : Le quatrième mur, de Sorj Chalandon

Sorj Chalandon, spécialiste des guerres de la planète, évoque ici celle du Liban, dans les années 1980, à travers une fiction dont le sujet est un projet fou : monter une pièce de théâtre, Antigone, dans Beyrouth à feu et à sang, avec des comédiens amateurs issus des différentes factions. Antigone sera Palestinienne, Créon phalangiste, Hémon Druze, et les gardes chiites.

Georges reprend le pari que Samuel, mourant, a initié, espérant créer un espoir de paix sous les bombes. Bien que marié et père de famille, Georges est un éternel dilettante, dont la seule motivation est de monter des pièces de théâtre. Il milite à l'extrême gauche, n'hésitant pas à faire le coup de poing, suivant des slogans simplistes. La rencontre avec Samuel, metteur en scène reconnu, réfugié de Grèce où il a été torturé par la dictature, fait vaciller ses certitudes. Il accepte de reprendre son projet utopique, dans le Liban en guerre. Georges sillonne Beyrouth au péril de sa vie, pour organiser des répétitions avec les différents acteurs. Il réalise alors que chacun d'eux a une lecture différente de la pièce, et n'accepte son rôle que dans le but de justifier son combat politique. Le quatrième mur, qui isole les comédiens du public, en protégeant leur intégrité est purement virtuel. La trêve est un rêve, la guerre écrase tout.
Un roman saisissant, presque un document, qui montre une guerre totale. Et pourtant, un jour, la paix est revenue au Liban. Un espoir pour la Palestine ?

Sorj Chalandon est né en 1952. Grand reporter à Libération, journaliste au Canard enchaîné, ses romans bouleversants décortiquent les conflits modernes. C'est par le biais de la fiction qu'il s'autorise à expurger les images atroces accumulées durant ses séjours en enfer.
Le quatrième mur a obtenu le Goncourt des Lycéens en 2013, il est maintenant disponible en Livre de poche.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 11 décembre 2014.

lundi 8 décembre 2014

Le Marché de Gros de Pont-de-l'Isère

C'est, après Rungis, un des plus importants marché de professionnels de France. Le point de rencontre entre producteurs de Drôme-Ardèche et acheteurs venus de toute la région Rhône-Alpes, et de l'Est de la France. Les fruits et légumes ramassés du matin changent de mains, au cul du camion, par cagettes, par sacs, parfois par tonnes. Ce marché professionnel, qui fonctionne du lundi au vendredi en été, production oblige, se limite à trois jours en basse saison. Mais le déroulement reste le même. Sur un immense parking, partagé en deux parties, c'est un gigantesque ballet d'hommes et de véhicules, très organisé, mais dans une ambiance fébrile, car il ne dure qu'une heure. Gare aux piétons !

16h30. La sirène retentit, la grille qui sépare les véhicules des marchands de ceux des producteurs s'ouvre, et c'est la ruée des acheteurs vers les cultivateurs stationnés sur leur emplacement, carnet en mains pour noter les commandes, même si les habitués ont déjà réservé par téléphone. Immédiatement, les livraisons s'enchaînent, avec des diables, des chariots élévateurs ou à la force des bras. Les sacs de châtaignes, de noix, ou de pommes de terre, les caisses de citrouilles, les cageots de pommes, de poires, les brassées de poireaux, les filets d'ails et d'oignons, les palettes de choux ... changent de propriétaire en un clin d’œil. Aussitôt, les premiers véhicules qui ont terminé de négocier repartent en slalomant au milieu de la cohue générale.

La réglementation de la Mairie de Pont de l'Isère est efficace et la police municipale y veille : deux parkings fermés différents, où marchands et producteurs peuvent s'installer dans le courant de l'après-midi, un droit d'entrée ou un abonnement à régler pour tous, un système de pesage mis à disposition, ainsi qu'une halle ouverte aux produits exotiques. Quand les papiers sont en règle, les camions repartent. En ce mercredi de novembre, presque deux cents producteurs étaient présents, pour une soixantaine d'acheteurs, épiciers, marchands, revendeurs. Tout le monde ne vend pas sa marchandise !

Alors, à 17h30, quand les grossistes sont partis, il reste aux petits producteurs une solution de secours pour écouler leurs denrées : une deuxième grille s'ouvre côté mairie, pour laisser passer les particuliers qui espèrent faire de bonnes affaires, au prix de gros. Une autre ruée commence.

Article publié dans le JTT du 27 novembre 2014.

mercredi 3 décembre 2014

Marthe Robin, la « petite Sainte » de Châteauneuf-de-Galaure, sur la voie de la Béatification

Marthe Robin est considérée comme l’une des grandes figures spirituelles de l’Eglise catholique du XXème siècle. A Rome, le 7 novembre 2014, le Pape François vient de la proclamer Vénérable, étape décisive en vue de la Béatification.
Nombreux sont les habitants de Tain, Tournon et toute la région, qui ont eu l’occasion de rencontrer Marthe Robin, grâce à des retraites organisées par les paroisses, les écoles, ou à titre personnel. La visite à Marthe, alitée dans une chambre sombre, mais illuminée par son amour de Dieu et des hommes, marquait les esprits à tout jamais.
Dans la ferme paternelle, elle a ainsi reçu plus de 100 000 visiteurs de toutes origines, pendant près de soixante ans. Bien que simple laïque, son influence mystique était considérable. On lui demandait d’intercéder par ses prières, pour obtenir une grâce divine. Maladies de proches, soldats disparus, mais aussi conseils de vie, inquiétudes sur l’emploi, problèmes familiaux, secrets pesants, elle écoutait, réconfortait, priait avec ses visiteurs.

