La Chartreuse est terre de frontière : à cheval sur Isère et Savoie, auparavant zone frontière entre France et Italie. De quoi favoriser l’installation de populations recherchant la tranquillité, comme les moines. En 1080, Bruno et six compagnons demandent à Hugues, évêque de Grenoble, l’autorisation de s’installer dans un endroit désert de la montagne. Ce sera à Saint-Pierre-de-Chartreuse. Le premier ermitage érigé en bois à Casalibus, en 1084, deviendra le berceau d'un grand ordre contemplatif, les Chartreux. Emporté par une avalanche en 1132, il fut reconstruit en pierre en 1133 un peu plus bas. On ne visite pas le monastère, voué au silence et à la prière, mais un musée est installé à la Correrie, deux kilomètres avant. Ce bâtiment, réservé autrefois aux frères convers, des laïcs qui assuraient les tâches quotidiennes ainsi que la mise en valeur du domaine, recevait aussi le courrier, d’où son nom. Le musée retrace l'histoire et la vie simple et sobre des Chartreux. Mais à la boutique, on peut se lâcher … et acheter la fameuse liqueur de Chartreuse, sous toutes les formes : flacons, mignonnettes, bonbons, chocolats (la distillerie a été transférée à Voiron).
Un autre musée exceptionnel a vu le jour à
Saint-Hugues-de-Chartreuse : le musée départemental d’art sacré. En 1949,
Arcabas, alors jeune professeur aux Beaux-arts de Grenoble, cherchait une
église à redécorer entièrement. Le prêtre et le maire de Saint-Hugues ont
accepté son projet et mis l’église poussiéreuse du village à sa disposition. Dès
1952, Arcabas et ses étudiants ont commencé à nettoyer, enduire les murs, avant
que l’artiste puisse exprimer toute sa créativité, dans une dominante de
couleurs rouge, or et noir. Les murs étant humides, il a peint les scènes de la
vie quotidienne et de la vie religieuse sur de grandes toiles de jute
suspendues dans toute l’église. Jusqu’en 1972, il a conçu non seulement le
décor mural, mais aussi les vitraux, sculptures, candélabres, tabernacle et
autel. Après être passé du figuratif (les toiles) à l’abstrait (les tableaux du
Couronnement placés au-dessus), il est revenu terminer son œuvre en alliant les
deux tendances dans les petits tableaux de la Prédelle (en dessous). En tout
111 tableaux légués par Arcabas au département de l’Isère en 1984. Un ensemble
contemporain extraordinaire, une éblouissante polyphonie de couleurs.
Nature, culture, sport et détente, les grands espaces de la
Chartreuse sont une belle destination de proximité pour se régénérer. A votre santé !
Article publié dans le JTT du jeudi 31 décembre 2020.
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