A Saint-Julien dimanche, l’assistance était nombreuse pour célébrer
la messe des Fiancés. Une messe chaleureuse animée par l’équipe paroissiale,
les choristes et les musiciens. Parmi eux, Audra. De son piano, elle
synchronise la partie musicale, avec Clotilde au violon et Quentin à la
batterie. Mais qui est Audra ?
Née à Kaunas, en Lituanie, en 1968, Audra a connu une
enfance choyée, entourée d’animaux. A 4 ans, elle a commencé d’étudier le
violon, puis à 7 ans le piano, mais son rêve était de devenir vétérinaire. Les
difficultés d’emploi sous le joug russe (obligation de partir travailler dans
un kolkhoze) lui ont fait choisir d’étudier plutôt la musique, l’orgue
particulièrement. Pourquoi l’orgue ? Par bravade. Cet instrument était alors
très peu étudié, car les églises étaient fermées par le régime soviétique. Mais
Audra pratiquait sa religion en secret, chez sa grand-mère, à la campagne. Et
pour elle, l’orgue avait les charmes de l’interdit.
On pouvait néanmoins l’étudier à l’université. A Klapaida
sur les rives de la mer Baltique, durant 5 ans, Audra a donc étudié l’orgue, la
composition, l’histoire de la musique… En 1990 un changement majeur a bouleversé
la Lituanie : la révolution, qui permit au pays de se libérer de l’oppression
de l’URSS. Vytautas Landsbergis, un éminent professeur d’Audra, en fut le
principal instigateur. Ce fut une période d’euphorie dans tout le pays, et bien
sûr chez les étudiants qui accédaient à la liberté. La Lituanie déclara son
indépendance, toutes les églises furent réouvertes, et Audra put enfin jouer de
l’orgue partout, de Klapeida à Vilnius.
Mais les postes d’organistes sont rares, et Audra une fois
mariée, a exercé le métier de professeur de piano, tout en élevant ses enfants.
L’orgue a disparu de sa vie. Nouveau bouleversement avec l’arrivée de Patrick, un
Tainois, dans sa vie. Après quelques années passées ensemble en Lituanie, iIs
ont décidé de venir vivre en France. En 2014 Audra a donc quitté son pays, sa
famille, son travail. Un déchirement, mais aussi une aventure stimulante dans
laquelle elle s’est lancée corps et âme, avec le soutien de Patrick. Elle a
appris le français, cherché un travail, n’importe lequel. Patrick travaillant
comme cuisinier pendant la saison de ski dans les Alpes, elle a été embauchée
comme femme de chambre, tout en animant les soirées au piano de l’hôtel.
Finalement installés à Tain, où Patrick avait tenu le
restaurant « le Vivarais » auparavant, Audra a cherché de nouveau un
emploi. Faute de poste disponible de professeur de musique, elle a commencé à
donner des cours particuliers de piano. Et à fréquenter les différents
organistes de Tain, Tournon, Vion, Saint-Donat, avec qui elle a peu à peu collaboré,
en animant les messes. Après tant d’années, quel bonheur de pouvoir enfin
rejouer de l’orgue ! Ainsi, pendant tout le mois de décembre Audra a
enchanté par ses concerts gratuits les visiteurs venus admirer la crèche
monumentale installée dans l’église de Vion.
Devant les revers de la vie, courageuse, optimiste, Audra s’est adaptée. Lorsque Patrick, greffé du rein, a dû être dialysé, elle a suivi la formation d’aide-soignante, pour le dialyser à domicile. Son rêve d’enfance, être vétérinaire, elle l’a matérialisé en passant le diplôme d’assistante vétérinaire. Pendant le confinement, musicienne passionnée et généreuse, elle a même composé une messe complète, dédiée Saint-Julien. Audra est une battante, qui jongle maintenant entre ses différents élèves, les animations des messes à l’orgue et ses animaux, lapin, chien, poules, qu’elle chouchoute dans son petit jardin de Tain. Audra, c’est l’énergie, le talent et la gentillesse réunis. Une belle personne.
Article publié dans le JTT du jeudi 3 février.
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