jeudi 27 janvier 2022

Exposition Bonnard à Grenoble

Le musée des Beaux-Arts de Grenoble, un des plus riches de France, présente actuellement une rétrospective des œuvres du peintre Pierre Bonnard (1867-1947) sous le titre : Les couleurs de la lumière, en collaboration avec le musée d’Orsay.

Peintre, graveur, illustrateur, sculpteur, Bonnard est un artiste total, qui a participé dans sa jeunesse au groupe postimpressionniste des Nabis, avant de poursuivre une œuvre originale, à l’écart des avant-gardes de son époque. Grand voyageur, amoureux de la nature, il n’a pourtant travaillé qu’en atelier, privilégiant les sujets classiques, portraits, nus, paysages, scènes d’intérieur. Sa palette riche et éclatante l’a fait connaître comme un grand coloriste. Il fut qualifié de peintre du bonheur.

Il faut dire que Pierre Bonnard a eu beaucoup de chance dans sa vie. Né dans une famille parisienne bourgeoise et unie, il passe toutes ses vacances dans la propriété de ses grands-parents, agriculteurs au Grand-Lemps en Isère. C’est là qu’il ressent les joies de la nature et son amour des animaux, deux sujets qu’il peindra dès l’adolescence. En 1886 il entre aux Beaux-Arts, puis poursuit sa formation à l’académie Julian. Influencé par Gauguin, il est un des fondateurs du groupe des Nabis (prophète en hébreu), avec Sérusier, Denis, Vuillard… qui refusent les contraintes du réalisme pour aller vers un affrontement de couleurs, dans un symbolisme ouvrant sur la spiritualité.

Après une dizaine d’années, Bonnard se détache du groupe et ne suivra plus aucune école. Il commence à créer des œuvres graphiques pour des affiches, illustre des livres d’art, des revues, décore des hôtels particuliers. Son travail est rapidement reconnu, ce qui lui permet de vivre à sa guise la vie de bohème. Il échappe même de peu à la guerre de 1914-1918, trop âgé (47 ans).  Marthe, la femme de sa vie, restera sa muse principale, lui inspirant de nombreuses toiles intimistes. Grand voyageur, nourri des paysages lointains mais aussi de Provence, du Dauphiné, de Normandie et de la frénésie parisienne, il renoue avec l’impressionnisme. Travailleur inlassable et peintre reconnu, il se lie avec Matisse, Monet…

Son approche entre figuratif et abstraction le rend accessible et contemporain. Ses couleurs, l’utilisation du jaune, de l’orangé, éblouissent. En 1939, il se réfugie au Cannet (06), où il a acheté une maison et peint sans relâche. La lumière qu’il a toujours essayé de capter sur ses toiles explose dans sa dernière oeuvre, un amandier éclatant de vie.

Exposition visible à Grenoble au musée des Beaux-Arts tous les jours sauf mardi,  jusqu’au 30 janvier 2022. 

Tél : 04 76 51 94 07  museedegrenoble.fr

Article publié dans le JTT du jeudi 20 janvier 2022.

dimanche 23 janvier 2022

Chronique littéraire : Dernier arrêt avant l'automne, de René Frégni

Comme Jean Giono, René Frégni est un amoureux de la Haute-Provence, et comme lui, il la décrit passionnément, dans une langue imagée, poétique, parfois lyrique. Dans ce livre, les conditions sont idéales, puisque le narrateur est totalement immergé en pleine nature : Auteur à court d’imagination et d’argent, il a accepté de jouer les gardiens-jardiniers d’un monastère abandonné en pleine forêt aux alentours des gorges du Verdon.  Un job qui lui permet d’observer paisiblement le déroulement des saisons, tout en pratiquant une activité physique qui lui nourrit le corps et l’esprit.

Chaque jour il se coltine à la végétation qui a envahi le domaine, défriche les allées, débroussaille les bosquets, taille les arbres, dégage les terrasses et les jardins de ce monastère à l’abandon qui servit jadis de résidence à un puissant évêque. Sa seule distraction : retrouver ses amis libraires au village de Riez. Il partage sa vie spartiate avec une chatte ronronnante qu’il appelle Solex. Mais si son corps se muscle, son cahier d’écriture reste blanc.

