samedi 5 avril 2014

Chronique littéraire : Eva dort, de Francesca Melandri

Une page d’histoire de l’Italie, à travers une région méconnue : le Haut-Adige, ou Sud-Tyrol. La dualité du nom illustre le problème : ce bout de territoire autrichien, livré à l’Italie en 1919, a été italianisé de force, victime de répression ethnique, puis de terrorisme dans les années 1960. Après une longue rébellion, cette région multiculturelle a enfin obtenu un statut autonome. Pacifiée, bénéficiant de l’ouverture des frontières et de l’avènement du tourisme, c'est maintenant une destination de vacances privilégiée.

Le roman de Francesca Melandri raconte le parcours de deux femmes : Eva, fille d’aujourd’hui, bien intégrée dans l’opulent Haut Adige, et sa mère, Gerda, native du Sud Tyrol miséreux, alors de langue allemande. Un monde macho, où Gerda,  fille-mère rejetée par sa famille, n’est arrivée à s’en sortir, que par son travail de cuisinière. L’enfance d’Eva est aisée, mais elle a sa part d’ombre : l’absence du père. D’autant que Vito, figure paternelle de substitution, les a abandonnées inexplicablement après leur avoir fait connaître le goût du bonheur. C’est à sa demande, qu’Eva entreprend un long voyage en train, du Haut Adige jusqu’en Calabre, pour recueillir ses dernières paroles. Et comprendre.

En toile de fond, l’histoire de l’Italie, de Mussolini à  Aldo Moro, et le portrait d'une société patriarcale, religieuse, qui évolue vers la mixité sociale et la tolérance.
Francesca Melandri, écrivain et scénariste née à Rome en 1964, mélange chronique historique et carnet de voyage. Son roman riche et passionnant atteint une dimension universelle grâce à des personnages aux aspirations proches des nôtres.

Eva dort est disponible en Folio au prix de 7.90€.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 3 avril 2014.

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