vendredi 15 mars 2024

Hippolyte Cupillard, la passion du film d’animation

Le pôle de l’image animée de la Cartoucherie à Bourg-lès-Valence rassemble une quinzaine de structures et studios de cinéma, dont Folimage spécialiste des films d’animation, Foliascope dédié au stop-motion et La Poudrière, une école qui forme aux différents métiers du cinéma d’animation. Avec environ 700 emplois, la Cartoucherie représente à la fois une économie locale et une notoriété internationale. Elle a participé à la réalisation de films primés comme récemment « Interdit aux chiens et aux Italiens » et « Léo, la fabuleuse histoire de Léonard de Vinci ».

Difficile d’intégrer la Poudrière, cette formation professionnalisante, où les promotions comptent en général une dizaine d’étudiants venus du monde entier, Chine, Inde, Russie, Italie … Hippolyte Cupillard a eu la chance d’y être admis, et de finaliser ainsi ses études de réalisateur en 2018. Après une formation initiale aux Beaux-Arts de Besançon, suivie d’un Erasmus à la célèbre école d’art et design La Cambre de Bruxelles, ce passionné de cinéma dès le plus jeune âge (ses parents étaient férus de ciné-club) a pu côtoyer à La Poudrière tous les métiers nécessaires à la création d’un court-métrage d’animation. Le vivier cinématographique de La Cartoucherie lui a aussi permis de rencontrer des partenaires de travail et de se constituer un réseau. Car fabriquer un film d’animation nécessite du temps, de l’argent et de nombreuses techniques spécifiques. A partir d’une idée, viennent d’abord le dessin et le scénario. Puis il faut mettre en mouvement les images, choisir musique et bruitage, enregistrer, monter le tout, couper. Pour tout cela, trouver des financements et des distributeurs.

Hippolyte a eu de la chance, son film de fin d’études, L’île d’Irène a été programmé dans les festivals de courts métrages d’animation, ce qui lui a permis de se faire connaître dans le milieu. Son second film, La séance, un hommage au cinéma se relevant du Covid, a été programmé dans les salles du Navire à Valence et du centre Pompidou à Paris. S’il continue de travailler à ses propres créations, Hippolyte collabore régulièrement avec d’autres réalisateurs comme animateur 2D ou dessinateur. Ainsi pour le film « J’ai perdu mon corps » de Jérémie Clapin, primé au festival de Cannes 2019 et à celui d’Annecy.

Le bouche-à-oreille fonctionne, même s’il fait appel au crowdfunding pour financer le court métrage actuellement en gestation, Gemini, dont le thème est : « Est-il possible de rêver jusqu’à oublier sa propre réalité ? Est-il possible de s’enfoncer si profondément dans son monde intérieur que l’on se libère de sa propre souffrance au travail ? ». Vaste question, loin des scénarii populaires. Mais Hippolyte ne cherche pas la notoriété, et en cela le cinéma d’animation se distingue vraiment du cinéma en prises réelles. La création, tellement plus épanouissante, est son objectif. Or Valence offre une intense activité de production visuelle. La Poudrière explose de talents, les conditions idéales pour rendre Hippolyte heureux.

Article publié dans Regard magazine de mars 2024.

mercredi 13 mars 2024

Dans son atelier, l'âme de Toros est toujours vivante


Alors qu’on a fêté l’entrée au Panthéon de Missak Manouchian, penchons-nous sur un autre célèbre expatrié d’origine arménienne, Toros, qui a marqué de son art toute la région, et en particulier édifié le monument en hommage à Missak, à Valence.

Toros, né en 1934 à Alep de parents rescapés du génocide arménien, a développé une oeuvre sculptée foisonnante dès son arrivée en France en 1967, à Valence puis Romans. Les commandes monumentales qui décorent les villes de notre région témoignent de son succès. Des œuvres tantôt figuratives, tantôt cubistes, tantôt épurées jusqu’à l’abstraction.  A Tain : Cérès et son raisin sur le cœur, la Femme à la cabosse devant la Cité du chocolat, le Taureau place du Taurobole. A Romans, le Penseur, la Femme en bleu, le Joueur de flûte ; à Valence, le Rendez-vous, la Mère et l’enfant, l’Enfant au cartable vide à Bourg-lès-Valence… Et dans plusieurs autres agglomérations, Marseille, Aix, Vienne, Saint-Etienne, des allégories en mémoire du génocide arménien. Une carrière développée aussi avec succès à l’international.

