A Valence et dans l‘aire urbaine, 10% de la population est
d’origine arménienne, soit environ 15 000 personnes. Les premiers émigrés
sont arrivés dans les années 1920, rescapés du génocide perpétré par les Turcs
en 1915. Ils se sont rapidement intégrés, tout en conservant leur identité, et
la ville de Valence s’est ainsi enrichie d’une culture singulière encore bien
présente aujourd’hui.
L’Arménie fut au Ier siècle un grand état qui s’étendait de la
Méditerranée à la Mer Caspienne. Après diverses guerres, invasions, elle fut démantelée
et annexée par l’empire ottoman. Pour étouffer les velléités indépendantistes
de l’Arménie, chrétienne, le gouvernement turc, musulman, a profité de la
première guerre mondiale. Il a entrepris le premier génocide de l’histoire,
faisant environ un million et demi de victimes. Ceux qui réussirent à
s’échapper arrivèrent par bateau à Marseille et remontèrent la vallée du Rhône
au fil des embauches possibles. La France avait besoin de main d’œuvre pour
compenser les morts de la guerre. Près d’un millier d’Arméniens s’installèrent
dans la vieille ville de Valence, un quartier déshérité, pour travailler dans
les usines locales.
La crise économique et financière de 1929 entraînant en
France un chômage massif, la loi Laval décréta que les entreprises devaient
embaucher en priorité les Français. Les Arméniens se reconvertirent alors en
artisans et commerçants. Dans la rue Bouffier, on trouve encore la trace des
épiceries, boulangeries, cordonneries arméniennes … Hélas le quartier appelé La
Petite Arménie fut victime du bombardement américain du 15 août 1944 qui visait
le pont sur le Rhône. 80 victimes, de nombreuses maisons détruites, en
particulier l’église Saint-Grégoire l’Illuminateur, située en basse ville.
Reconstruite, décorée de fresques par Dante Donzelli, elle honore toujours Saint
Grégoire, qui à la fin du 3è siècle, évangélisa l’Arménie, le premier état
chrétien du monde.
Des personnalités arméniennes sont commémorées à Valence, grâce aux œuvres expressives et puissantes du sculpteur Toros, lui-même arménien. La souffrance de l’humanité, place Manouchian, témoigne de l’engagement contre le nazisme de Missak Manouchian et de son groupe de 23 résistants, tous immigrés, exécutés en février 1944. Un parterre de grenadiers emblématiques de l’Arménie l’entoure. Le monument en mémoire du génocide, square Stépanian (figure marquante de de la municipalité valentinoise), financé par la communauté arménienne, a précédé la reconnaissance officielle par l’Etat français du génocide du 24 avril 1915. L’impasse Kasparian, honore le souvenir d’un autre résistant. Le square Aznavourian rappelle la fidélité du célèbre chanteur à ses origines.
En face, le CPA, centre du patrimoine arménien, raconte l’histoire du peuple arménien et propose de nombreuses animations qui éclairent l’actualité en regard de l’histoire. Actuellement, l'exposition temporaire est consacrée à la mémoire des Italiens venus s'installer en France. D'une émigration à l'autre, d'une guerre à l'autre, l'histoire se répète. Une visite incontournable.
Article publié dans le JTT du jeudi 26 mai.
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