Pourtant rien ne la destinait à une vie spirituelle. Née en 1902 dans une modeste famille d’agriculteurs de Châteauneuf-de-Galaure, c’est à l’âge de 16 ans qu’elle a ressenti les symptômes d’une douloureuse paralysie progressive, qui l’obligera à garder la chambre, où elle s’étiolera progressivement jusqu’à sa mort en 1981. Un jour elle s’est sentie appelée par Dieu, à qui elle offrait ses souffrances.
Les premiers signes de son mysticisme ne furent ni du goût de ses parents, qui voyaient leur ferme envahie par les étrangers, ni de la hiérarchie catholique. La rencontre avec l’Abbé Finet, célèbre prédicateur lyonnais, fut déterminante pour sa reconnaissance, et le début d’une œuvre majeure : la fondation des Foyers de Charité,  en 1936.

Actuellement 77 Foyers, dans 41 pays, dont 14 en France,  participent au renouvellement de l’Eglise, accueillant retraites spirituelles, centres de ressourcement, espaces de prière. A Châteauneuf-de-Galaure, toute une communauté s’est développée autour de l’œuvre de Marthe. Au Foyer de Charité, maison mère, sont associés école, collège, lycée. Des bâtiments modernes accueillent les dizaines de milliers de retraitants, pèlerins ou curieux qui désirent se recueillir dans la chambre de Marthe, à la Ferme Robin. On imagine l’ampleur de la liesse, en Drôme des Collines, quand la Béatification sera annoncée !

La vie spirituelle passe aussi par le Net :
http://www.martherobin.com/
http://www.foyer-de-charite.com/fr/marthe-robin.html

Article publié dans le JTT du jeudi 20 novembre 2014.

vendredi 28 novembre 2014

Chronique littéraire : Primo, de Maryline Desbiolles

Quand sa grand-mère décède, Maryline Desbiolles ressent la nécessité d’éclaircir le mystère de ses origines. Tant de non-dits, d’ombres, de drames, entourent ce personnage d’émigrée italienne, arrivée en Savoie dans les années 1920. La partie émergée, une vie rude et laborieuse, la transplantation en terre étrangère, puis la lente intégration, ont déjà été explorées. Ce sont l’atmosphère tragique autour de la grand-mère taiseuse, les morts et les destructions étouffées, qui préoccupent l’auteur.

Une grande part du mystère est liée aux naissances des enfants. Primo, c’est le nom du premier bébé de la grand-mère, un patronyme exigé par Mussolini. Un enfant choyé, costaud, adulé par sa mère. Mais Primo meurt mystérieusement pendant l’accouchement du second bébé, dans les années 1930. Ce deuxième fils ne survivra pas non plus au-delà de 1944. Devant l’acharnement du sort, la grand-mère fera face. D’autres enfants naîtront, et, entre guerres mondiales et déchirements familiaux, elle camouflera sa douleur.

Mélange de souvenirs, de recherches personnelles dans la région de Turin, d’éléments historiques,  ce texte au style haletant, écrit presque sans ponctuation, sans respiration, exprime parfaitement l’oppression, la souffrance retenue. Un récit émouvant et fort.

Maryline Desbiolles est née à Ugine en 1959. Auteur de nombreux romans, Prix Femina en 1999 pour Anchise, elle vit actuellement dans l’arrière pays niçois.

Primo est disponible en Points poche, au prix de  5.70€.
Chronique publiée dans le JTT du jeudi 27 novembre 2014.

lundi 24 novembre 2014

La Saison Courbet en Suisse

La Fondation Beyeler à Riehen, près de Bâle, consacre une magnifique exposition au peintre Gustave Courbet (Ornans, 1819-La Tour-de-Peilz, 1877). Des œuvres clés, pour la plupart issues de collections privées, donc rarement montrées, illustrent les différentes périodes de création de l’artiste. Dont celle qui a fait couler beaucoup d’encre en brisant un tabou : la sulfureuse Origine du monde.

Autoportraits, paysages du Jura, ruisseaux, forêts, grottes, sources et baigneuses, dans une gamme de  couleurs naturelles, ocres et verts lumineux ou sombres, précèdent des salles éclairées par les reflets de la mer, comme la Vague, ou la neige, dans des scènes de chasse hivernales réalistes. En tout une soixantaine de toiles, datées de 1844 à 1870, juste avant la Commune de Paris, où Courbet joua un rôle actif et controversé qui lui valut la prison, puis l’exil en Suisse, en 1873. Les tableaux exécutés par Courbet pendant ses années suisses font d’ailleurs l’objet d’une exposition concomitante, au Musée Rath de Genève.

Deux films complètent la visite, l’un sur l’Origine du monde et son influence dans l’art, et l’autre plus général sur les origines du monde de Courbet. La projection est présentée dans une salle vitrée ouverte sur la campagne environnante, magnifiée par les couleurs de l’automne. Le peintre aurait apprécié cette juxtaposition entre réel et virtuel,  entre paysages peints et paysages naturels.

Exposition visible tous les jours, de 10h à 18h.
www.fondationbeyeler.ch

jeudi 20 novembre 2014

Le Musée Olympique de Lausanne

Dominant le lac Léman dans un superbe parc ponctué d'érables pourpre et or, le Musée Olympique plonge ses visiteurs dans l’histoire des J.O. depuis leur création, en Grèce antique, puis leur re-création en 1896, par Pierre de Coubertin. Ludique, interactive, la scénographie des lieux ravive les souvenirs de sportifs émérites, de merveilleuses cérémonies, et de spectaculaires exploits. Mais pas seulement.

