En Sicile, des
courses clandestines de chevaux sont organisées de nuit, loin de tout contrôle.
Une économie souterraine, avec paris, défis, violence. Une autre mafia, qui
reflète l’ambivalence du pays, entre beauté éclatante et sombres trafics. Cet implacable documentaire nous entraîne dans un
monde où les chevaux n’ont que la valeur de leurs jarrets. Pas de discours
superflu, mais des images fortes.
Un cheval au galop, attelé à un sulky, sur une route
panoramique au-dessus de Catane. Nuit et pluie. Une voiture, phares allumés,
suit l’équipage. Des hommes courent à côté. Etrange douceur du jour qui se lève,
alors que la force sauvage d’un cheval se déploie, incongrue dans la
circulation automobile.
Séquence paisible, à l’écurie, cachée dans une ruelle sombre
de la ville. Réduit
sordide, surveillé par visiophone. Un gamin, Vittorio, nettoie le crottin,
change la paille, brosse l’animal. Quelques caresses échangées. Cheval nerveux,
toujours entravé, hypersensible aux bruits. Le patron arrive, aboie ses ordres,
il faut harnacher, atteler, vite. Des entraînements successifs, toujours en fin de nuit, dans
les rues de Catane, entre les voitures. Ou sur la plage, dans un petit matin rose
et bleu. Mais pas d’angélisme, le cheval comme le garçon sont tous deux
exploités, sacrifiés au dieu Argent.
Le martèlement des sabots, au pas, au trot, au galop, scande
le film, staccato du destin résonnant sur le bitume des boulevards. Ordres
hurlés du cavalier, halètement du cheval, voix grasses des parieurs, la
bande-son dépouillée laisse la part belle au cheval. Au pas, il rentre, épuisé.
A l’écurie, la piqûre de dopage l’attend. Les paris sont ouverts.
Déferlante de la course finale, sur une route déserte, dans la montagne. Un duel de
chefs, par animaux interposés. Galop surréaliste des chevaux, brun contre
blanc, au milieu d’une horde de scooters et motos lancés à plein régime, dans
un vacarme de klaxons. Ni la Madone, furtivement invoquée, ni l’Etna majestueux
et impassible, au loin, ne peuvent les sauver. Une interprétation moderne des Cavaliers
de l’Apocalypse, annonciateurs de catastrophes.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire