samedi 29 décembre 2012

A tous mes lecteurs...

... je souhaite une belle année 2013, épanouissante, harmonieuse, sereine.


Vous êtes plus de 4000 de tous les pays à lire, écrire, randonner avec moi. Un mot-clé, le hasard ou l'amitié, vous dirigent sur mon site et vous accrochent, c'est impalpable, mystérieux, magique.

Je forme le voeu  que vous soyez plus réactifs, plus interactifs, plus prolixes, car un blog est aussi un moyen de communication.

(je sais, c'est difficile avec ce logiciel, les commentaires se perdent si vous n'allez pas jusqu'au cryptogramme, je rappelle que le plus pratique, c'est de s'identifier dans la catégorie  "anonyme", et de signer votre commentaire à la fin).

A vous !

samedi 22 décembre 2012

Ballon d'A...gapes


Le principe : une journée de randonnée en raquettes, dans la neige fraîche du Ballon, histoire de se décrasser un peu avant les fêtes.
La réalité : un exercice de conditionnement des papilles, de révision des produits du terroir, bref, une préparation aux débordements gastronomiques !

Ça commence doucement, par un café à Giromagny, avec Eric et Patrick, livraison de Tête de Moine, et réflexions métaphysiques.
Ensuite, rencontre sur le parking de la Chaumière avec un curieux papy, casquette et pull rouge. Un nouvel accompagnateur ? Non, Papy Gaby vend sa marchandise, des alcools de fruits qu’il distille lui-même. A 88 ans, il sillonne les routes glissantes du Ballon, pour livrer une production très prisée de kirsch, poire, gentiane, framboise… Nous faisons affaire.

Retrouvailles avec les copains, le paysage immaculé, la satisfaction d’avoir parié sur une belle journée de raquettes. La dernière de l’année, avec une neige qui accroche bien. Eric veut en profiter pour faire du dénivelé, le Trou de la Chaudière le matin, la piste noire du Langenberg l’après-midi, peut-être un retour par le Couloir de la Vierge. Nous chaussons.
11h30, l’heure de l’apéro ! Une table et deux bancs de pique-nique apparaissent comme par magie, au détour du sentier, sous une épaisse couche de neige, c’est un signal incontournable. Nous ouvrons les sacs, sortons verres et bouteilles, et comparons les vertus du Cerdon sec ou aux fruits rouges.

Le meilleur, c’est pour la suite : le repas à la Chaumière, toute en décors de Noël, avec coussins cœurs, feu dans la cheminée, ambiance rustique. Jean-Marie a préparé un menu roboratif : D’abord le bouillon brûlant, puis les salades, céleri, carottes, betteraves, enfin le pot-au feu. Chou, poireau, navet et carottes, pommes de terre rôties accompagnent une macreuse fondante. C’est délicieux, abondant, on fait honneur !
Un munster crémeux, avec du pain cuit au bois, pourquoi pas ? Et pour finir, une tarte aux pommes et aux raisins, servie avec crème anglaise et chantilly. Un café ? Bien sûr, accompagné de pâtes de fruits maison.
Il faudrait peut-être sortir, et se dépenser un peu…

Car à 16h, on revient pour le goûter. La nuit tombe, Martine nous propose ses gâteaux de Noël traditionnels d’Alsace, sablés, pains d’épice, berawecka, brioche aux fruits, avec une bonne infusion aux plantes du Ballon. Sucrée ou salée ? 
Ambiance conviviale, on bavarde, on plaisante, au chaud, au sec. On divague, on échafaude des plans pour l’année prochaine. La meilleure façon de terminer notre année de rando !

lundi 17 décembre 2012

Noël de verre et de cristal



Dans le Nord des Vosges, l'activité de verrerie s’est développée au fil des siècles, et perpétue encore aujourd'hui une tradition de création artistique renommée. Pourquoi là ? D’une part à cause de la présence sur place des matières premières : bois, eau, nécessaires au chauffage et au refroidissement, grès, qui donne un excellent sable, fougères, qui, réduites en cendres fournissent la potasse. D’autre part, une main d’oeuvre qualifiée, autour des verreries et cristalleries de Saint Louis, Baccarat, Meisenthal,  a contribué, par son savoir-faire, à l’émergence d'artistes exceptionnels, comme ceux de l’Ecole de Nancy. 

Le musée Lalique vient d’ouvrir ses portes à Wingen sur Moder. Le parcours de l’artiste y est présenté, à travers un siècle de créations toutes plus époustouflantes les unes que les autres. Quel talent ! Bijoutier de formation, René Lalique s’est passionné pour le travail du verre, a réalisé des bijoux extravagants, portés notamment par Sarah Bernhardt. Devenu la coqueluche du monde entier après l’Exposition universelle de 1900, il a abandonné la bijouterie pour se consacrer à l’art du verre, en créant des flacons  pour les grands parfumeurs, en décorant des intérieurs, dont celui du paquebot Normandie, en réinventant l’art de la table. Sa marque de fabrique, c’est la juxtaposition de verre poli/dépoli, ses thèmes privilégiés : femme, flore, faune. Ses successeurs ont développé ensuite la filière du cristal de luxe.