Devant le vaste bâtiment blanc, la statue de Pierre de Coubertin couve du regard la flamme olympique, dans ses quartiers d’hiver. Elle invite chacun à participer. Car dans les jardins, des installations athlétiques permettent  de s’essayer à lancer le poids, sauter en hauteur, ou courir le cent mètres, face aux performances des champions. Dur, dur !
A l’intérieur, trois étages entièrement rénovés rendent hommage, dans une scénographie inventive, aux exploits sportifs, mais aussi aux hommes et aux pays d’accueil, à travers un flot d’images mythiques. Magie des cérémonies d’ouverture, angoisse et concentration des athlètes, performances ou ratés spectaculaires, joie des vainqueurs, pleurs des vaincus, tous les moments forts des Jeux Olympiques se télescopent en une gigantesque farandole de films d’archives, projetés sur une centaine d’écrans.

En contrepoint, une riche exposition d’objets liés à la pratique du sport de haut niveau et à la vie pendant les Jeux. Les chaussures techniques, tenues de ski, patins, kayaks, crosses, chronomètres … permettent d’apprécier l’évolution du matériel de compétition. Les superbes costumes de scène font revivre la splendeur des spectacles. Les torches et médailles, ainsi que les affiches, symboles d’une époque et d’un pays, sont de véritables œuvres d’art. Les plans des différents stades olympiques constituent une gigantesque fresque de l’évolution de l’architecture contemporaine. Et les mascottes ont toujours du succès auprès des enfants.
Nostalgie, émotion, rêve ou sujets de réflexion, le Musée Olympique  satisfait tous les publics.

Musée Olympique, Quai d'Ouchy , Lausanne

dimanche 16 novembre 2014

Jean-François Haas, de la Gruyère à la Comté

Ce n’est pas une tournée fromagère, mais une rencontre littéraire !

Dans le cadre des Petites Fugues, la Bibliothèque de Grandvillars reçoit cet enseignant et écrivain suisse, de la région de Fribourg, qui a publié aux éditions du Seuil quatre romans. Des récits puissants, dans une langue riche et innovante, qui interrogent le Bien et le Mal.

Le chemin sauvage traite du sort réservé aux orphelins misés, c’est-à-dire placés dans des fermes où ils étaient souvent exploités. Quand Myriam est retrouvée morte, son copain enquête. A la fois thriller et document sociologique sur la Suisse rurale des années 1950, repliée sur elle-même, sans pitié pour les étrangers, les homosexuels, les gitans ou ceux qui parlent. Mais Le chemin sauvage offre aussi de belles pages tendres sur l’enfance, l'imaginaire, et la vie en pleine nature.

Dans Panthère noire dans un jardin, trois personnages : Paul, écrivain militant, son frère Jacques, assez lent d’esprit, et Favre, commissaire de police, ami d’enfance. Paul et Jacques ont perdu leur père jeune, victime de l’amiante. Ils en ont gardé une blessure ouverte. Quand Paul apprend à son tour qu’il est condamné, leur équilibre est bouleversé. Le meurtre mystérieux, violent, d’un chef d’entreprise indifférent au sort de ses ouvriers peut-il être l’œuvre ultime de Paul ? Un roman sur l’amitié, l’injustice, le doute, la mort.

Mercredi 19 novembre à 18h30, venez découvrir l’auteur et son œuvre, et échanger en toute convivialité. Entrée libre.



mardi 11 novembre 2014

Ecrire comme en 14

L’échange de courrier a constitué un soutien moral déterminant pour les soldats engagés dans la Grande Guerre, et pour leurs proches. Des milliers de lettres, de cartes postales, de pages de carnets ont été rédigées, envoyées, lues, et relues. Le besoin était tel que les Marraines de guerre ont été instituées officiellement pour correspondre avec les Poilus qui n’avaient pas de famille.
L’instruction publique était devenue obligatoire en 1882, par le décret de Jules Ferry. Qui aurait imaginé alors que les petits campagnards nés dans les années suivantes, obligés pour la première fois d’aller à l’école, bénéficieraient, grâce à la maîtrise de la lecture et l’écriture, d’un réconfort quotidien, d’une aide psychologique précieuse ?


La bibliothèque de Grandvillars a proposé aux visiteurs de l’exposition sur la Grande Guerre de prendre la plume, au sens propre, dans un atelier « écritoire » reconstitué à la mode de 1914. Il s’agissait d’écrire à des Poilus imaginaires, père, mari, frère ou fils... Vieux pupitres, plumes et porte-plumes, encre et buvards, jolies reproductions de cartes postales d’époque étaient à disposition. Les participants de tous âges se sont pris au jeu. Pour les plus jeunes, écrire à la plume était une expérience nouvelle, sans effaceur, il faut s’appliquer ! Pour les anciens, ce fut l’occasion d’un retour nostalgique sur les bancs de l’école, doigts tachés en prime.

samedi 8 novembre 2014

Saint-Bonnet-le-Froid, royaume des champignons et de la gastronomie

Place aux Champignons, gîte Les Russules, Maison du Champignon, restaurant La Coulemelle, salon de thé La Chanterelle ... dès l'arrivée dans ce village aux confins de l'Ardèche et de la Haute-Loire, toutes les pancartes signalent qu'ici le champignon est roi. Des ribambelles de champignons décorent les rues, les numéros des maisons sont en forme de champignon. Impossible d'ignorer ce trésor de l'automne dont forêts et pâturages voisins regorgent.

