vendredi 14 juin 2019

Chronique littéraire : Taqawan, de Eric Plamondon

Taqawan, c’est le nom que les Indiens Mi’gmaq, au Québec, donnent au saumon qui remonte les rivières jusqu’à son lieu de naissance, pour s’y reproduire. Après la quiétude des eaux salées de la mer, c’est pour lui une épreuve difficile, à contre-courant, où il faut sauter les cascades et échapper aux pêcheurs. Mais incontournable pour assurer la survie de l’espèce
L’histoire des Indiens Mi’gmaq est à l’image de ces poissons. Après avoir vécu dans un immense territoire, prélevant dans la nature juste ce qui était nécessaire à leur survie du jour, il leur a fallu affronter les colons Français puis Anglais, qui ont bafoué tous leurs droits. La nation indienne a été décimée, dépouillée de ses territoires, enfermée dans des réserves. Les pêcheurs industriels ou professionnels ont capté leur seul moyen de vivre, la pêche au saumon. Pour finir écrasés par des règlements absurdes, comme tondre la pelouse et avoir un permis de pêche. D’innombrables et sanglantes révoltes entre Indiens et autorités du Québec et Nouveau-Brunswick ont ainsi émaillé le XXème siècle.
La force du roman de Eric Plamondon, c’est de mélanger une intrigue haletante, l’histoire d’Océane, une jeune indienne rebelle, avec des rappels historiques et politiques sur cette partie d'Amérique du Nord-Est. La guerre interne entre Ottawa et Québec a permis toutes les exactions contre les Indiens, avant qu’ils obtiennent une égalité citoyenne. La réalité actuelle n’est pas simple. Comme le dit un personnage du roman : « Ici, tout le monde a du sang indien, dans les veines ou sur les mains ».
Un roman ancré dans la vénération de la nature sauvage et de la culture amérindienne. Et une belle réflexion sur la différence.

Eric Plamondon est né en 1969 au Québec. Journaliste, écrivain, il vit dans la région de Bordeaux.
Taqawan est maintenant disponible en Livre de poche.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 13 juin.


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