lundi 27 avril 2020

Chronique littéraire : Au grand lavoir, de Sophie Daull


Sophie Daull est une femme qui a terriblement souffert, mais qui s’est relevée par l’écriture. Après avoir raconté la mort de sa fille de seize ans, dans un lumineux livre de deuil (Camille, mon envolée), puis retracé le portrait de sa mère, assassinée lorsqu’elle-même avait 19 ans (La suture), elle termine cette trilogie dramatique en se penchant du côté du meurtrier de sa mère. Etrangement, ni pathos, ni règlement de compte, dans une écriture à fleur de peau mais maitrisée, elle imagine une confrontation imaginaire entre elle, l’écrivaine, et lui, l’assassin, sorti de prison.

Le personnage fictif que crée Sophie a purgé sa peine, puis vécu une autre vie, il est maintenant en réinsertion, jardinier municipal dans une petite ville. Mais il suffit d’un élément étranger pour qu’il se retrouve confronté au passé qu’il voulait oublier : une émission de télévision où il reconnaît l’auteure, venue présenter son livre. A deux voix, le roman raconte les pensées qui traversent les deux personnages, en route vers une rencontre improbable. Une belle et pudique réflexion sur la punition, le pardon, le repentir.

« Au grand lavoir », on nettoie, on frotte, on gratte pour enlever les taches du passé. Pour l’auteure, c’est une façon de laver sa rage, sa douleur, d’être maîtresse du jeu. Grâce à la littérature, compagne de renaissance.

Sophie Daull, née à Belfort en 1965, est comédienne et écrivaine.
« Au grand lavoir », ainsi que ses deux autres romans, sont disponibles en Livre de poche.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 23 avril.

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