samedi 11 août 2012

Les Juscles vont au ciel


Une Via Ferrata, ça manque à mon palmarès de casse-cou. Le canyoning en Corse, le parapente en Drôme, l’hydrospeed en Savoie, c’était super. Maintenant je ne pourrais plus… Mais peut-être qu’une Via Ferrata, je peux encore ?
Si je me pose la question, c’est parce que cette semaine, je partage avec JP la charge de 3 nonagénaires dans une maison isolée de Haute-Loire, en pleine forêt. Une fois les soins, repas, ménage, exécutés, il n’y a rien à faire à des km à la ronde. Saufla Via Ferrata des Juscles, juscle à côté.

Je me renseigne chez le loueur de matériel : vous pensez qu’à mon âge… ? Pas de problème ! Je cogite : s’il n’y a pas d’accompagnateur, ça ne doit pas être difficile. Plutôt amusant. Puis j’entreprends de convaincre JP, plus réservé que moi devant l’expédition. Si tu n'es pas là pour m’encourager, je n’y arriverai pas… Bref, nous voilà partis, avec casques, baudriers, harnais, et de bonnes chaussures. Le lieu est superbe et sauvage, de grandes failles dans une falaise de granit. Au pied du premier mur, j’ai un doute, ça semble vraiment ardu. Mais je fanfaronne encore, le temps d’enfiler le harnachement.

C’est quand je commence à grimper le long de la paroi verticale, que je réalise le traquenard dans lequel je me suis jetée. Impossible de reculer, et difficile d’avancer. Les muscles me manquent pour me hisser. JP : Tu vois, si tu avais qq kilos de moins … Les prises sont très espacées, j'ai du mal à écarter mes jambes. Je m’agrippe au rocher, je me tire à l’aide du filin. Et au pire moment, quand je domine le vide de 40m, il faut changer les mousquetons de câble, et donc se lâcher d’une main. Vais-je tenir longtemps ?
Derrière moi, JP monte sans effort et prend des photos. Premier replat, nous laissons passer des jeunes qui nous ont rattrapés en plaisantant. J’envie leur forme, j’envie aussi leurs gants, les articulations de mes doigts sont déjà écorchées. Tous mes muscles sont tendus, mes genoux gémissent. Et il faut continuer. Des prises, encore des prises. Je suis prise.

Mais il n’y a pas qu’un souci musculaire. Il faut aussi affronter les passages aménagés au-dessus du vide. Et gérer son stress. Quand je mets un pied dans le premier, un filet, je n’ai pas peur, c’est plutôt sécurisant, un filet. Mais quand j’y mets le deuxième, je m’enfonce, et avancer devient aléatoire. Puis il faut passer sur une poutre, solidement fixée, mais au-dessus du précipice. Traverser ensuite un pont de rondins, qui bouge, sans protection, en s’accrochant simplement à deux filins très hauts. Le pire : Marcher sur un fil au-dessus du vide, avec deux  câbles pour sécurité. Epreuve sadique, je n’ose pas regarder, je respire un grand coup, j’y vais la peur au ventre.

Changement de torture, il s’agit maintenant de s’élever sur l’arête sommitale, à la force du poignet. Impossible de placer deux pieds côte à côte, tant elle est aigue, avec deux belles faces verticales. JP : Regarde le panorama, on voit tout le Velay, ses puys et ses sucs ! Impossible. Je peux juscle me concentrer sur la position de mes pieds, mes mains, mes mousquetons. Et le sommet, en plein ciel, j’y arrive à quatre pattes. Un dernier obstacle nous attend : un pont de singe impressionnant qui retraverse la faille. Mais avant d’atteindre la première lame, il faut redescendre, plaqué au rocher, opérer un retournement périlleux, déplacer les mousquetons, et enjamber le vide. C’est vertigineux, difficile, j’ai peur. JP : Ne lâche pas, sinon, tu resteras suspendue à ton harnais sans pouvoir remonter !  Voilà qui me stimule, je me concentre sur chaque mouvement, et lame après lame, j’atteins l’autre côté. Vivante, mais épuisée, suante, tremblante. Un petit sentier escarpé nous ramène en bas. Ouf !


Conclusion: Une Via Ferrata, ce n’est plus de mon âge !

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