Depuis son décès en 2020, Marie, son épouse, fait vivre son œuvre en organisant des expositions, comme celle qui a eu lieu à Aix-en-Provence au Musée des Tapisseries, d’octobre à décembre 2023. Mais surtout, elle ouvre son atelier de Romans à la visite. Les nombreuses œuvres originales exposées, autour des thèmes de la nature, de la femme, des animaux, sont superbes. Les photos affichées de Toros rappellent à tous qu’ici, il a dessiné, puis découpé, martelé, soudé, façonné, coulé, poncé et poli le métal, cuivre ou bronze.

Les visiteurs, particuliers, groupes, se montrent passionnés par le travail de Toros. Notamment les scolaires, encadrés par leurs enseignants de Romans. Lors des séances d’art plastique organisées à l’atelier, ils posent des questions pertinentes et interprètent les œuvres avec beaucoup de sensibilité.  L’enfance de Toros les interpelle, lui qui a arrêté l’école à 10 ans, pour gagner sa vie en travaillant le métal comme soudeur, ferronnier, dinandier. L’usage de ses innombrables outils, la beauté des motifs animaliers, le message de tolérance et de paix, sont évocateurs pour les enfants. Et dans l’atelier de Toros, parmi les œuvres de l’artiste, les travaux scolaires réalisés ne déparent pas.

Marie organise aussi des spectacles musicaux ou littéraires gratuits tout au long de l’année dans l’atelier. Un lieu magique, toujours habité par l’âme de Toros.

Prochain rendez-vous public et gratuit à l’atelier de Toros : une balade littéraire à l’occasion du Printemps des poètes le 17 mars à 15h. Le thème du Printemps des poètes cette année est « La grâce ». Une notion qui résonne parfaitement avec l’œuvre de Toros.

Deux autres concerts sont prévus les 2 juin et 23 juin à 17H.

Contact 06 22 57 91 07 r.toros@wanadoo.fr

Atelier Toros : 16 avenue Jean Moulin à Romans

jeudi 7 mars 2024

Les lumières sauvages de Peaugres


Un monde enchanté, une heure de déambulation nocturne parmi les animaux exotiques, lion, panda, crocodile, ceux de nos forêts et de nos lacs, et même les dinosaures et autres mammouths. Tous mis en scène dans des attitudes naturelles. Mention spéciale à la présentation féérique des contes et légendes, on se croirait dans une dessin animé grandeur nature, la magie est au rendez-vous, les enfants adorent, les adultes se laissent charmer.

A voir au Safari de Peaugres (Ardèche), tous les soirs jusqu’au 30 mars. Entrée : 19.90€.

Article publié dans le JTT du jeudi 7 mars 2024.

Toutes les vies de Thierry Roudil, de la police à la scène

Quel personnage étonnant que Thierry, son cœur d’artichaut, les femmes de sa vie, ses réussites, ses galères, ses problèmes de santé, sa bonne étoile et surtout son étonnante faculté de rebondir après les épreuves. De la police judiciaire au stand-up, du café à l’Appart-Café, de la programmation d’humoristes à l’organisation du Festival du Quai, Thierry est incontournable dans le monde du spectacle à Valence.