Chocolat aux cèpes, girolles en aigre-doux, tagliatelles aux morilles, huile de truffe, les produits dérivés proposés dans les épiceries locales excitent les papilles. Surtout quand ils s'accompagnent d'autres gourmandises du terroir, salaisons du Velay, fromages du Vivarais, marrons d'Ardèche et vins de la Vallée du Rhône.

C'est que Saint-Bonnet-le-Froid est devenu, depuis l'installation de Régis Marcon, grand maître de la cuisine française, un haut-lieu de la gastronomie. Le Clos des Cimes est un établissement luxueux, mais d'autres restaurateurs inventifs ont investi le village, proposant des repas raffinés, aux saveurs de saison, ou des chambres d'hôte, à des prix abordables.

On peut préférer tout simplement la promenade et le pique-nique, car les couleurs d'automne de la forêt, et le panorama depuis le plateau, à 1130 m d'altitude, face aux Alpes enneigées, valent à eux seuls le voyage.

mardi 4 novembre 2014

Chronique littéraire : L'amour sans le faire, de Serge Joncour

Sous un titre qui ressemble à une boutade, un livre profond et émouvant, empreint d'humanité, d'humilité. Où il question d'amour, bien sûr, mais surtout des blessures d'amour que la vie inflige, relations familiales bloquées, vies de couples défaites, carrières professionnelles précaires. Peut-on malgré tout garder espoir ?

Serge Joncour décrit, dans une alternance de chapitres courts mais fouillés, le parcours cabossé de deux personnages qui ne se connaissent pas. Franck a fui la rigidité de la ferme familiale pour un métier de cameraman nomade. Louise bosse dans une usine en liquidation, mais éprouve le besoin de campagne, d'ancrage. Ni l'un ni l'autre ne savent plus, ne veulent plus aimer. Ni même entrer en contact, se dévoiler.
Leur rencontre improbable se fait par l'intermédiaire d'un enfant exubérant, Alexandre. Réminiscences du passé pour l'un, acceptation du présent pour l'autre, ils redécouvrent à travers lui les plaisirs simples de la vie, un petit déjeuner au soleil,  l'effort physique salutaire, un fou rire partagé. Il faut s'aimer soi-même, avant d'aimer ailleurs.

Serge Joncour est un écrivain français à succès, né en 1961. Il est aussi scénariste et homme de radio.
L'amour sans le faire est disponible en poche, chez J'ai Lu au prix de 7,30€.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 30 octobre 2014.

jeudi 30 octobre 2014

Le Pigeonnier de Saint-Félicien : Un phare en Ardèche

Au musée de Tournon, une salle dédiée au poète Charles Forot, mentionne son influence culturelle, avec sa maison d'édition, le Pigeonnier, et son aréopage d'artistes, le sculpteur Marcel Gimond, le graveur Jean Chièze, le peintre Pierre Boncompain, le musicien Vincent d'Indy... Mais il faut aller à Saint-Félicien visiter la maison de l'artiste, pour comprendre comment cet Ardéchois charismatique a réussi à faire de son village un centre artistique vivant, digne des plus grands salons parisiens, pendant toute la première moitié du vingtième siècle.
Le label " Maison d'écrivain " est désormais acquis. Lors des visites guidées, Hélène et Thérèse font revivre avec passion la vie et l’œuvre de l'enfant du pays, dont elles se souviennent avec émotion.

Charles Forot est né en 1890. Sa mère, prématurément veuve, rejoint la propriété maternelle, le Pigeonnier, avec ses enfants. Là, Charles vit des années heureuses, petit campagnard dégourdi, courant les bois, dénichant les nids, attrapant les truites à la main. La pension au lycée à Valence, puis Annonay, n'en est que plus rude ! Atteint de la maladie de Pott en 1906, il doit interrompre ses études et s'aliter pendant 3 ans. Cette longue réclusion lui permet de développer son imaginaire et sa curiosité, stimulé par des échanges réguliers avec son oncle, un prélat romain cultivé, Mgr Battandier.

A Paris, étudiant à la Sorbonne, il se lie d'amitié avec de nombreux artistes et intellectuels, dont certains sont aussi ardéchois. Toute sa vie, il cultivera ces liens, invitant régulièrement ses amis à passer de longues semaines au Pigeonnier. Avant l'heure, il invente ainsi le concept de résidence d'artistes. Pendant la Grande Guerre, le Pigeonnier devient un refuge providentiel pour les Parisiens, qui peuvent y créer librement. De fructueux échanges d'idées émerge en 1920 la création d'une maison d'édition : Charles Forot décide de publier ses écrits et ceux de ses amis, dans des plaquettes de qualité, illustrées par les meilleurs graveurs et peintres du moment, comme Jean Chièze ou Jos Jullien. Ainsi paraissent almanachs, recueils de poèmes, documents, livres d'art, signés Paul Valéry, Charles Maurras, Louis le Carbonnel, Gabriel Faure ...

Mais l'activité ne s'arrête pas là ! Charles et son épouse Geneviève voyagent, se passionnent pour le théâtre, le folklore, la botanique, la céramique... En 1925, première représentation de la troupe de théâtre du Pigeonnier, sur la terrasse, devant 500 personnes (chacun apporte sa chaise !) . C'est le début d'une longue tradition de théâtre au village, reprise aujourd'hui par Felixval. A l'exposition universelle de Paris, en 1937, Charles Forot promeut le Vivarais à travers ses poteries et son mobilier. Puis lance avec Marie-Madeleine Bouvier en 1938 le groupe folklorique Empi et Riaume, dont le succès s'est amplifié au fil des ans. Jusqu'en 1958, il multiplie les initiatives artistiques en Ardèche, tout en continuant d'éditer ceux qu'il aime. L'âge mettra un frein à ses activités, le poète s'éteindra en 1973.

