Après le décès de son père, employé des postes, la famille
s’installe à Tournon en 1911. C’est au lycée que Théophile-Jean s’initie aux
beaux-arts sous la houlette du peintre Jules Hudry. En 1913 il participe aux
premiers camps d’éclaireurs tournonnais en tant qu’instructeur et découvre
ainsi les Alpes. Sa passion pour la montagne, le massif des Ecrins en
particulier, l’accompagnera toute sa vie. En 1914, Delaye s’engage comme
volontaire dans les Chasseurs alpins. Blessé à trois reprises, il termine la
guerre comme lieutenant.
Le conflit a mis en évidence la nécessité de données cartographiques, et Delaye entre dans le service géographique de l’armée. Il fera toute sa carrière comme topographe militaire, d’abord en France, puis en Tunisie, Algérie, et dès 1925, lors de la guerre de colonisation du Maroc. Il s’agit alors de dresser des cartes précises des régions pacifiées et dissidentes. Delaye sillonne les reliefs à pied, à cheval, parfois à plus de 3000m, dans des zones périlleuses, pour faire ses relevés. Suivant les traces de son illustre prédécesseur, Charles de Foucault, à qui il rend hommage, il explore et cartographie les régions centrales du Maroc. Théoricien de la reconnaissance aérienne, pour appuyer son travail, Delaye ajoute aussi à ses cartes des représentations expressives très réalistes des reliefs, ainsi que des gouaches représentant la vie quotidienne des villages traversés, qui sont de véritables œuvres d’art.
Pendant ses permissions, il parcourt infatigablement les
Alpes, se faisant arpenteur civil du massif de l’Oisans en particulier. Il
croque la montagne sous toutes ses facettes. A partir de 1932 il collabore avec
les éditions Arthaud, pour lesquelles il illustre de planches en couleur une
collection de beaux livres : En Oisans, Chartreuse et Vercors, La Suisse
romande, Toute la Provence … Avec Villes impériales du Maroc, il contribue fortement
à la naissance du tourisme dans ce pays.
Théophile-Jean Delaye
n’est pas seulement un artiste prolifique et un scientifique exceptionnel, il aime
transmettre. Après la seconde guerre mondiale, il devient en 1950 formateur au
service géographique, s’implique dans la promotion des Clubs Alpins, œuvre à la
préservation de sites trop fréquentés. En 1962, retraité à Saint-Donat, il
contribue à la création du festival de musique J-S Bach, dont l’objectif est de
rassembler les peuples pour éviter d’autres guerres.
Cette personnalité locale exceptionnelle était totalement
méconnue dans sa région, alors que sa notoriété est internationale. Une
injustice que le musée de Valence vient de réparer en lui consacrant une
superbe exposition, accessible à tout public. Cartes géographiques d’une
précision exceptionnelle, gouaches et dessins étonnants de naturel, c’est un
régal pour les yeux.
« Théophile-Jean Delaye, un arpenteur du 20e
siècle » est à voir au musée de Valence jusqu’au 26 février 2023.
Article publié dans le Jtt du jeudi 5 janvier 2023.
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