vendredi 18 août 2023

Le sel de la Narbonnaise

La Drôme et l’Ardèche faisaient partie, sous la domination romaine, de la Gaule Narbonnaise. Après la conquête par les Romains, c’est sous le règne d’Auguste, en 22 avant J.C., que la vaste province qui allait des Pyrénées aux Alpes et du fleuve Var aux Cévennes, fut baptisée Narbonnaise romaine. Narbonne fut choisie comme capitale, par sa position stratégique sur la via Domitia, les autres villes importantes de la province étant Nîmes, Orange, Arles, Vaison et Vienne.

La région prospère fournissait déjà d’abondantes ressources en vin, huile d’olive, blé, fruits et légumes. Un vaste centre de céramiques à côté de Narbonne produisait tuiles, briques, amphores pour leur transport dans toute la Méditerranée. Narbonne devint ainsi le port le plus important du monde méditerranéen après Rome. Ce sont encore les Romains qui exploitèrent les premiers marais salants. Le sel étant alors une denrée rare, les soldats romains étaient en partie payés en sel (le salarium, qui a donné le mot salaire). Très prisé car il était le principal conservateur des aliments.


Au Salin de Gruissan, sur l’île Saint-Martin, près de Narbonne, la récolte du sel se déroule toujours de façon artisanale comme au temps des Romains. Des visites guidées permettent de comprendre les différentes étapes de l’élaboration du sel. Sur 365 hectares, à travers 126 bassins limités par des digues d’argile, l’eau de mer parcourt 40 km, s’écoulant d’un bassin à l’autre par simple gravité. L’évaporation par le soleil et le vent réduisant peu à peu la quantité d’eau, la salinité passe alors de 2.7 g par litre au début à 270 g dans les cristallisoirs à la fin du parcours. C’est hors de l’eau que le sel prend sa couleur blanche, avant il est transparent. Mais le plus frappant, quand on visite les salins, ce sont les superbes dégradés de rose dans les différents bassins.  C’est dû à une microalgue qui produit du bêtacarotène. Ingérée par les crevettes, elles-mêmes mangées par les flamants, elle est aussi à l’origine de leur couleur rose.


A Gruissan, un écomusée de la culture du sel présente l’histoire du sel et le travail des sauniers, qui récoltent en septembre, afin de profiter du maximum d’évaporation pendant l’été. Le sel ordinaire se présente alors en croûte épaisse d’environ 15 à 20 cm, qu’on ramasse avec des engins du type chasse-neige, avant de le mettre en tas. La fleur de sel, le nec plus ultra de la production, est la mince couche qui affleure, à moitié dans l’eau, à moitié dans l’air, on la récolte manuellement avec une pelle. La boutique propose toutes les déclinaisons possibles du sel : gros, fin, en fleur, en vrac ou en sachets, aromatisé ou pur.


Le Salin de Gruissan, site naturel préservé, est aussi un lieu d’observation ornithologique. Mouettes, goélands, sternes y trouvent une nourriture abondante, algues, salicorne, lavande de mer ... Ils ne sont pas les seuls ! Depuis l’installation d’ostréiculteurs sur le site ainsi que différents partenariats, le restaurant du saunier propose des produits de la mer et de la terre cuisinés en croûte de sel. Une cuisson à l’étouffée parfaitement diététique, qui conserve le moelleux et les saveurs des aliments. A Gruissan, la vie ne manque pas de sel !

Article publié dans le JTT du jeudi 17 août.

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