Charles Forot a développé à Saint-Félicien une vie culturelle de qualité et fédéré les initiatives locales. Aujourd'hui, le village profite de cet investissement artistique associatif. Sa maison, ouverte au public, entend perpétuer son œuvre en encourageant les créations, lectures, expositions, ateliers. Quant aux ouvrages édités par Le Pigeonnier, on peut encore les consulter à la Bibliothèque de Saint-Félicien, qui conserve ce précieux patrimoine.

Visites guidées du Pigeonnier : de juin à septembre, dimanches et jours fériés.
Renseignements à l'office de Tourisme de Saint-Félicien : 04 75 06 06 12.


vendredi 24 octobre 2014

Chronique littéraire : N'entre pas dans mon âme avec tes chaussures, de Paola Pigani

Ce proverbe tzigane symbolise parfaitement une page méconnue de la guerre de 39/45: l'internement obligatoire, dans des camps en Charente, de tous les saltimbanques, forains, Manouches et autres Romanichels français. Une circulaire de Pétain interdisait leur libre circulation. On les a enfermés, et donc privés de ce qui constituait l'essence même de leur culture : la liberté de mouvement. Ils ont essayé de survivre dans la misère et le désintérêt des autorités.

C'est Alba qui raconte. Entrée dans le camp à 14ans, elle croit que cet entassement dans des baraquements rudimentaires est provisoire. Mais les autorités confisquent les roulottes, les chevaux. Son internement et celui de sa famille, de sa tribu, durera six longues années. Elle connaîtra le froid, la faim, le désespoir, mais aussi la solidarité et l'amour. Naissances et décès, humiliations et amitiés, tenir malgré l'adversité, s'adapter pour vivre. Ce roman évoque la souffrance et la solidarité d'un peuple marginal et secret, qui d'habitude ne se confie pas aux gadgés.

Mais Paola Pigani, née en 1963 dans une pauvre famille italienne émigrée en Charente, a longtemps côtoyé les Manouches, partagé son enfance avec eux. Après avoir rencontré une survivante du camp des Alliers, elle a voulu faire connaître ce pan ignoré et peu reluisant de l'histoire de la France de Pétain. Et rendre hommage à ses amis, fiers et libres, encore à l'index aujourd'hui.
Dans un style poétique, elle réussit un roman d'initiation sensible et chaleureux, empreint d'humanité.

En poche chez Liana Levi Piccolo au prix de 9,50€.
Chronique publiée dans le JTT du jeudi 23 octobre 2014.

dimanche 19 octobre 2014

Enlivrez-vous !

Du 9 octobre au 2 novembre, la 41ème édition de la Foire aux livres de Belfort transforme les salons du Centre de congrès Atria en une gigantesque librairie : Plus de 270 000 livres sont proposés au public, à des prix défiant toute concurrence : à partir de 0.50€ les poches ou les albums jeunesse.  Inutile de dire qu’on s’y presse chaque jour.

Deux conseils : ne pas venir avec une liste, impossible à suivre, mais se laisser porter par la découverte, le hasard. Et prévoir un horaire suffisant, car une telle plongée dans les livres fait perdre toute notion de temps.

Le public est très varié : méthodique, comme ce
couple qui repart avec 25 romans pour 80€, de quoi passer l’hiver. Ou papillonnant, à la recherche du coup de cœur. Ados feuilletant BD ou mangas, grands-parents faisant provision d’histoires pour les petits-enfants, fins lettrés en quête d’éditions rares, routards explorant les guides de voyage, esthètes rêvant devant les livres d’art, ou cuisinières imaginatives en mal de recettes…  Il y en a pour tous les goûts, pour toutes les bourses.
Les week-ends sont l’occasion de manifestations complémentaires, dédicaces, ateliers, expositions, conférences. La plus grande foire aux livres de l’Est de la France rassemble alors un public encore plus nombreux. Mais pas d’inquiétude si la queue s’allonge aux caisses : on a de quoi lire !

Foire aux livres de Belfort : jusqu’au 2 novembre, centre de congrès Atria. Entrée libre.
Ouverte en semaine de 14 à 19h, week-ends et fériés de 10 à 19h.
Programme quotidien sur : fr.facebook.com/FoireDuLivreBelfort


mercredi 15 octobre 2014

La course des garçons de café à Obernai

Petite ville située dans le vignoble, à 25 km de Strasbourg, Obernai est un pur condensé d’Alsace. C’est une destination privilégiée des amateurs de terroir et de tradition. Un ensemble de superbes maisons à colombage du 16ème siècle, entretenues avec passion, façades aux couleurs vives, cours intérieures voûtées, jardinières croulantes de fleurs. Des monuments emblématiques : la tour du beffroi, les remparts, le puits aux six seaux, la cathédrale, la synagogue, taillées dans le grès rose.

Dans les rues piétonnes, des commerces florissants, en particulier une cinquantaine de bars, restaurants, pâtisseries et winstubs, qui tous proposent les spécialités typiques. Pas étonnant que samedi, sur la place du Marché, une centaine de serveuses et serveurs soient réunis pour participer à la traditionnelle course des garçons de café. Une animation en musique, avec dégustation des crus locaux. A travers les ruelles médiévales, ils ont essayé de garder les verres pleins en équilibre sur leur plateau, malgré les embûches. Leur lot quotidien, car les vendanges sont faites, le vin est tiré, il faut le boire. Ici, la vigne est au cœur de la  vie. Il paraît même qu’à la fête d’automne, le vin nouveau coule à flots de la fontaine Sainte Odile !


samedi 11 octobre 2014

Chronique littéraire : Patients, de Grand Corps Malade

Grand Corps Malade, c’est le nom de scène d’un  célèbre auteur compositeur interprète de slam. De son vrai nom Fabien Marsaud, né en 1977 en Seine Saint Denis, il accumule les succès musicaux depuis 2006. Dans ce récit autobiographique, il montre qu’il manie aussi bien la rime que la prose.