 De la police à la scène

Thierry Roudil, né à Bourg-de-Péage, a passé son enfance dans le café maternel. Plus tard, entré dans la police, inspecteur à la brigade des stups à Lyon en 1993, il se laisse déborder par ses enquêtes, ses déceptions amoureuses, dérape et finit par être révoqué au bout de 15 années de bons et loyaux services. Dépression. Mais en 1999, une opportunité se présente :  un ancien café est en vente à Bourg-lès-Valence, il l’achète et le retape, devient le roi de la nuit valentinoise, malgré une addiction à l’alcool. L’Appart-Café est né, il se lance dans la programmation de spectacles d’humour. Et pour ses 50 ans, en 2013, il met au point un spectacle cocasse sur ses déboires sentimentaux. C’est alors qu’une maladie génétique le rattrape, et, en attente d’une greffe de rein, il arrête tout. Rencontre en 2018 avec la femme de sa vie, qui lui donne la force de se battre. Même le Covid qui le laisse temporairement paralysé de ses bras et de ses jambes ne l’arrêtera plus ...

 A contresens

C’est le titre du nouveau one man show de Thierry, dans lequel il évoque avec franchise et humour ses différentes vies, à la fois folles et vraies. Son parcours à contresens. Le spectacle inauguré en 2022 lui a permis de participer au Festival d’Avignon en 2023.  Il s’y est constitué un réseau dans le domaine de l’humour, et de nombreux engagements ont été conclus, on le programme d’abord dans les salles de café-concert, puis sur les scènes de théâtres, à Lyon, Agen, Sète… et Valence ! Thierry cumule maintenant trois vies : responsable d’une salle de spectacle de 60 places, programmateur d’humoristes renommés et artiste lui-même !

Le Festival du Quai

L’Appart-Café, rue Thannaron sur les quais de Bourg-lès-Valence, est voisin d’une école de musique, d’une école de danse, et proche du théâtre du Rhône. Il n’en fallait pas plus pour que Thierry propose à ses voisins de créer un Festival … du Quai. La première édition, en 2016, dure 3 jours. Depuis le festival s’est étoffé, les salles de l’Agora de Guilherand-Granges, du CEP de Saint-Péray, du Comedy Palace et du Théâtre de la ville de Valence, du restaurant La Parenthèse, ont rejoint l’Appart-Café. Le Festival est consacré à l’humour sous toutes ses formes, il se déroule sur 15 jours dans toutes ces salles, attirant plus de 1000 spectateurs. Du 15 au 29 mars cette année, avec de nombreux spectacles gratuits.

Programme détaillé sur www.appartcafe.fr 

Article publié dans Regard Magazine de mars 2024.

vendredi 1 mars 2024

La bibliothèque Tiraboschi de Bergame

Elle m'a accueillie le 22 février, dans une grandiose architecture signée Mario Botta. Les Bergamasques ont apprécié la présentation de mon livre en italien.

Quel plaisir de pouvoir ainsi "ramener" mon grand-père chez lui !


dimanche 25 février 2024

Papeterie, houille blanche et art nouveau: la maison-musée Bergès

Aristide Bergès (1833-1904) est un de ces ingénieux ingénieurs acteurs de la révolution industrielle dans la région de Grenoble.  Héritier d’une longue tradition papetière, il a mis au point l’exploitation des ressources hydrauliques de la montagne pour faire fonctionner ses machines, dont le défibreur, indispensable pour transformer le bois en pâte à papier. Ses revenus lui ont permis de construire une superbe villa près de Grenoble, devenue un musée gratuit.

Aristide Bergès arrive dans le Grésivaudan en 1867, après avoir travaillé dans les chemins de fer, la grande innovation de l’époque. Avec ses compétences et son esprit novateur, il perfectionne les machines papetières existantes. La mécanisation change tout, le métal est substitué au bois pour l’équipement des engins industriels, et le bois remplace les chiffons utilisés pour fabriquer le papier. C’est l’âge d’or des papeteries dans les Alpes, qui fournissent à la fois matière première, force motrice et main d'oeuvre.

