dimanche 20 avril 2014

Chronique littéraire : Le sermon sur la chute de Rome, de Jérôme Ferrari

Un livre puissant et dense, nourri de spiritualité et de culture, mais intégré dans la réalité actuelle par une intrigue crédible, la course à la réussite de deux amis en Corse. La philo et l'histoire sont à l'honneur, les héros naviguent entre les soubresauts du XXème siècle et le désenchantement du XXI ème, entre Leibnitz qui espère le meilleur des mondes, et Saint Augustin qui annonce la fin inéluctable d'une civilisation.

Alternance de chapitres : d'un côté, la voix du grand-père, Marcel, ses réflexions sur les drames qui ont jonché son parcours, la misère en Corse, les guerres, la vie coloniale.De l'autre la narration proprement dite : Mathieu et Libero amis d'enfance, abandonnent leurs études de philo à Paris pour un projet qui les motive davantage, faire revivre un bar dans leur village natal, en Corse. Succès total : argent et filles à gogo, satisfaction des pulsions, illusion du pouvoir, deviennent leur quotidien.
Utopie de la jeunesse : croire qu'on peut réinventer le monde, sans imaginer que la bêtise, le drame vont les rattraper. 

L'auteur ne s'attarde pas sur les lieux ni les personnages, mais explore les pensées, les espoirs des  hommes. En quelques phrases, il évoque des pays en crise, des situations désenchantées. La Corse, l'Algérie, l'Afrique, le monde étudiant ou rural sont ainsi photographiés, analysés au scalpel, dans toute leur complexité. La fin claque comme une gifle, pourtant, dès le début, le drame est programmé :  l'homme bâtit sur du sable.

Jérôme Ferrari, né en 1968 à Paris, d'origine corse, est  prof de philo et écrivain. Le sermon sur la chute de Rome a obtenu le prix Goncourt en 2012. Il est disponible en Babel Poche au prix de 7.70 €.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 17 avril 2014.

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