Jusqu’au jour où des sangliers détruisent ses plates-bandes et déterrent une jambe humaine fraîchement inhumée. Un cadavre récent est certainement dissimulé dans le cimetière des moines. Tout change. Le monastère devient un lieu inquiétant, la police enquête, l’angoisse monte. Malgré ce prétexte, ce roman n’est pas un thriller, mais une ode à l’amitié et au silence. A la nature et à l’écriture, source de vie et de paix. A la mélancolie de l’automne et de sa lumière.

René Frégni est né à Marseille en 1947. Son début de vie fut mouvementé, en délicatesse avec la justice. Après avoir bourlingué et accepté toutes sortes de métiers, depuis 1988, il se consacre à l’écriture avec succès. Il vit à Manosque et anime des ateliers d’écriture dans les écoles et les prisons.

« Dernier arrêt avant l’automne » est disponible en poche chez Folio.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 20 janvier.


jeudi 20 janvier 2022

Le nougat de Montélimar

Tout le monde connaît et s’est déjà régalé avec cette friandise emblématique de la Drôme. Mais en connaissez-vous la recette ? Cela paraît simple : des œufs, du miel, auxquels on ajoute amandes et pistaches grillées. Les proportions, les variantes avec adjonction d’agrumes, de chocolat, de fruits secs, sont des secrets bien gardés par les différents producteurs montiliens. Pourtant, ce dessert de Noël continue d’être fabriqué en famille par les amoureux de la tradition, ou les utilisateurs de recettes sur internet.


Le nougat n’est pas né à Montélimar, il est l’héritier d’antiques nougats arabes, italiens et catalans, importés à Marseille puis le long du Rhône par les Romains. D’ailleurs son nom vient du latin « nux gatum » qui signifie gâteau aux noix. C’est vers 1600 que le célèbre agronome ardéchois Olivier de Serres lui offre sa principale caractéristique : en développant la culture de l’amandier, il permet de remplacer les noix, qui souvent rancissaient, par les amandes qui gardent leur saveur. « Nux gatum » devient « nogat », qui signifie amande en occitan. Le terme nougat est adopté en 1701. Et au fil du temps cette friandise essentiellement familiale commence à être fabriquée en confiseries. Vendu en bloc, très dur, il fallait se munir d’un marteau pour dégager de petits morceaux à grignoter. Mais le nougat, devenu un cadeau apprécié des gourmands, voit sa production se développer.


Une autre éminente personnalité drômoise intervient alors pour populariser le nougat : Emile Loubet (Marsanne 1838-Montélimar 1929). Avocat, député de la Drôme, ministre, lorsqu’il accède au titre de Président de la République en 1899, il multiplie dans son entourage les cadeaux en nougats ! Une vitrine publicitaire qui, ajoutée à l’arrivée du train en ville, puis aux célèbres bouchons de la nationale 7, fera de Montélimar l’étape incontournable sur la route des vacances. Pas étonnant qu’à Noël, les Allumeurs de rêve aient revêtu la collégiale Sainte-Croix de nougat !

Le musée du Nougat, installé dans l’ancienne fabrique de la famille Arnaud-Soubeyran, permet de découvrir toute l’histoire du nougat et sa fabrication à travers un parcours enrichi de films, photos, jeux, audioguide. L’incontournable passage final à la boutique, qui regorge de spécialités nougatières, nougat blanc, nougat noir, calissons, … ne laissera personne indifférent !

Musée du nougat Arnaud -Soubeyran, ouvert du lundi au samedi, de 9h à 19h, 22 avenue de Gournier, nationale 7, à l’entrée sud de Montélimar. Tél 04 75 51 01 35

22 Avenue du Go

 Article publié dans le JTT du jeudi 13 janvier 2022.

