dimanche 10 janvier 2021

Deux pionnières en pédagogie

Maria Montessori et sa pédagogie

On célèbre cette année les 150 ans de la naissance de Maria Montessori (1870-1952 ), Italienne mondialement connue pour la méthode pédagogique qui porte son nom. En France, on compte plus de 200 établissements et dans le monde 35 000 écoles Montessori. Dans la région Drôme-Ardèche, il en existe à Valence, Romans, Die, Pierrelatte, et même Lablachère (sous l’impulsion de Pierre Rabhi). Ces écoles ne sont pas sous contrat, donc ne reçoivent aucune subvention de l'État, ce qui les différencie du reste de l'enseignement privé, les parents doivent donc rémunérer l’école. Elles s’adressent aux jeunes enfants, en maternelle ou primaire. 

Mais comment une pédagogie créée en 1907 dans un quartier pauvre de Rome par Maria Montessori est-elle devenue la marotte éducative des bobos de l’Occident ?


La méthode

Le programme des écoles Montessori favorise la confiance en soi, l'autonomie, la motivation, la curiosité, la créativité, la sensorialité. Elle promeut la maîtrise de soi, le respect des autres et les capacités d'adaptation. Comment ? A travers un enseignement individualisé, respectant le rythme d'apprentissage de chaque enfant, et en partant toujours du concret (grâce à un matériel spécifique) pour aller vers l'abstrait. Pas de classe de niveau, de programme obligatoire, mais un éveil passant par les activités de nature, parfois l’entretien d’un jardin, d’un poulailler, des sorties en forêt, réutilisés ensuite à l’école. Maria Montessori affirmait : « L'intellect de l'enfant ne travaille pas seul, mais, partout et toujours, en liaison intime avec son corps, et plus particulièrement avec son système nerveux et musculaire. » 


La vie mouvementée de Maria Montessori

Née en 1870, Maria Montessori a d’abord dû se battre pour avoir le droit d’étudier comme les garçons. Elle a lutté toute sa vie pour faire évoluer le statut des femmes. Elle fut une des premières femmes médecins d’Italie, portée par une volonté et un charisme extraordinaires. Spécialisée en psychiatrie, elle étudie les enfants déficients mentalement. Observe qu’ils n’ont aucun jeu à leur disposition, alors qu’ils auraient besoin d'action pour progresser et développer leur intelligence. Elle se bat pour changer leur statut, leur procure du matériel, obtient des résultats probants. Et commence à enseigner sa pédagogie spéciale dans les écoles de formation des maîtres. Tout en complétant ses connaissances par des voyages d’étude, à Paris, à Londres, des cours de psychologie et philosophie. Conférences, publications, elle devient professeur à l’université de Rome en 1904.

En 1906, elle se tourne vers les enfants « normaux » d'âge préscolaire. Et ouvre la première Maison des enfants (Casa dei bambini) en 1907 dans le quartier populaire San Lorenzo à Rome. Les enfants bénéficient d’une « petite maison » pour y vivre la journée. Les parents y ont libre accès, en contrepartie, ils doivent veiller à la propreté et à la bonne tenue vestimentaire. La Casa dei bambini devient une base de recherche, un laboratoire d'expérimentation où Maria Montessori construit et éprouve sa méthode qui s’appuie sur la liberté de choix des élèves, l’autodiscipline, le respect du rythme de chacun et l’apprentissage par l’expérience, avec un mobilier et un matériel pédagogique adaptés. Encore une fois, c’est un succès. De 1909 à 1918, elle forme ses premiers enseignants, organise des cours internationaux, crée des maisons d'enfants pour de nombreuses organisations caritatives, multiplie les voyages à l’étranger et les conférences. En 1929 elle fonde l'Association Montessori Internationale. En conflit avec Mussolini, Maria Montessori quitte l'Italie et s'installe en Espagne, puis aux Pays-Bas, enfin en Inde, de 1939 à 1946, poursuivant inlassablement ses conférences. De retour en Europe en 1946, elle poursuit son travail, et meurt à Noordwijk aux Pays-Bas en 1952 à l'âge de 81 ans, alors qu’elle préparait un cycle de conférences en Afrique.

Pour en savoir plus : Une biographie très complète : « Maria Montessori, une vie au service de l’enfant », vient de sortir chez Desclée De Brouwer.


 Pauline Kergomard

Sans atteindre la renommée de Maria Montessori, mais quelques années avant elle, la Française Pauline Kergomard (1838-1925) fut une pédagogue exceptionnelle. Pauline Kergomard est à l'origine de la transformation des salles «d' asile», établissements qui accueillaient les enfants pauvres, dans des locaux exigus, sans hygiène, où on pratiquait une sorte de dressage, en écoles maternelles. Elle introduisit le jeu, qu'elle considérait comme pédagogique, les activités artistiques et sportives. Elle prôna une initiation à la lecture, à l'écriture et au calcul, avant cinq ans. Elle s'opposa toutefois à la tendance de faire de ces écoles des lieux d'instruction à part entière, s'attachant plutôt favoriser le développement naturel de l'enfant. En 1881, Jules Ferry fit d'elle l'inspectrice générale des écoles maternelles, poste qu'elle occupa jusqu'en 1917, alors âgée de 79 ans ! Des écoles, dont une à Tournon, portent le nom de Pauline Kergomard, une façon de rendre hommage à cette pédagogue novatrice et méconnue. 


Héritage

Le ministre de l'éducation nationale Jean-Michel Blanquer s'est dit en 2017 favorable à l'esprit Montessori : « Je suis pour la créativité, la diversité des expériences. Au-delà du génie pédagogique qu'était Montessori, c'est sa démarche qui est importante. »

Et le 16 octobre 2020, Brigitte Macron, visitant les locaux de sa future « école de la deuxième chance » pour adultes, LIVE, qui ouvrira sur le boulevard à Valence en février 2021, en a précisé l’esprit : « "C'est une méthode un peu à la Montessori, un suivi personnalisé".


Article publié dans le JTT du jeudi 7 janvier 2021. 

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