En 1869, Bergès aménage pour sa papeterie de Lancey près de Grenoble une première chute d’eau de 200 m, en installant de spectaculaires conduites forcées qui actionnent les machines. En 1882, il innove encore : aux turbines actionnées par les conduites forcées d’une chute de 500 m, il ajoute une dynamo Gramme : il produit ainsi du courant électrique. C’est la naissance d’une nouvelle énergie, l’hydroélectricité, qui se répand sous le vocable de « houille blanche ». Bergès la popularise à l’Exposition universelle de Paris en 1889. En 1896, il fonde la Société d'éclairage électrique du Grésivaudan. Non content de fournir de l'électricité à bas prix à toute la vallée, il alimente la ligne de tramway de Grenoble à Chapareillan.

Auteur de nombreux brevets, ce patron progressiste, maire de Lancey, participe pleinement à son époque. Il contribue à faire de la région grenobloise un pôle mondial des techniques utilisant l’hydroélectricité. La Maison Bergès, installée sur le site de l’ancienne papeterie de Lancey, est devenue un musée dédié à sa mémoire. C’est une splendide demeure de style Art nouveau, décorée en partie par le célèbre peintre Mucha, où art et industrie se mêlent, témoignant de l’âge d’or de l’inventivité au début du 20e siècle. 

La Maison Bergès, musée de la Houille blanche, se trouve à 15 km de Grenoble, à Lancey, Villard-Bonnot. Une visite passionnante, à l’entrée gratuite. Tél : 04 38 92 19 60

Article publié dans le JTT du jeudi 22 février 2024.

samedi 17 février 2024

pour profiter de la neige, il n'y a pas que le ski !

Un grand soleil inonde les montagnes, la neige nous appelle, offrant des aventures à tous les publics : Le ski de fond, qui permet de parcourir de grands espaces hors du monde. La luge, qui réjouit toujours les plus jeunes. Le bonhomme de neige, qui conserve sa popularité. Ou simplement retrouver le plaisir de marcher dans la neige, avec aux pieds de bonnes chaussures ou des raquettes.

Comme pour la balade à pied, pas besoin d’apprentissage avec les raquettes, l’avantage c’est de pouvoir marcher facilement en neige profonde, les raquettes empêchant de s’y enfoncer. On profite alors d’une grande liberté : couper à travers la forêt, sauter les fossés, enjamber les genévriers, rhododendrons ou myrtilliers. Lorsque la neige est glacée, les crampons permettent d’accrocher et d’avancer sans glisser. Lorsqu’il y a des passages sans neige, on enlève les raquettes en un tour de main. Bref, c’est une aide légère et maniable qui permet de parcourir tous les terrains.

Les stations du Vercors proposent des balades accompagnées par des guides connaissant le pays, sa faune et sa flore. L’occasion de découvrir avec eux des empreintes d’animaux, apprendre à les identifier : campagnol, écureuil, lièvre, renard, chamois…  D’observer les particularités des épicéas, sapins, mélèzes et pins arolle. D’écouter les oiseaux, casse-noix moucheté ou tétras-lyre… Une leçon de nature dans la bonne humeur.

On peut aussi tester la balade en traîneau à chiens. Une aventure qui rappelle les lectures d’enfant, Jack London et Croc-Blanc... Là, ce n’est plus en autonomie, puisqu’on s’abandonne à un équipage et son musher. C’est l’occasion d’aller plus loin dans la forêt, plus vite, d’apprécier la cohésion entre les Huskies et leur maître, de comprendre leur hiérarchie : le chien de tête, intelligent, qui sait obéir aux ordres « droite », « gauche », les quatre chiens de vitesse derrière, enfin les costauds placés devant le traîneau. Parfaitement adaptés au climat, ces athlètes ne rechignent pas devant une caresse à l’arrivée.

Quand neige et soleil sont au rendez-vous, la montagne nous gagne. Le problème à Tain-Tournon, c’est qu’il faut une voiture équipée de pneus neige. Deux possibilités sinon : Le ski-club qui organise un bus chaque dimanche. Et les navettes qui relient Valence-Romans à Font d‘Urle. Ou le covoiturage. Car avec les transports en commun, il faut 3h pour atteindre le Vercors enneigé, qui n’est pourtant qu’à 70 km !


Article publié dans le JTT du jeudi 22 février 2024