jeudi 27 juin 2019

Les îles secrètes du golfe de Naples


Naples, mégapole d’une richesse patrimoniale inouïe, est une destination de vacances prisée, malgré sa réputation sulfureuse et … soufrée. Après la vie trépidante de ses quartiers, on peut changer totalement d’univers, en une heure seulement : il suffit de prendre le bateau qui dessert les îles du golfe.
La plus cotée, la plus fréquentée, c’est Capri. Superbe île montagneuse, aux criques mythiques, qui mérite sa réputation, mais draine hélas des hordes continues de touristes. Lieu de villégiature de la jet-set, dès l’Antiquité, puisque l’empereur Tibère en avait fait sa résidence, le moindre café y est hors de prix. Dès l’arrivée au port, on est alpagué par les vendeurs de souvenirs, les taxis, les garçons de café. Pour le visiteur soucieux d’authenticité, Capri, c’est fini.
Ischia est la station balnéaire des Napolitains. Dominée par le mont Epomeo (780 m), cette île volcanique offre une succession de plages, de villages, où magasins et restaurants accueillent les vacanciers dans une atmosphère détendue. Mieux : les eaux chaudes issues du volcan ont engendré une forte activité thermale, on s’y baigne en hiver, des sources bouillantes se déversant jusque dans la mer. De petits bus sillonnent l’île montagneuse. Pour les randonneurs, des sentiers escarpés entre jardins maraichers, vignes, vergers d’agrumes et jasmins odorants, offrent des vues spectaculaires sur le golfe de Naples.
Procida est la plus petite et la plus secrète des îles. Une île de marins, de pêcheurs, dominée par un château-fort sévère. L’activité se concentre autour du port, au rythme des arrivées de bateaux. Les façades colorées des maisons, dans une gamme de rose et jaune, l’église ocre à coupole, les pavés noirs de basalte, forment un décor cinématographique qui varie au gré de la lumière. Les habitants s’interpellent joyeusement dans les cafés, épiceries et pêcheries. Plus loin, la marina accueille les plaisanciers. De nombreux yachts appartenant aux Napolitains y stationnent, utilisés comme résidences secondaires. C’est une oasis de rêve qui s’anime le week-end. Le reste de la semaine, on vit dans une ambiance Dolce Vita, les vélos électriques ont remplacé les Vespas. Seuls, les sirènes des bateaux, les cris des mouettes et les carillons rompent la quiétude de l’île.



Article publié dans le JTT du jeudi 27 juin 2019.

vendredi 14 juin 2019

Chronique littéraire : Taqawan, de Eric Plamondon

Taqawan, c’est le nom que les Indiens Mi’gmaq, au Québec, donnent au saumon qui remonte les rivières jusqu’à son lieu de naissance, pour s’y reproduire. Après la quiétude des eaux salées de la mer, c’est pour lui une épreuve difficile, à contre-courant, où il faut sauter les cascades et échapper aux pêcheurs. Mais incontournable pour assurer la survie de l’espèce
L’histoire des Indiens Mi’gmaq est à l’image de ces poissons. Après avoir vécu dans un immense territoire, prélevant dans la nature juste ce qui était nécessaire à leur survie du jour, il leur a fallu affronter les colons Français puis Anglais, qui ont bafoué tous leurs droits. La nation indienne a été décimée, dépouillée de ses territoires, enfermée dans des réserves. Les pêcheurs industriels ou professionnels ont capté leur seul moyen de vivre, la pêche au saumon. Pour finir écrasés par des règlements absurdes, comme tondre la pelouse et avoir un permis de pêche. D’innombrables et sanglantes révoltes entre Indiens et autorités du Québec et Nouveau-Brunswick ont ainsi émaillé le XXème siècle.
La force du roman de Eric Plamondon, c’est de mélanger une intrigue haletante, l’histoire d’Océane, une jeune indienne rebelle, avec des rappels historiques et politiques sur cette partie d'Amérique du Nord-Est. La guerre interne entre Ottawa et Québec a permis toutes les exactions contre les Indiens, avant qu’ils obtiennent une égalité citoyenne. La réalité actuelle n’est pas simple. Comme le dit un personnage du roman : « Ici, tout le monde a du sang indien, dans les veines ou sur les mains ».
Un roman ancré dans la vénération de la nature sauvage et de la culture amérindienne. Et une belle réflexion sur la différence.

Eric Plamondon est né en 1969 au Québec. Journaliste, écrivain, il vit dans la région de Bordeaux.
Taqawan est maintenant disponible en Livre de poche.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 13 juin.


jeudi 6 juin 2019

Le vinaigre balsamique de Modène



Ce condiment de luxe d'origine italienne ne sert pas à faire une vinaigrette. C'est un élixir, un baume (d'où son nom), d'une texture épaisse, de couleur noire, au goût légèrement caramélisé, qui rehausse les saveurs. Par exemple, une goutte de vinaigre balsamique sur un copeau de parmesan ou des fraises fraîches en sublime le goût.

Mais attention, il y a vinaigre traditionnel de Modène DOP et vinaigre traditionnel de Modène IGP, et ce n'est pas du tout la même chose ! Le DOP (dénomination d'origine protégée) signe l'excellence du produit : tout est fait à la main et localement, depuis la récolte du raisin, la fermentation, jusqu'à la mise en bouteilles. Le vinaigre IGP (indication géographique protégée) ne prouve qu'une chose : le vinaigre a été mis en bouteille à Modène. Celui-là, on peut l'utiliser en vinaigrette. Il est facile de les distinguer grâce à la forme des bouteilles (de 25 cl) et au prix, bien différents.

Le vinaigre balsamique de Modène DOP n'est pas fait à partir de vin mais de moût de raisin. A la Villa San Donnino, une aceteria très réputée dans la campagne de Modène, on produit ce condiment de luxe à partir du cépage lambrusco.  Il résulte d'une cuisson de moût de raisin porté à ébullition en chaudron jusqu'à réduction d'environ 60 %. Le moût ainsi traité est longuement décanté puis élevé en fût de chêne. La maturation se poursuit en batterie de fûts de plus en plus petits, où le vinaigre continue de se concentrer. Une partie du fût est reversée dans un autre plus petit (le fût originel étant complété d'un nouveau moût cuit et ainsi de suite durant 6 ans minimum. Le résultat onctueux n’a rien à voir avec l’acidité d’un vinaigre, c’est plutôt caramélisé, d’où son nom de baume. 


La Villa San Donnino propose à la vente des vinaigres de 6, 12, 24 ans d’âge. Les prix : de 20 € pour un condiment de 6 mois à 200 € pour un nectar de plusieurs années. Dont une seule goutte suffit pour enchanter les plats !

Article publié dans le JTT du jeudi 30 mai.