 

mardi 18 janvier 2022

La fondation LUMA à Arles

Une magnifique tour à facettes métalliques reflétant la lumière a enrichi le paysage d’Arles, métropole romaine, lui conférant un ancrage dans le XXIe siècle : la tour Luma. Inaugurée en juin 2021, œuvre du célèbre architecte Franck Gehry, commanditée par la mécène suisse Maja Hoffmann-Roche. Mais la tour n’est que la partie visible d’un grandiose projet urbain et culturel, qui a transformé le Parc des Ateliers en un pôle artistique et touristique majeur.

Des terrasses du 9e étage, à 56 m de haut, on domine toute la ville, les arènes, l’église Saint-Trophime, les remparts, et le Rhône, jusqu’à l’abbaye de Montmajour. Le regard s’échappe plus loin encore vers la Camargue, la Crau, le Vaccarès et les Alpilles. Ce sont d’ailleurs les rochers des Alpilles qui ont inspiré Franck Gehry pour créer les faces tourmentées de sa tour. Les briques d’inox qui la recouvrent ont été voulues pour capter la lumière changeante du jour, hommage aux toiles lumineuses peintes par Van Gogh à Arles. Tout ici est symbole.

A l’intérieur de la tour, des galeries, salles d’exposition, archives, sont dédiées à l’art contemporain et au multimédia. Un auditorium, des bureaux, un café, une librairie les complètent. Deux structures spectaculaires attirent le regard : l’escalier à double volée qui mène aux étages, et les deux toboggans métalliques qui y répondent, clin d’œil ludique aux visiteurs désireux de profiter d’une descente vertigineuse. Si on utilise les ascenseurs, une autre surprise interpelle : les murs semblent couverts de dalles de sel, un rappel de la richesse locale. La tour est ancrée au sol dans une vaste rotonde de verre, hommage aux arènes, qui ouvre sur le parc paysager en accès libre.

Le Parc des Ateliers est un témoin de l’histoire industrielle d’Arles. Edifié au milieu du XIXe siècle pour la construction et la réparation des locomotives à vapeur de la compagnie PLM, ce site fut au début du XXe siècle le poumon économique de la ville. Après la seconde guerre, il tomba progressivement en désuétude jusqu’à sa fermeture définitive en 1984. Une renaissance progressive lors de festivals comme les Rencontres de la Photographie a permis d’envisager la réfection totale du site par le projet Luma en 2013. C’est l’architecte paysager Bas Smets qui a obtenu carte blanche pour reconfigurer le paysage, en y plantant des espèces issues de la région méditerranéenne, tilleuls argentés, chênes lièges, érables de Montpellier et cèdres de l’Atlas. Un large étang sert à la fois de réservoir d’eau pour l’irrigation et de dispositif de refroidissement pendant les chaudes journées d’été. Quant aux bâtiments industriels, forge, mécanique, électricité, ils ont été réhabilités en espaces d’exposition et de création, café, hôtel ou restaurants.

En 2021, Arles fêtait les 40 ans d’inscription de son patrimoine romain à l’Unesco. Avec la superbe rénovation du Musée Arlaten et de son fonds ethnographique, avec la fondation Van Gogh, le musée d’art moderne Réattu et maintenant la Fondation Luma, son attrait touristique couvre désormais toutes les époques et attire tous les publics.

La Tour Luma et les espaces d'exposition sont ouverts du mercredi au lundi de 10h00 à 18h00. Visite libre après réservation sur le site Billetterie | LUMA

Le parc paysager, en accès libre, est ouvert tous les jours de 07h00 à 18h30.


Article publié dans le JTT du jeudi 13 janvier 2022.

 

mardi 11 janvier 2022

Youpi, on va à Upie !


Le jardin aux oiseaux d’Upie n’est pas un zoo comme les autres. Sa petite taille (6 hectares), sa spécificité d’avifaune exotique, permettent de s’y repérer facilement et de s’y sentir tout de suite à l’aise. C’est l’endroit idéal pour emmener ses enfants ou petits-enfants passer une journée. Les différents volatiles et petits animaux d’Afrique, d’Australie, d’Amérique du Sud sont très accessibles, et bénéficient de bonnes conditions de vie dans ce cadre champêtre.


