dimanche 25 février 2018

Chronique littéraire : La Grande Arche, de Laurence Cossé


C’est le récit captivant de la construction d’un monument emblématique de Paris, l’Arche de la Défense. Une construction pleine de rebondissements, d’abandons, de revirements et même de tragédie. Un livre qui parle d’architecture, bien sûr, mais aussi d’art contemporain, de politique, d’économie. Et surtout un conflit sociologique entre la pure vision danoise (celle de l’architecte) et la réalité française (affairisme et discontinuité).

Quand Johan von Spreckelsen est promu lauréat du concours d’architecture visant à doter le quartier de la Défense d’une oeuvre symbolique prestigieuse, il est injoignable : parti à la pêche sur la côte du Jutland. Les envoyés du gouvernement français s’arrachent les cheveux. Métaphore du conflit qui va s’installer entre le créateur d’un projet esthétique, raffiné et idéaliste, et l’affairisme politique et financier qui noyaute le gouvernement Mitterrand.
Projet magnifique et exigeant, encouragé par le Président, malgré des changements de majorité, de financements, de responsables, multiplication de sociétés, de règlements. L’architecte danois refuse les compromis, n’accepte pas de prendre en compte les mesquineries, la désinvolture, les retournements des Français. Tout juste s’il tolère la présence à ses côtés d’un architecte efficace, réaliste et connaissant bien le milieu, Paul Andreu. Les conflits incessants iront jusqu’à la rupture. Pourtant le chantier doit continuer. Tout sera- t-il en place pour l’inauguration prestigieuse prévue en juillet 1989 ? Une tranche documentée de notre histoire récente, vue par le prisme de l’architecture, pleine d’intérêt et accessible.

Laurence Cossé est écrivaine, journaliste, critique. Ses romans, qui questionnent le pouvoir dans une approche littéraire, ont obtenu de nombreux prix.

« La Grande Arche » est disponible en poche dans la collection Folio.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 22 février 2018.

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