vendredi 27 novembre 2020

Chronique littéraire : La danse du temps, de Ann Tyler

 Un portrait de femme, son évolution à travers quatre époques charnières de sa vie, et la découverte de sa vraie personnalité, à plus de soixante ans.

A 11 ans, Willa découvre qu’elle doit faire face à une mère incohérente, et gérer la famille en son absence. A 21 ans, étudiante en linguistique, elle fréquente Derek, qui veut l’épouser, mais elle aimerait bien finir ses études avant… A 41 ans, un accident brutal met fin à son mariage. Willa s’adapte chaque fois, mais réalise qu’elle n’a jamais rien choisi de sa vie. Qu’elle s’est laissée porter par les événements et par la volonté de son entourage, avec naïveté et pusillanimité.

Alors, à 61 ans, quand un coup de fil venu de l’autre bout du pays lui apprend que sa petite-fille a besoin d’elle, elle n’hésite pas. Même si ce n’est pas vraiment sa petite-fille… C’est cette quatrième partie, la plus importante du livre, qui fait tout l’intérêt de l’histoire. Car Willa apprend enfin à rompre avec les conventions, les habitudes, elle apprend à disposer d’elle-même.

Ann Tyler, romancière américaine née en 1941 dans le Minnesota sait de quoi elle parle ! Dans un style tendre et subtil, elle nous fait entrer dans la danse. On ne peut que penser à Molière qui écrivait : «  Je hais les coeurs pusillanimes qui, pour trop prévoir, n'osent rien entreprendre ». 

Ce roman est disponible en poche aux éditions 10/18.

Chronique publiée dans le JTT.

jeudi 19 novembre 2020

Avec Déclic radio et le Centre socioculturel de Tournon, y a d'la joie!

 Chaque jeudi de 10h à 12h, Déclic Radio, la radio associative locale, propose aux habitants de Tain-Tournon d'intervenir en direct par téléphone dans l'émission Y A D'LA VOIX. L'objectif est de leur donner la parole pour partager avec les auditeurs leurs coups de cœur : lecture, musique, recette, message, dédicace, idée lumineuse … tout ce qui permet de se distraire en ces temps de confinement.

Les interventions se font en direct par téléphone au 0951.500.500, vous pouvez aussi envoyer d’avance vos idées par mail à : cjulou@le-centre.net. Chacun / chacune est libre de s'exprimer sur ses bons plans confinement. Pour écouter l'émission, branchez-vous à la radio sur 101.1 en FM. Ou depuis votre ordinateur ou smartphone via le site www.declicradio.fr

En complément, et toujours afin de garder un lien avec les seniors du territoire, le Centre Socioculturel de Tournon met en place un Journal des seniors hebdomadaire. Dans ce Journal virtuel, envoyé par mail chaque semaine, vous retrouverez des astuces, des idées créatives, des conférences, de la cuisine, du bien-être, des jeux … Vous pourrez aussi découvrir en cliquant sur les sites proposés une séance de relaxation ou de gym … Et même prendre le thé en compagnie grâce à la visioconférence… Pour le recevoir : envoyez un mail à seniors@le-centre.net

Déclic radio et le Centre socio culturel ont mis au point ces initiatives conviviales afin de lutter contre l’isolement. Une nouvelle et sympathique radio-thérapie !




Article publié dans le JTT du jeudi 19 novembre.

jeudi 12 novembre 2020

La tonnellerie artisanale, un savoir-faire ancestral

Lors du Fascinant week-end « Vignobles et Découvertes » d’octobre, deux artisans tonneliers ont présenté leur métier et fabriqué entièrement un tonneau devant le public réuni au Domaine Michelas-St Jemms de Tain-l’Hermitage. Une découverte spectaculaire et passionnante.

Pour fabriquer une barrique à la main, il faut tailler les pièces dans un bois de chêne extrafin ( issu de prestigieuses forêts domaniales géréres par l'ONF), les monter ensemble, puis chauffer au bois, façonner et cercler l’ensemble à la main. Les outils utilisés sont ceux d’anciens tonneliers, soigneusement conservés, tout est fait suivant les méthodes ancestrales. Des méthodes qui exigent force physique, expérience, et précision. La manufacture tonnelière La Grange, située dans la Nièvre, est actuellement une des rares au monde à détenir ce savoir-faire spécifique.

Trente douelles (pièces de bois) sont nécessaires pour faire un tonneau. Le chêne utilisé, vieux de 150 ans, est  façonné en merrains, qui sont  mis à sécher pendant presque deux ans, avant d’être débités en douelles. Le tonnelier commence par aligner les douelles verticalement, en les maintenant en haut par un cercle de métal. Puis il resserre les extrémités du bas par un câble activé par un cabestan. Le montage est alors posé au-dessus d’un feu, pendant environ une demi-heure, pour que le bois se courbe et prenne la forme voulue. Ce "fumage" donne à l’intérieur du tonneau une couleur noisette. Quand le tonneau est formé, le tonnelier glisse un à un les autres cercles en métal galvanisé pour assurer le maintien, les ajuste au marteau. S’ensuivent de nombreuses finitions, polissage du corps, biseautage des extrémités, traçage de rainures à l’intérieur, ajustage du fond, lissage, bonde …  toutes exécutées à la main. Enfin le tonneau fini est replacé une heure au-dessus du feu, en étant régulièrement mouillé avec un torchon humide, pour parfaire son étanchéité. Cette étape de chauffe développe les molécules aromatiques contenues dans le chêne qui apporteront complexité et équilibre au vin. 

