jeudi 15 mai 2014

Chronique littéraire : Notre-Dame du Nil, de Scholastique Mukasonga

Dans un lycée de jeunes filles du Rwanda, en 1970, les histoires de cœur et de cours tissent le quotidien. Mais pas seulement. A travers le destin des lycéennes on découvre les prémisses du génocide advenu il y a vingt ans.

Aux sources du Nil, c’est le nom du lycée, construit sur une haute colline, où les jeunes filles de l’élite viennent chercher une éducation en rapport avec leurs ambitions. Religieuses belges, profs français, apprentissage des langues et des bonnes manières, tout semble serein, pourtant tout est faussé. La haine raciale règne, les filles de la majorité Hutu écrasent les Tutsi minoritaires, juste tolérées dans la limite du quota de dix pour cent. La charité de façade, l’indifférence des autorités, ouvrent la porte à la perversion, la violence.

Un vieux planteur blanc, passionné d’histoire, prétend que les Tutsi sont les descendants des pharaons noirs de Méroé sans penser que sa folie douce va précipiter le déferlement de haine. Celle de Gloriosa, fille de ministre, qui, avec ses copines Hutu, tyrannise Virginia et Veronica, pauvres Tutsi, ainsi que Modesta, de sang-mêlé. Le huis clos du lycée exacerbe la montée de la peur, de la violence.
En contrepoint, la vie traditionnelle au Rwanda, des travaux agricoles aux désirs d’émancipation des filles, est évoquée de façon poétique et réaliste, avec un vocabulaire idiomatique parfois compliqué, mais qui donne force et émotion au roman.

Scholastique Mukasonga est née en 1956 au Rwanda. Réfugiée au Burundi, puis en France en 1992, elle a survécu au génocide de 1994, alors que 27 membres de sa famille  ont été massacrés. Le devoir de mémoire traverse son œuvre.
Elle a obtenu le Prix Renaudot 2012 avec ce premier roman, disponible en Folio au prix de 7.40€.

Chronique publiée dans le JTT.

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