A quelques kilomètres de là, l’ancienne verrerie de Meisentahl (vallon des mésanges) promue Centre international d’Art verrier, conserve la mémoire du travail de ces artisans, et présente les premières oeuvres d’Emile Gallé, des peintures à la plume d’une finesse extraordinaire, ainsi que d’autres artistes partis à Nancy (pour cause d’annexion du Pays de Bitche). Les souffleurs de verre sont encore en activité, devant des fours à 1000°. Leurs gestes précis, rapides, la magie du verre en fusion, la maitrise de sa fluidité, semblable à celle du miel, forcent le respect. Quelle technique ! L’atelier du diable ? Non, plutôt celui du Père Noël, puisque c’est là qu’on fabrique les authentiques boules de Noël en verre, de toutes couleurs, formes, au design renouvelé chaque année. Les admirer est déjà une fête.

samedi 15 décembre 2012

Chronique littéraire : 1Q84, de Haruki Murakami


Q comme « qiû » (9 en japonais), mais surtout Q comme question, lorsque le monde devient étrange, avec l’apparition de deux Lunes et des « Little People ». Avec 1Q84, le fantastique fait irruption dans une aventure réelle palpitante, on quitte 1984 pour un monde parallèle.

Les chapitres suivent alternativement les péripéties de la vie de Tengo, prof de math et écrivain, et d’Amamoé, prof d’arts martiaux et tueuse à gages. Deux trentenaires marqués par un passé douloureux. On perçoit leurs failles, leurs points communs, avant de les suivre dans leur impossible objectif, liquider un violeur pour l’une, réécrire le livre génial mais inachevé d’une adolescente pour l’autre.
Les autres personnages, Fukuéri, la jeune fille, Ayumi, la vieille dame, Komatsu l’éditeur, Maître Erisomo, sont des êtres originaux, qui expriment toute la complexité du Japon des années 1980. Pays du sourire, de la technologie efficace, mais aussi société machiste, corruption politique, montée des sectes et omniprésence de l’argent. Beaucoup de détails concrets d’une grande minutie, nourriture, habillement, musique, littérature, actualités, qui rendent très vivant ce portrait du Japon.

L’intrigue passionnante, pleine de rebondissements, mélange habilement analyse du Japon passé et contemporain, vie quotidienne et rituelle,  épouvante et science-fiction, à une histoire d’amour délicate. Malgré ce foisonnement, la lecture est facile et plaisante. 
Haruki Murakami, né à Kyoto en 1949,  mondialement célèbre, est le maître incontesté du roman japonais surréaliste.
1Q84 est actuellement disponible en édition de poche 10/18 au prix de 9.12 €.(Trois tomes, qu’on peut déguster séparément, ou s’offrir en coffret cadeau).

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 13 décembre 2012.


samedi 8 décembre 2012

Augustine, rhabille-toi !


Ma formation psychologique étant empirique et parcellaire, j’apprécie les apports théoriques sur le sujet. J’attendais beaucoup du film « Augustine », d’Alice Winocour, sur Charcot. Fondateur de la neurologie, précurseur de la psychopathologie, mondialement connu pour ses travaux sur l’hypnose et l’hystérie, J.M. Charcot (1825-1893) a été le premier à considérer les fous comme des malades, et à les traiter en êtres humains. Cela impose un  certain respect. L’épisode présenté dans le film est particulièrement réducteur.

Je ne critique pas le portait d’un homme austère, taiseux, autoritaire, ambitieux. Il l’était peut-être. Mais ses rapports avec Augustine ! Voilà sa patiente préférée qui guérit par hasard, et non grâce à lui. Qui simule une crise d’hystérie publique, pour que son héros obtienne le soutien de l’Académie. Et finit par faire l’amour avec lui, thérapie qui a fait ses preuves… Tout est ainsi démoli : Charcot, ses théories, l’Académie, la déontologie médicale.
Reste une ambiance réussie de l’époque. Le machisme de la société : L’hôpital de la Pitié-Salpêtrière où seules les femmes sont malades, soignées par des soeurs, sous le contrôle d’hommes, qui griffonnent, ordonnent, bougonnent. Les fameuses Leçons, où un auditoire de messieurs se repait de scènes d’hystérie et d’orgasmes, vécues sous leurs yeux par des jeunes filles dénudées. Et une fin iconoclaste, avec renversement de pouvoir. Le jeu des acteurs est impeccable, Soko futée et charnelle s’opposant à un V. Lindon crédible en scientifique renfrogné.

