En Drôme provençale, c'est d'abord la
vision de la lavande qui enthousiasme les visiteurs, longues tiges violettes agitées par le vent, odeur entêtante, présence généreuse
au détour des chemins. Précédant la vue harmonieuse du village
blotti autour de son majestueux château. Mais quelque chose de
rouge, accroché au clocher, tranche sur la couleur dorée des
pierres, et le bleu du ciel. Qu'est-ce ?
C'est une plume géante, emblème du
Festival de la Correspondance, qui s'y tient chaque année depuis 18
ans, la première semaine de juillet.
Un festival dédié à la plume, donc,
qui tente de préserver et faire connaître le patrimoine
épistolaire, (c'est-à-dire des lettres écrites). D'une part,
grâce à des lectures, rencontres et spectacles littéraires, sur
des thèmes renouvelés. Après le théâtre, la Russie, cette année,
il est question de Lettres d'Amérique. Mais aussi, et c'est toute
l'originalité du festival, en incitant à la pratique. Comment?
C'est simple : De nombreux habitants de Grignan mettent à la
disposition des visiteurs une "chambre d'écriture" : une pièce
tranquille avec table, chaise, du beau papier à lettre, des
enveloppes, fournies par la maison Lalo, partenaire du festival.
Des stylos, ou mieux, des porte-plumes, un buvard et de l'encre. Une jolie boîte recueille les lettres, afin de les acheminer aux frais du
festival.
C'est ainsi qu'on peut écrire dans des
endroits aussi extraordinaires que différents : dans un caveau de
dégustation (encre rouge), ou au milieu d'un magasin de décoration, dans
l'atelier d'une potière, ou l'ancien four à pain du village (chaud,
chaud). Dans l'arrière-boutique d'un libraire ou dans un jardin
ombragé. Une cinquantaine de lieux originaux, à découvrir au fil
des ruelles éclairées de roses trémières,
qui invitent à laisser libre cours à son imagination.
Madame de Sévigné, célèbre
femme de lettres, a fait la renommée de Grignan, il y a plus de
trois siècles, en alternant pour sa fille chroniques de la Cour, anecdotes de voyage, et conseils personnels : « Gare à
la flatterie, ma fille : trop de sucre gâte les dents. »
Aujourd'hui, nous sommes en démocratie,
et c'est grâce à de nombreuses bonnes volontés, administrations,
sociétés privées et
bénévoles, que l'on peut lire, écouter ou prendre la plume, à sa
guise, comme la Marquise, dans le beau pays de Grignan.
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