jeudi 17 octobre 2019

Jean-Baptiste Kléber, architecte de Belfort et général d'Empire

Le bâtiment et la bagarre sont les deux pôles entre lesquels évolue Kléber dès sa naissance, le 9 mars 1753 à Strasbourg. Son père, pauvre tailleur de pierre, décède quand il a 3 ans, Jean-Baptiste, resté seul avec sa mère, connait la misère, la rue, la violence. En 1759, elle se remarie avec Jean-Martin Burger, maître-charpentier, et l’aisance revient au foyer. Une chance pour Kléber qui, à 6 ans, fréquente alors un milieu d’artisans du bâtiment, menuisiers, sculpteurs, maçons. 
Remarqué par la qualité de ses dessins, il est envoyé à Paris en 1772, dans l’atelier du grand architecte Victor-Louis Chalgrin, qui signera l’Arc de Triomphe quelques années plus tard. Entre 1772 et 1774, Kléber s’initie à l’architecture néo-classique, sobre et géométrique, qui s’inspire de l’Antiquité. Il dessine plusieurs projets, tout en menant une vie d’étudiant débauché. Aimable et généreux, orgueilleux et bagarreur, il accumule les dettes, les aventures, sa famille finit par lui couper les vivres. Il passe même quelques jours en prison à Besançon après un duel contre un prétendant éconduit.
En 1774, Kléber revient à Strasbourg, cherche en vain du travail. Il se sent coincé, son tempérament fougueux bouillonne. Le destin le favorise : un jour, dans une taverne, il défend deux officiers bavarois pris à parti par une meute d’assaillants. Les Bavarois apprécient son intelligence, sa stature, son courage et lui conseillent de s’engager dans leur régiment, où ses qualités seront reconnues. Ils intercèdent pour lui, et en 1775, Kléber reçoit une promesse d’engagement chez les cadets du prince de Bavière. A Munich il devient adjoint au professeur de fortifications. Sa prestance, son niveau militaire et la qualité de ses dessins d’architecture le font repérer par le général autrichien Von Kaunitz qui le prend à son service à Vienne. Mais on lui refuse le grade mérité de capitaine en 1782, Kléber démissionne et rentre à Strasbourg en 1783. Son demi-frère François-Martin Burger, inspecteur depuis 1780 des bâtiments publics en Haute-Alsace, lui cède sa place d’architecte à Belfort.  


En octobre 1784, Kléber s’installe place d’Armes. Il doit gérer toutes les constructions des villes et communautés de la région de Belfort. D’abord, la reconstruction de l’église de Chèvremont, terminée en 1787. Puis la réalisation d’un clocher pour l’église de Larivière. Ensuite l’hôpital de Thann, les maisons des chanoines de Lure. Enfin la gestion de l’abbaye de Masevaux, les jardins privés du château de l’abbesse à Florimont. En 1784, Kléber réalise des plans pour la future mairie de Belfort, En paysagiste de talent, il dessine aussi les plans du jardin du château d’Etupes, résidence de la famille de Wurtemberg qui règne sur Montbéliard. En 1789-1791, il construit le château de Grandvillars pour Charles de Péseux, seigneur du lieu.

Dès 1789, Kléber adhère aux idées révolutionnaires. Avec ses amis, à Belfort, il refait le monde. Mais la guerre avec la Prusse et l’Autriche menace. Kléber est détaché en janvier 1792 auprès du général Wimpfen à Neuf-Brisach. La suite, c’est une carrière fulgurante d’officier : Kléber est promu lieutenant-colonel en mai dans l’armée du Rhin. Puis général après ses exploits à Mayence. Envoyé en Vendée, puis à l’armée de Sambre-et-Meuse, il multiplie les victoires. En 1797 il est présenté à Bonaparte, le vainqueur d’Italie. Kléber est séduit, voilà l’homme fort dont la France a besoin pour se relever du chaos. Bonaparte projette la conquête de l’Egypte. Kléber  embarque avec lui à Toulon le 18 mai 1798. 

En Egypte les batailles s’enchaînent, tandis qu’en France le Directoire perd pied. Bonaparte décide de rentrer prendre le pouvoir. Il laisse le commandement de l'armée d'Égypte à Kléber, le 22 août 1799. Kléber arrive à tenir le pays. Le 14 juin 1800, alors qu’il discute avec l’architecte Protain des plans de sa résidence, un fanatique syrien l’assassine d'un coup de poignard dans le cœur. Après avoir tant de fois frôlé la mort comme général, c’est en architecte que Kléber s’éteint.
Article publié dans l'Esprit Comtois n°17 (été 2019).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire