jeudi 27 mai 2021

Ardèche : la fabuleuse iriseraie de Bernard Laporte

Bernard Laporte est créateur et collectionneur d’iris. Entre Viviers et Larnas, dans la jolie vallée de la Nègue, ses champs multicolores attirent une foule de visiteurs dès le début du mois de mai. La floraison éclatante des 2500 variétés différentes dans ce cadre sauvage est un enchantement pour les yeux. Roses, pourpres, bleus, violets, bruns, blancs, rouges, jaunes … toutes les couleurs se succèdent dans une palette infinie de nuances. Mais les plus spectaculaires sont les iris issus de croisements, les variétés hybrides, bicolores, tigrées, frisottées, ourlées… aux majestueuses hampes florales, dont le parfum embaume.

Depuis une trentaine d’années, Bernard se consacre aux iris. Culture, reproduction, vente et surtout création de nouveaux spécimens aux couleurs inédites. Mais comment procède-t-il pour croiser les couleurs ? Pendant la floraison, il effectue une pollinisation manuelle entre deux iris de couleurs différentes : avec un pinceau il prélève délicatement du pollen sur les étamines de l’un et en enduit le pistil de l’autre. Ensuite il attend que la nature fasse son œuvre, que les graines se forment dans la gousse après la floraison. Il les recueille quand elles sont sèches, les sème. Puis attend que la plante se développe, si la nature le veut bien. Quand enfin arrive leur floraison, la surprise est totale, car il ne sait jamais ce que donnera le mélange, par exemple un iris blanc mélangé à un noir ne donnera pas un gris, mais peut-être un zébré, ou moucheté ou tigré … Ces manipulations pleines d’aléas représentent un travail de longue haleine, il faut compter environ 10 ans entre la pollinisation et la commercialisation d’un nouveau modèle. Mais c’est ce travail passionnant qui motive Bernard.

Sur son domaine de 1,5 hectare à Gerbaux, les acheteurs, souvent collectionneurs, viennent de toute la France et au-delà pour contempler les nouveaux modèles et les commander. Bernard Laporte accueille, explique, donne des conseils, note les commandes. Il assure ensuite leur gestion, puis la livraison des rhizomes et des bulbes par voie postale, dès la fin du mois d’août.

L’iriseraie est un but enchanteur de promenade, même pour les néophytes, même sans acheter. On peut profiter du voyage sensoriel pour découvrir d’autres merveilles de ce lieu sauvage d’Ardèche, comme Saint-Thomé, surprenant village perché, et Larnas, dont la superbe église romane est follement romantique.

L’iriseraie est ouverte tous les après-midis en semaine, et toute la journée les samedis et dimanche en avril-mai-juin. Tél : 04 75 04 92 33

Article publié dans le JTT du Jeudi 27 mai 2021.

jeudi 20 mai 2021

Voyage au coeur du Moyen-âge : la forteresse de Mornas

Dominant l’autoroute A7 sur une falaise abrupte de 137 mètres de hauteur, à quelques kilomètres de Bollène, la forteresse de Mornas attire le regard des automobilistes. Monumentale, perchée sur son éperon rocheux, elle invite à s’arrêter pour tenter l’ascension. Une balade magnifique, riche d’histoire, de nature, ouverte sur un panorama à couper le souffle et tout-à-fait accessible. La forteresse est fermée actuellement pour cause de Covid, mais les randonnées autour peuvent se faire librement.

Le village de Mornas avec ses platanes centenaires, son enceinte fortifiée et ses belles portes constitue une halte agréable. On peut y débuter la promenade ou suivre le fléchage « forteresse » et monter jusqu’au parking situé au-dessus du cimetière. Un site spectaculaire, dominé par la chapelle Notre-Dame du Val Romigier (XIIe), une impressionnante église romane qui semble née de la roche. Ancienne église communale, elle est en cours de restauration. De là, un chemin très raide grimpe jusqu’à la porte de la forteresse. C’est sportif, mais le panorama au sommet en vaut la peine. La vue s’étend à 360° sur toute la vallée du Rhône, l’Ardèche, le Vercors, le Mont Ventoux, les Dentelles de Montmirail …

Les Romains, conscients de l’intérêt stratégique du site, y installèrent un oppidum. La forteresse, probablement édifiée en bois à l’origine, fut reconstruite au Moyen-âge en calcaire, elle avait pour fonction de protéger le village de Mornas. Son nom "Rupea Morenata" apparaît au IXe siècle. Elle a joué un rôle important de défense lors de la Guerre de Cent Ans, notamment contre les compagnies de routiers qui ravageaient le pays. Après une période d’accalmie, de la fin du XIVe siècle jusqu'à celle du XVIe siècle, elle a vécu la tragédie des Guerres de religion. Propriété des Comtes de Toulouse puis de la papauté, catholiques et protestants se la disputèrent avec acharnement.

 En 1562, les troupes protestantes du cruel baron des Adrets, après avoir massacré femmes, enfants et vieillards dans la chapelle Saint-Baudille, forcèrent la garnison catholique à se précipiter du haut des murailles. On appelle cet épisode tristement célèbre "Sauto Barri" ou saute-muraille.  Les huguenots subirent le même sort lorsque la forteresse fut reprise par les catholiques en 1568.

