Chaque année, la manifestation du
premier week-end de juin permet de découvrir quelques jardins. Hier, à Alboussière
dans l'Ardèche, j'ai été éblouie par un parc paysager extraordinaire.
Pourquoi extraordinaire ? Par la
situation, d'abord, puis la conception originale, le travail opiniâtre et enfin la beauté du résultat.
Le lieu, le nom : Terre de Pimprenelle.
On s'attend à un petit jardin féminin, léger, citadin. Et c'est
tout le contraire. D'abord, il faut affronter la rude montagne
ardéchoise, sur des kilomètres, avant de trouver l'endroit. Sur un
vaste plateau isolé, ondulé, battu par les vents, un ensemble de
bâtiments agricoles restaurés avec goût dans la pierre blonde du
pays. Entouré de plus d'un hectare de terrain, où végétaux et minéraux
sont agencés suivant une volonté, un investissement, hors normes.
Le concepteur du jardin n'a rien d'un
doux rêveur, même s'il est animé d'une étrange folie des symboles
mathématiques. D'origine lorraine, il a commencé là-bas par créer
un petit jardin, vite réputé et visité. Désirant alors faire les
choses en grand, il a dessiné le plan du jardin de ses rêves, avec
comme règle de base le nombre d'or. Ce rapport d'harmonie sera
observé dans les proportions des massifs géométriques, ellipses,
spirales. Dans sa déclinaison arithmétique, les suites de nombres
de Fibonacci régleront l'espacement des arbres de même nature, leur quantité, la
place des éléments décoratifs. Ne restait qu'à trouver le terrain
idéal.
Raphaël Benedetti a mis deux ans avant de le
trouver à côté d'Alboussière. Il a organisé le déménagement de son jardin lorrain, trois
semi-remorques de végétaux et minéraux. Rien par rapport à la
suite, puisqu'il intégrera en tout 1200 tonnes de roches grandioses
dans son parc. Son jardin a nécessité deux ans de préparatifs,
piquetage, drainage, aménagement d'un ruisseau, système d'arrosage
intégré, avant la plantation proprement dite d'essences rares. Mais
une dizaine d'années après, le résultat est stupéfiant.
Une collection d'une centaine de ginkgo bilobas, de 37 variétés différentes, des érables de tous formats, des méta séquoias rarissimes, s'épanouissent au milieu d'autres végétaux plus classiques, charmes, fusains, hêtres, cornouillers, bouleaux, viornes. La géométrie des volumes est maitrisée par un jeu d'alternance entre variétés naines, buissons touffus, arbres élancés. Les harmonies entre les couleurs de feuillages sont superbes. Les massifs de pivoines, hydrangeas, roses, glycines et clématites ponctuent le décor de leurs notes fleuries. C'est un enchantement.
Le travail accompli est titanesque.
Théâtre de verdure, carrière tellurique, métaphore minérale de
l'histoire de l'homme, la visite avec le jardinier est riche
d'enseignements, botaniques et philosophiques, et merveilleuse pour
les sens.
Un jardin labellisé Remarquable par le
ministère de la Culture, qu'on peut visiter de mai à octobre.
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