Le groupe tonnelier Charlois a décidé en 2016 de redonner vie à cette filière artisanale qui disparaissait. Les tonneliers ont ainsi pu apprendre leur métier grâce à un tonnelier de Cognac pendant 3 ans. Leur gros problème, ce sont les outils : comme il n’en existe plus, ils doivent courir les brocantes pour trouver, asse, jabloir, bastringue… 

Chaque tonneau réalisé est unique, marqué de la « patte » du tonnelier, qui ne peut en fabriquer qu’un par jour. Ces barriques restent opérationnelles pendant 5 ans pour le vin, pendant une vie pour le cognac et autres alcools. Leur prix, environ 1500 € pour une barrique de 225 l, est deux fois plus cher que celui d’une barrique industrielle. Un savoir-faire rare et de haut niveau, qui explique que 70% de la production partent à l’international : USA, Australie, Italie, Espagne, Portugal… 

Chaque étape de la fabrication contribue à la qualité et la personnalité d’un fût qui interagira avec le vin, lui conférant sa complexité aromatique. Les grandes maisons viticoles réservent donc ces fûts pour élever les vins issus de leurs meilleurs terroirs.



Article publié dans le JTT du jeudi 12 novembre 2020.

jeudi 5 novembre 2020

Chronique littéraire : À son image, de Jérôme Ferrari

Nous vivons dans une époque d’images. Dans ce roman, il est question du rôle du photographe, en situation de guerre comme de paix. Des limites de l’image comme représentation du réel. Et des limites de l’homme, que pourtant Dieu a créé à son image.

Deux personnages principaux traversent le roman : Antonia, jeune photographe corse qui après avoir fait ses classes dans le journal local, fournissant des clichés d’attentats et concours divers, est partie couvrir la guerre en Bosnie en 1992. Un besoin d’être utile, d’être vraie. Elle est ensuite revenue au pays, se consacrant à la photo de mariage pour gagner sa vie et une certaine sérénité. Le deuxième personnage est un prêtre, son parrain, qui célèbre ses funérailles. Car Antonia est décédée accidentellement, sa voiture est tombée dans un ravin. Pour lui, qui a connu une vocation tardive, comment parler d’Antonia, de son itinéraire ? Il la connaît et l’aime depuis son enfance, c’est d’ailleurs lui qui lui a offert son premier appareil photo. Deux récits s’entremêlent, chaque chapitre correspondant à une phase de la messe d’obsèques, à une phase de la vie d’Antonia.

Le milieu dans lequel ils évoluent, c’est la Corse, avec son nationalisme exacerbé, ses tensions stériles qui n’aboutissent qu’à la mort d’hommes, au gâchis des énergies, à l’incapacité de fonctionner. Antonia découvre que la guerre en ex-Yougoslavie en est une variante extrême. Elle y perd toute croyance en l’homme. Pour son parrain, la foi aussi ne suffit pas, il ne supporte plus d’enterrer ses proches. Et surtout Antonia.

Une narration bien menée, des personnages vivants, et une analyse critique, désabusée, de la société corse. L’auteur interroge sur les limites de l’image, de l’action politique, de la foi. On retrouve ici les préoccupations mystiques de Jérôme Ferrari, professeur de philosophie en Corse, lauréat du prix Goncourt en 2012.

« À son image » est maintenant disponible en collection Babel chez Actes Sud.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 5 novembre.

dimanche 1 novembre 2020

Laissez-vous conter Vienne

Passer une journée à Vienne (Isère) est agréable et dépaysant. La ville regorge de boutiques originales, et son patrimoine historique, dispersé au fil des rues, est grandiose. L’office de tourisme a concocté un parcours piéton dans le centre-ville, qui permet de découvrir les principaux monuments emblématiques :La Vienne antique, la médiévale, la Vienne de la Renaissance, puis l’industrielle, se succèdent ainsi au fil de places et rues piétonnes bien vivantes. Il suffit de suivre au sol les petits pavés de bronze marqués d’un orme. Mais pourquoi un orme ? Cet arbre serait le symbole des libertés accordées par l'archevêque Jean de Bernin (1217-1266), un des grands hommes de Vienne, aux bourgeois de la ville. Une table ronde, lieu de rassemblement des consuls, se trouvait alors sous cet orme, illustrant la devise : « Vienne, ville sénatoriale ».

La première caractéristique de Vienne, c’est son passé gallo-romain, magnifié par le théâtre antique, où se tient en été le célèbre festival de jazz.  En ville, le temple d’Auguste et Livie, le jardin de Cybèle, la Pyramide, rappellent brillamment cette culture. Au Moyen-âge, dès le IVème siècle, Vienne est devenue ville sainte, les églises s’y sont multipliées : Saint-Pierre (actuel musée lapidaire), Saint-Maurice (cathédrale gothique), Saint-André-le Bas et son cloître. L’Hôtel de ville est, lui, un témoin de la Renaissance, quant au musée des Beaux-arts, il évoque le XIXème siècle. Une diversité architecturale qui reste harmonieuse, et pas du tout pesante.

La grimpette au belvédère du Pipet, qui domine le théâtre antique, avec sa chapelle et sa Vierge, s’impose : de là, un superbe panorama attend le visiteur. Une vue d’ensemble sur la ville et ses monuments, mais aussi ses alentours : Les méandres du Rhône, le musée de Saint-Romain-en-Gal, le château médiéval de la Bâtie. Avec en ligne de fond, les vignobles de Condrieu et Côte-Rôtie, que tous les restaurants de la ville proposent, accompagnés des délices locaux : gratin dauphinois, saint-marcellin, gâteau aux noix ... Vienne a tout pour plaire, à moins d'une heure de route.




Article publié dans le JTT du jeudi 29 octobre 2020.