Le grand corps, c’est le sien : 1,94m. Malade ? Pire que cela. Après une grave chute dans une piscine, il se retrouve, à vingt ans, dans le service des Tétraplégiques, en  rééducation. Plongée dans un monde à l’opposé de ce qu’il connaissait avant, puisqu’il était fan de sport.
Pour lui, un espoir existe, il est « tétra incomplet », c’est-à-dire qu’il arrive à bouger sa main gauche. La rééducation, et la patience, lui permettront de récupérer beaucoup plus, jusqu’à marcher avec une simple béquille.

Avec un beau sens de la dérision, et de la formule, il dresse un portrait tendre et ironique, mais très réaliste, de ses camarades d’infortune à l’hôpital, ainsi que du personnel soignant. Chez les tétras, pas d’apitoiement, pas de projets d’avenir, mais rigolade obligatoire : entre eux, c’est la règle.
Humour et émotion pour le lecteur qui pénètre à sa suite dans cet univers terrifiant, et se retrouve dans une atmosphère tragi-comique, dans la veine du film « Intouchables ».

Patients est disponible en Points Poche au prix de 5.70€.
Chronique publiée dans le JTT du jeudi 16 octobre.

lundi 6 octobre 2014

Blessures de guerre

Difficile de choisir des lectures pour illustrer le thème de l’année, parmi la profusion d’ouvrages dédiés à la Grande Guerre. Nous avons privilégié deux thèmes qui nous ont particulièrement émus.

Côté humain : l’envie de rendre hommage à mon grand-père Italien. Il avait 20 ans sur le front des Dolomites, en 1916, quand il a été
grièvement blessé. Il a survécu jusqu’à 80 ans avec une soixantaine d’éclats d’obus dans le corps, maudissant la guerre à tout jamais.
Son compatriote, l’écrivain Mario Rigoni Stern (1921-2008) a parfaitement rendu l’ambiance des combats sur la frontière austro-italienne, du côté du Monte Grappa. Son « Histoire de Tonle », c’est un peu celle de mon grand-père.

Côté animal, JP a été bouleversé à la lecture de « Bêtes des tranchées » un document de Eric Baratay, qui analyse avec précision la participation à la guerre de millions d’animaux, chevaux, chiens, pigeons, réquisitionnés, dressés, utilisés, tués aux côtés des troupes.

La guerre a blessé, décimé, les animaux comme les soldats. Dans les tranchées, les hommes vivaient d’ailleurs comme des bêtes, parmi les bêtes… Leur destin commun fut le carnage.

Une heure de lecture publique à la Bibliothèque de Grandvillars le 8 octobre à 18h.

lundi 29 septembre 2014

Lucien Jacques et ses amis

D'abord, les amis de jeunesse, puis les amis des tranchées, décimés par les obus, évoqués avec émotion et sans fard dans Les carnets de moleskine (Gallimard). Lucien Jacques, né en 1891, n'a pas échappé à la grande boucherie, ses blessures, ses traumatismes.

Et puis les amis artistes, ce petit monde parisien où Lucien évolue après guerre, lui qui est doué pour tout : poète, écrivain, artisan, peintre, graveur... Sa notoriété grandissant, il fréquente le beau monde, galéristes, éditeurs, intellectuels, sans jamais se départir de sa simplicité, de sa convivialité. Il devient le secrétaire de la célèbre danseuse Isadora Duncan, elle devient sa muse à tout jamais. Il voyage, expose ses aquarelles et ses gravures dans les capitales, publie des articles dans de nombreuses revues.

Enfin, il y a Jean Giono. Lorsque, pour raisons de santé, Lucien Jacques s'installe en Provence, en 1922, il découvre dans la revue La Criée, dont il est rédacteur, des poèmes d'un inconnu de talent, Jean Giono. Il lui écrit, une correspondance régulière, puis une collaboration s'en suivent. Il publie le premier recueil de poèmes de Giono, Accompagnés de la flûte, illustré par ses bois gravés. Et le présente aux éditeurs parisiens. La suite, c'est l'immense succès de Colline, paru en 1929 chez Grasset. Giono est lancé. Une  amitié indéfectible les unira jusqu'à la mort de Lucien Jacques, en 1961.

Aujourd'hui, Les Amis de Lucien Jacques, des bénévoles réunis en association à Gréoux, font vivre la mémoire et l'oeuvre de cet artiste protéiforme. En quarante ans de présence au village, il avait noué de belles amitiés. Comme celle qui le liait au père de Jacky, l'actuel président de l'association. Jacky n'a pas hésité, quand il s'est retrouvé avec les archives de l'artiste : il a installé un musée de Lucien Jacques dans son propre garage, en attendant que la municipalité se décide à lui céder une aile du château. Il multiplie les publications, les expositions, les lectures. Et accueille volontiers les curieux dans sa caverne d'Ali Baba, pour partager sa passion.
Qu'un ami véritable est une douce chose...