On peut se promener librement dans le parc, profiter des jeux mis à disposition, pique-niquer… Mais il ne faut surtout pas rater les animations proposées. En particulier le spectacle des perroquets à 11h30. Devant le public, le soigneur sort des volières de superbes aras aux couleurs bleues, rouges, jaunes, éclatantes. Il incite les oiseaux à montrer quelques-unes de leurs performances, s’ils le veulent bien… Parler, marcher, voler, revenir à l’appel, tout cela enchante le public. Le soigneur explique aussi leur éducation, leurs besoins, et les erreurs à ne pas commettre avec eux. Même chose lors du spectacle des rapaces à 17h. Entre temps on peut assister au goûter des lémuriens à 14h, à celui des suricates à 15h, des pélicans à 16H. Chaque fois c’est l’occasion d’apprendre à connaître ces animaux étranges. Les lémuriens en particulier ont la cote, ces petits sous primates sont si mignons, si craquants dans leurs cabrioles !

Le Parc aux Oiseaux d’Upie participe à des programmes d’élevage et de réinsertion d’espèces en danger. Aux passionnés d’animaux, il propose des stages de soigneurs (demi-journée pour les enfants, journée pour les adultes). On peut même y organiser son anniversaire ! Il est ouvert tous les jours d’avril à octobre, les mercredis et dimanches en période scolaire, et tous les jours pendant les vacances. Le reste de l’année ? Les animaux délicats restent bien au chaud dans leurs logis … comme les superbes tortues rayonnées, qui ne sortent jamais à moins de 15°.

Jardin aux oiseaux, route de Montoison, 26120 Upie. Tél : 04 75 84 18 71

https://www.jardin-aux-oiseaux.com/fr

Article publié dans le JTT et La Tribune le jeudi 6 janvier 2022.


jeudi 6 janvier 2022

Les crèches de Naples


C’est à Naples que s’est développé l’art des crèches de Noël. On en trouve partout dans la ville, une rue même y est consacrée : la rue San Gregorio Armeno. Dans cette rue, les artisans continuent de fabriquer santons, accessoires, décors, et les magasins regorgent de tout ce qu’il faut pour monter sa propre crèche.

La fabrication de crèches est une activité traditionnelle de la ville, qui se perpétue depuis plusieurs siècles. C’est dans une église de Naples qu’on a trouvé la première représentation de la Nativité en 1205. Cette idée s’est répandue dans toutes les églises. Des personnages alors strictement religieux furent sculptés dans le marbre ou le bois, en terre cuite, en liège, habillés de tissu ou de papier et exposés aux fidèles pendant la période de Noël.

Mais vers la fin du XVIIe siècle, la mise en scène de la crèche commença à intégrer des sujets profanes, avec les personnages de la vie quotidienne. Au XVIIIe siècle, réaliser une crèche devint le passe-temps favori des aristocrates et des bourgeois de Naples, qui rivalisaient de créativité. Des artistes fameux furent invités à collaborer. Les crèches pouvaient alors occuper des salles entières, on en trouvait en porcelaine, en ivoire, en argent… Ces représentations de la Nativité devinrent populaires, les familles créèrent leur propre crèche chez eux ou dans leur quartier. Ainsi dans la région de Naples, on trouve des crèches permanentes décorant les rues, les cours d’immeubles, les fontaines.

Le musée de la Chartreuse San Martino de Naples conserve la plus importante collection publique de crèches, avec des centaines de personnages. Les rois mages sont accompagnés de ribambelles de musiciens, de gardes, d’animaux exotiques… les anges descendent du ciel en nuées… En plus des figures religieuses, les métiers, la nourriture, les animaux y sont représentés avec une grande précision dans une mise en scène théâtrale.

Les Napolitains sont pieux, mais ils ont aussi l’esprit rebelle et fantaisiste. Les stars actuelles ne sont pas oubliées dans les crèches. Le personnage actuellement le plus vendu dans la rue San Gregorio est Maradona, l’idole des foules, celui qui a porté l’équipe napolitaine au firmament. Il fait figure de saint à Naples !

Article publié dans le JTT du jeudi 6 janvier 2022.