Grands espaces, mais plongée dans un monde d’obscurantisme. Au début des années 1600, au Congo, le roi local demande à un jeune prêtre brillant d’être son premier ambassadeur au Vatican pour plaider sa cause.
Honoré par cette mission et peu méfiant, Nsaku Ne Vunda, baptisé Dom Antonio Manuel lors de son ordination, découvre que le bateau sur lequel il embarque à Luanda est un navire négrier, qui se rend d’abord au Brésil décharger sa cargaison humaine. S’il bénéficie d’une position privilégiée, Dom Manuel doit supporter sans pouvoir intervenir le calvaire vécu par les esclaves, ses frères de couleur. Il décide de porter à la connaissance du Pape cette ignominie, espérant que celui-ci interviendra alors auprès des rois d’Espagne et du Portugal, responsables du trafic humain.
Le périple est long et rempli d’embûches. Le navire arrive enfin au Brésil, décharge, recharge, repart, mais il est attaqué en mer des Caraïbes par des pirates. Dom Manuel en réchappe, trouve refuge à Lisbonne, avant d’être emprisonné et torturé par l’Inquisition en Espagne. Mais la dernière traversée, celle de la Méditerranée, en direction de Rome et du Pape, sera douce.
Cette fresque historique, géographique, est aussi un roman de formation. Comment un jeune prêtre exalté et naïf découvre le monde, ses turpitudes, et survit grâce à l’amour et à une foi lumineuse. Une belle histoire d’exploitation des hommes, de mondialisation sauvage, de folie religieuse, qui résonne dans notre époque. Un roman magistral, très documenté, soutenu par une langue poétique, parfois envoûtante comme un conte africain. Les esprits des ancêtres veillent.
Wilfried N’Sondé, né à Brazzaville en 1968, a vécu en Allemagne et en Suisse, il habite actuellement à Paris. Professeur, musicien, écrivain, il est particulièrement bien placé pour parler de l’immigration, de la rencontre des cultures, qu’il aborde toujours dans un idéal de fraternité.
Ce roman est disponible en format poche chez Actes sud, collection Babel.
Chronique publiée dans le JTT du jeudi 30 avril.
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