Visites sur rendez-vous : 06 84 83 98 11


mercredi 24 septembre 2014

La Maison de Giono

Le Paraïs, Montée des Vraies Richesses, est une adresse qui invite à gravir la colline du Mont d'Or, point culminant de Manosque, sur les pas de Jean Giono. A l'écart, bien cachée dans un paradis de verdure, sa maison se déguste en petit comité, sous la houlette de bénévoles érudits.

Rien de prétentieux, la bâtisse est simple, morcelée, elle s'est agrandie au fil des années, des besoins. Car Giono abritait non seulement femme et filles, mais aussi mère, belle-mère et grand-mère ! Ainsi que les amis de passage, artistes et intellectuels, ou Parisiens en goguette. Le bureau de Giono ? Il y en a quatre, eux aussi évoluant en fonction des nécessités familiales, puis de la santé de l'écrivain : Giono y a vécu de 1930 jusqu'à sa mort, en 1970. Résultat, dans chaque pièce, une multitude de livres, les bibliothèques couvrent les murs, 8000 volumes, dont beaucoup sont annotés de sa main, des archives qui font le bonheur des chercheurs.

Jean Giono était un lecteur boulimique, passionné, il a rassemblé des écrits de toutes provenances, pour sa documentation et pour assouvir sa curiosité. Peu d'objets d'art, à part les tableaux de son ami Lucien Jacques. Des petits riens qui marquent encore sa présence : un buvard, une lettre, ses pipes. Le marteau de cordonnier de son père, les plumes qu'il utilisait pour écrire. Il fabriquait lui-même ses porte-plumes, qu'il voulait légers, la moitié d'un gramme, en fendant l'extrémité d'un petit morceau de bois.

Devant la maison, une terrasse surplombe la ville, donnant accès à un jardin méditerranéen ombragé. Palmiers, plaqueminier, marronnier, pivoines et rosiers, c'est un lieu de détente et de méditation. L'esprit de Giono y flotte toujours, inspirant visiteurs et créateurs : Hermès vient d'y lancer son dernier parfum, Cuir d'Ange, d'après un extrait de Jean le Bleu.

L'association "Les Amis de Jean Giono" fait vivre ce haut lieu de littérature et de mémoire, labellisé Maison des Illustres depuis 2011.
Visites le vendredi sur rendez-vous, tél : 04 92 34 47 30.


samedi 20 septembre 2014

L'Occitane, un conte de fées provençal

Dans les années 1970, Olivier Baussan a 23 ans, il est étudiant à la fac de lettres d'Aix-en-Provence, et amoureux de la nature. Un jour, dans un champ de lavande, il rencontre un vieil homme avec son alambic. Curieux, il engage la conversation, se fait expliquer le procédé de distillation des huiles essentielles. Une vocation est née, le vieil homme désirant prendre sa retraite, il lui rachète l'alambic. Et pendant quelques années, au volant de sa 2CV, il va vendre sa production sur les marchés de Manosque, Digne, et Forcalquier.

Deuxième rencontre déterminante, quelques années plus tard, avec un savonnier sur le point de cesser son activité. Sans enfants, et séduit par le charisme du jeune homme, il lui lègue sa petite usine de savon. Un rêve de diversification prend corps. Avec tous les parfums de la garrigue, thym, sarriette, romarin, lavande, cade, avec les amandes et l'huile d'olive, Olivier Baussan développe une gamme de cosmétiques naturels, savons, shampooings, lotions et eaux de toilette.

Troisième rencontre, un jour, dans un aéroport, avec une journaliste qui fait un reportage sur les cueilleuses de noix de karité du Burkina Fasso. Le beurre de karité est réputé pour ses propriétés médicinales. Olivier Baussan instaure une relation commerciale avec elles, s'implique dans leur coopérative. Il élargit son activité aux crèmes, onguents, baumes.

La petite usine est devenue une multinationale, qui distribue ses produits dans le monde entier, avec plusieurs unités de production et plus de 2000 boutiques. Une Fondation promeut la lutte contre les déficiences visuelles, et s'implique pour l'emploi des femmes au Burkina.
Dans l'usine hypermoderne de Manosque, un millier de personnes sont maintenant  employées. La visite des lieux permet de découvrir la complexité des mélanges, l'importance de la recherche, le souci  d'innovation et de respect environnemental. De Paris à New York, de São Paulo à Tokyo, l'Occitane porte haut les couleurs et les parfums de la Provence.

Visite de l'usine, du musée et du magasin, sur le site de Manosque.
Vente en ligne : fr.loccitane.com

dimanche 14 septembre 2014

Les santons de Gréoux

C'est un artisanat emblématique en Provence, que la famille Truffier met un point d'honneur à préserver. Et pour cause : ils sont santonniers à Gréoux depuis 8 générations. A partir d'argile rouge de Moustiers et de moules de plâtre, les figurines prennent forme, sont ébarbées, sèchent au soleil, avant leur cuisson au four. De la fabrication à la décoration, tout se fait à la main, et dans le respect de la tradition. L'atelier Truffier-Douzon a obtenu le label convoité d'Entreprise du Patrimoine Vivant.

A l'origine, les santons, symboles de piété populaire, n'étaient pas  cuits. Chaque famille réalisait les siens, qui ne duraient que le temps d'un Noël. Puis les modèles artistiques destinés à décorer les églises se sont démocratisés, l'artisanat des santons s'est développé en France autour de Marseille, au début du XIXème siècle. Les premières grandes foires spécialisées ont permis aux artisans de confronter leurs techniques, de stimuler leur créativité. Santons peints, santons habillés, crèches, villages, décors, les santonniers ont développé toute une gamme d'objets autour de la Nativité, et des petits métiers traditionnels de la région provençale.

