Le charronnage, mal connu aujourd’hui, fut pourtant un artisanat essentiel pendant des siècles. Il s’agissait de fabriquer les roues, pour équiper charrettes, calèches, diligences et autres véhicules à cheval ou à bras. Un travail de force et de précision, qui nécessitait la maîtrise rigoureuse du bois et du fer. Joseph Besset, né en 1890 à Vanosc, près d’Annonay, fut un Ardéchois visionnaire, ambitieux et acharné au travail comme ses prédécesseurs, Seguin ou Montgolfier… Fils de paysan, il choisit pourtant le métier de charron et entra en apprentissage chez le meilleur patron d’Annonay. Le début d’une carrière pleine de rebondissements.
Pour fabriquer une roue, il faut de nombreuses étapes :
d’abord découper le moyeu en orme, le façonner sur un tour, creuser rainures et
encoches régulièrement. Ensuite, découper les rayons en acacia, les insérer
dans les encoches. Fermer la roue avec des jantes en frêne. Puis préparer le
bandage en fer, l’arquer, souder les extrémités. Enfin le positionner à chaud
autour de la jante. Il faut donc combiner le travail de menuisier et de
forgeron.
En 1907, Joseph connaît son métier et veut découvrir
le monde. Avec un ami, ils se fabriquent deux vélos et partent travailler à
Paris, puis en Bourgogne, à Tours, à Rouen. Joseph continue vers l’Angleterre,
où il se joint à l’atelier de charron de la Cour royale. A 21 ans, il revient en
France pour faire son service militaire obligatoire, 2 ans au Maroc. Libéré en
1913, il épouse Marie-Augustine et fonde son propre atelier à Annonay. Mais la
guerre arrive.
Elle marque un tournant pour lui : il en revient indemne
et convaincu que c’est la fin de la traction animale. Il abandonne « la
traction à crottin pour la traction à pétrole » et décide de se consacrer
à l’équipement personnalisé de voitures automobiles. Il conçoit la structure de
bois, la pose sur des longerons, ajoute les roues, le moteur, puis habille le
tout de métal, et garnit l’intérieur. Menuisier, forgeron, tôlier, peintre,
sellier, de nombreux ouvriers collaborent avec lui. En 1920 sort sa première
voiture, une Roland-Pilain. Suivront Bugatti, Berliet, Delage…
L’entreprise Joseph Besset se développe. Joseph part
aux USA, en rapporte un brevet, et une nouvelle idée : développer plutôt
les transports en commun. En 1927, avec Ferdinand Janvier, il lance sa
production d’autocars avec ossature bois et moteur à l’avant. En 1938,
changement révolutionnaire avec le choix du moteur à l’arrière et une structure
autoportante métallique : le premier autocar Isobloc voit le jour. Joseph sait parfaitement
utiliser le marketing, et son entreprise est florissante. La deuxième guerre
freine sa réussite, mais il rebondit en 1946, avec 1300 salariés et plus de 10
véhicules produits par jour.
Au fil des restructurations, la SACA (société
annonéenne de construction automobile) devient SAVIEM, RVI (Renault véhicules
industriels), IRIS et maintenant IVECO. Cette société continue d’être le plus
grand employeur d’Annonay, et la seule entreprise de fabrication de bus et cars
de France !
Le musée du Charronnage au Car à Vanosc met en scène
cette saga passionnante, à l’image de la vie de son créateur, Joseph Besset. On
y voit de magnifiques voitures, camions et autocars anciens. Ouvert toute
l’année, grâce à l’action solidaire des bénévoles de l’association locale La
Vanaude, il illustre parfaitement le respect qu’en Ardèche verte, on porte aux
grands innovateurs.
Tél 04 75 34 79 81 ; site : museeducar.fr
Article publié dans le JTT du jeudi 2 novembre 2023.
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