J’aurais aimé un film sur le rôle précurseur de Charcot. Les séances de travail présentées n’éclairent nullement ses théories. Déshabille-toi. Assieds-toi. Couche-toi. Tu as mal ? Rhabille-toi. Va t-en. C’est frustrant. On est loin d’A dangerous method, de Cronenberg, où les émois amoureux d’une jeune malade, prise entre Freud et Jung, donnaient l’occasion de confronter leurs théories, par des dialogues brillants.

vendredi 7 décembre 2012

Première neige au Ballon d'Alsace


14h, nous sommes huit à affronter la tourmente, sur le parking de l’auberge. Environ 25 cm de neige fraîche au sol, des rafales. Ambiance Antarctique, température -1°, ressentie -6° précise la météo. Aucune visibilité.  Le blizzard glacé attaque à l’horizontale, l’équipement maximum est de rigueur. Nous chaussons les raquettes pour la première fois de l’hiver, pas convaincus. Eric nous entraîne dans la forêt en contrebas, là où le vent ne souffle pas. Et la magie de la neige opère. Vallon ouaté, arbres en tenue de soirée, ruisseau scintillant, on oublie nos doutes. Quelle chance d’être ici, de profiter de cette nature superbe ! Moment privilégié, on se sent tellement mieux qu’en ville, où la pluie doit être sinistre…
 La neige est lourde, sa profondeur irrégulière, la pente est raide, il faut rester vigilant. Quand la fatigue se fait sentir, une cépée de sapins nous offre un refuge magique, un nid à l’abri des branches enneigées, comme dans un conte de Noël. Nous abandonnons masques et cagoules, pour ce moment convivial. Le goûter, c’est important. Et jamais décevant, aujourd’hui crêpes, petits anges à la cannelle, thé, infusion, chocolat…

C’est au retour au sommet que les choses se gâtent. Les voitures sont congelées. La couche de neige épaisse, tassée par la dameuse, forme des bourrelets chaotiques à la sortie du parking. Le jour faiblit, tout est blanc, on ne distingue pas le ciel de la neige. Il faut partir, vite. Nettoyage des vitres, déblocage des portes, des essuie-glaces, rangement du matériel. La première voiture, courageuse, démarre mais stoppe juste devant un amas de neige, il faut contourner l’obstacle, elle repart. La deuxième voiture, téméraire, la suit trop vite, et se plante dans le tas de neige. Aïe ! Solidaires, on pousse, mais ça ne suffit pas. Eric trouve une pelle et dégage les roues, ouf, elle peut repartir. 

Eric part en dernier, pour rassurer tout le monde. La nuit est tombée, la route est glissante, la visibilité mauvaise. Il est prudent, pas le moindre coup de frein, qui mettrait le véhicule en travers. Moi ? Je me sens complètement sereine : traverser l’enfer blanc en voiture avec Eric, en discutant littérature, c’est comme regarder Croc-Blanc attaqué par les loups, du fond de son canapé…

lundi 3 décembre 2012

Chronique littéraire : Le Coeur Cousu, de Carole Martinez

Ecrit dans un style lyrique et merveilleux, qui tisse en fil d'or des liens entre broderie, rêve, mystère et féminité, un livre envoûtant. A la fois conte poétique et récit palpitant, d’une imagination débridée, il nous entraîne dans un monde baroque, onirique, hors du temps.

Frasquita vit la difficile vie d'une femme, dans un village du Sud de l'Espagne, où traditions, religiosité, pauvreté sont le lot commun. Mais elle possède un don extraordinaire : elle coud comme une fée, rend la vie aux vêtements par ses broderies somptueuses, ses raccommodages artistiques, rapièce même les hommes. On la soupçonne de sorcellerie.
Jouée aux cartes et perdue par son mari, elle fuit à travers une Andalousie en pleine révolte, entraînant avec elle ses enfants, tous pourvus de dons bizarres, eux aussi. L'une chante et son chant calme  la foule, l'autre peint sur les murs des motifs exubérants, la troisième se nourrit de lumière, le quatrième parle aux morts, et la dernière écrit. J'oubliais la muette, qui devient... conteuse.
La fuite éperdue de Frasquita et ses enfants, leur survie difficile, révèlent toute la gamme des violences faites aux femmes, ainsi que la force inaltérable du lien maternel. L'alternance des joies et des peines, avec son lot d’oubli, d'entraide. Et la renaissance, par l'amour et le don.

Carole Martinez, comédienne, professeur  de français, romancière, est née en 1966. Le Coeur cousu, son premier roman en 2007, a obtenu un succès considérable et de nombreux prix. Du domaine des Murmures, en 2011 a obtenu le Goncourt des Lycéens.
Le Coeur cousu est disponible en Folio poche au prix de 8,60€.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 29 novembre 2012.