Les santons, d'abord commercialisés pour Noël uniquement, ont connu un grand essor avec le développement du tourisme. Puis l'engouement s'est tari, seuls les collectionneurs continuaient de s'y intéresser. Aujourd'hui, un regain d'intérêt pour le patrimoine les remet en lumière. La maison Truffier-Douzon s'inscrit dans la tradition et le savoir-faire. Point de sujets à la mode, mais de l'authentique, en habits neufs. Il faut voir la perfection des détails, vêtements et accessoires du rémouleur, de la poissonnière, du ravi ou de l'Arlésienne...

Leur santon fétiche, c'est le Pistachié, appelé ici Bartoumiou, un coureur de jupons un peu naïf, qui apporte en offrande à Jésus tous les produits du terroir : fougasses, fruits secs, morue et chapelet de saucisses !

Boutique et atelier à Gréoux-les-Bains (04)
Vente par internet : santons-truffier.fr

mercredi 10 septembre 2014

Chronique littéraire : Indigo, de Catherine Cusset

Un extraordinaire voyage en Inde, en compagnie d’artistes français invités à un festival littéraire.
A leur suite, nous découvrons les multiples facettes de ce pays mystérieux, envoûtant. De Delhi à Bombay, du Nord au Sud, de la vie des rues à celle des palaces, le dépaysement des Occidentaux est total, ils doivent apprendre à vivre à un autre rythme, avec d'autres valeurs.

Mais pas question d’un simple roman exotique : Catherine Cusset s’attarde brillamment sur la psychologie des personnages, leurs relations, leur évolution. Chacun, sous un vernis social lisse, cache une fêlure ancienne. Charlotte, Roland, Raphaël, les écrivains invités, autant que Géraldine, responsable de l’Alliance Française, ont rendez-vous avec leur vérité profonde. La moiteur tropicale dans laquelle ils sont immergés exacerbe les tensions. La couleur indigo du ciel annonce l’orage.

Catherine Cusset est née en 1963 à Paris. Après des études à l’université de Yale et une carrière de professeur de littérature, elle s'est installée à New York et se consacre à l’écriture.

Indigo est disponible en poche chez Folio, au prix de 6.80€.

Chronique publiée dans le JTT.

vendredi 5 septembre 2014

La Bibliothèque de Grandvillars fête ses 30 ans

30 ans de livres, de magazines, de disques, puis de CD, DVD, logiciels, partagés;
30 ans de bénévoles et de salariées, d’association en service municipal, de salle du foyer en ancienne poste;
30 ans d’animations, expositions, lectures, contes, ateliers, concours;
30 ans d’accueil d’auteurs, d’artistes, troupes théâtrales et conférenciers;
Bref, 30 ans d’émotions !
                             
Le 6 septembre, la bibliothèque fête son anniversaire, et propose à ses visiteurs de nombreuses animations. Le programme est détaillé sur le site : http://www.grandvillars.fr/culture-sports-et-loisirs/bibliotheque/calendrier-des-animations/140/30-ans-demotions/
Des ouvrages désherbés  seront en vente à partir de 0.20€. Qu'on se le dise ! Pour les amateurs de science-fiction, j'ai rédigé une petite nouvelle, la Bibliothèque dans 30 ans, à découvrir sur :
http://short-edition.com/oeuvre/tres-tres-court/la-bibliotheque-dans-30-ans


Mais le plus beau, c’est l’exposition de photos d’Elena Fedorovich : Petits scènes de la vie. Des instants émouvants, poétiques ou cocasses, saisis dans la rue lors d’un séjour à Saint Petersburg. Cette expo restera visible à la Bibliothèque de Grandvillars jusqu’au 11 octobre. Courez-y !

lundi 1 septembre 2014

L'autre Foire aux Oignons

Le 29 août est jour de fête incontournable à Tournon : La Foire aux Oignons, qui marque la fin des vacances, attire les visiteurs de toute la région. Mais savez-vous qu'il existe, dans un autre coin d'Europe, un marché aux oignons de grande renommée lui aussi, qui se perpétue chaque année depuis l'an 1405 ? Il s'agit du marché aux oignons ( Zibelemärit) de Berne. Une fête rituelle qui mobilise toute cette région suisse, depuis Fribourg jusqu'au Seeland. Des milliers de badauds, des centaines de stands, et des tonnes d'oignons s'échangent entre producteurs et consommateurs. L'atmosphère festive avec bonimenteurs, musique et buvettes, est traditionnelle. Mais là s'arrête la comparaison avec notre foire aux oignons. Car les différences sont notables !

D'abord, le symbole : ce sont les oignons qui sont tressés. Rouges, jaunes, ou en mélange, les tresses d'oignons frais garnissent les stands des maraîchers, alors que les ails, comme tous les autres légumes et fruits de saison, sont vendus en bottes ou en sacs.
Ensuite, le temps : loin de la chaleur rhodanienne, il est plutôt frisquet, il peut même s'accompagner d'averses de neige, car le jour du marché est rituellement fixé au quatrième lundi de novembre. Inutile de dire que les gens sont emmitouflés, et si la boisson traditionnelle reste le vin de pays, c'est de vin chaud qu'il s'agit ! D'autant que la nuit tombe vite, en novembre.

Le soir, justement, la fin du marché prend des allures de Carnaval, avec grandes batailles de confettis, personnages déguisés et, dans les auberges, mise en scène de couplets ironiques sur les événements de l'année. Un Festival des Humoristes, en somme...

Si vous avez raté la Foire aux Oignons ou le Festival de Tournon, il vous reste une possibilité de rattrapage fin novembre. Rendez-vous à Berne, en Suisse !