Après la Révolution, la forteresse tomba dans l'oubli. Dégradée, elle a néanmoins été inscrite au titre des monuments historiques en 1927. Depuis 1978 la dynamique association "Les amis de la forteresse" la restaure et la fait revivre à l'heure médiévale, organisant des visites animées et ludiques pendant l’été. Le visiteur y est accueilli par des chevaliers et seigneurs en grande tenue, pour la plus grande joie de tous et spécialement des enfants.

Du sommet, un sentier caillouteux conduit à la fameuse chapelle Saint-Baudille, à environ 500 m. Sur la même crète s’ouvre un réseau de promenades balisées. Il faut être bien chaussé et ne craindre ni le vent, ni le soleil, ni le vertige ! Avis aux amateurs de sensations fortes, ça décoiffe !

Article publié dans le JTT du jeudi 20 mai 2021.

jeudi 13 mai 2021

Un crocodile dans le Rhône

Echappé de la Ferme aux crocodiles de Pierrelatte ? Non, échappé de l’imagination de Christophe Mercier et Maroussia Ode Peyraud. Ce nouvel album pour enfants, écrit par Christophe pendant le premier confinement, lorsque contempler le Rhône était pour lui une source d’évasion, a été illustré par Maroussia, fine observatrice de la faune et la flore du fleuve.

Christophe Mercier est Tainois, bien connu des enfants pour lesquels il anime depuis 2010 spectacles, contes, promenades et réflexions autour du Rhône. Cet amoureux de la poésie, de la nature et de l’environnement a déjà publié de nombreux albums, dont la série des « Paco ». Sa kamicyclette, un petit théâtre japonais tracté par un vélo, symbolise parfaitement les valeurs qu’il prône. Elle attire irrésistiblement le public lorsqu’il se produit dans les festivités locales.


Maroussia Ode Peyraud est Tournonnaise. Papiers et crayons ont été ses compagnons d’enfance, entre une mère artiste peintre et un père architecte. Après des études au lycée hôtelier, elle a travaillé plusieurs années dans la restauration à Disneyland, puis à Paris, tout en dessinant, peignant pendant ses loisirs. Puis a bifurqué vers le tournage de documentaires, en tant que monteuse de cinéma. Aujourd’hui, lassée d’une vie trépidante, nostalgique de sa famille et de sa région natale, elle est revenue à Tournon, où elle s’épanouit dans la peinture. Elle réalise notamment des fresques murales, comme celle en cours à l’école Notre-Dame de  Tain.

Les deux auteurs partagent à la fois leur émerveillement devant la nature et leur conscience écologique. Dans leur album, ils réussissent à transmettre le rêve et la connaissance du Rhône aux enfants. Un support pédagogique idéal, soutenu par de nombreuses associations environnementales.

« Un crocodile dans le Rhône » est disponible dans les librairies de Tournon au prix de 12€. Des présentations publiques sont prévues dès le 22 mai à la Fête de la Nature à la Roche-de-Glun.



Article publié dans le JTT du jeudi 13 mai 2021.

jeudi 6 mai 2021

Saint-Georges et ses dragons

Saint-Georges-les-Bains* est une petite commune ardéchoise qui domine Charmes-sur-Rhône. Ce joli belvédère au-dessus de la vallée du Rhône est un point de départ de nombreuses promenades. Une d’elles en particulier fait la joie des enfants : les animaux sculptés dans la forêt communale.

Saint-Georges s’est développé autour d’un prieuré clunisien, dont il ne reste que l’église, ornée d’un beau vitrail représentant Saint Georges combattant le dragon. Ce thème a été repris et décliné de façon ludique par un tailleur de pierre du village, qui a sculpté des animaux sur les roches de la forêt. Pour les découvrir, il faut quitter le village par une rude montée, puis, au carrefour des chemins, suivre la direction indiquée par un petit dragon de pierre.

André Dimier est un amateur passionné de nature et d’histoire, toujours en vadrouille dans les collines. En rénovant de ses mains sa maison, il a développé le goût de la sculpture. Et après avoir décoré son logis, ancien relais de poste, il a, au fil de ses promenades, utilisé les blocs de grès dispersés au bord des chemins de la forêt communale pour y sculpter renards, hiboux et autres sangliers. La matière première était là, témoin des carrières exploitées aux siècles passés, notamment pour fabriquer les pavés de Valence. André s’en est emparé pour donner envie aux enfants de se promener dans la forêt, grâce à son bestiaire. Et le sentier des animaux sculptés est devenu un but de promenade scolaire et familiale, à tel point que l’ONF et la commune ont pour projet de l’élargir en circuit pédagogique. Chaque fois qu’il le peut, André continue son ouvrage, sculptant même sur les falaises, parfois sous les yeux des promeneurs. Une passion bénévole, destinée à faire découvrir la forêt aux promeneurs et à réjouir leur cœur, voilà qui mérite d’être salué !

Dans le centre du village, on peut chercher la façade décorée de la maison d’André, qui mérite le détour. Puis il faut compter environ 45 minutes pour atteindre le sommet de la colline, où se trouvent les animaux sculptés. Profiter du panorama sur Valence et la vallée du Rhône en montant, puis de l’ombre paisible de la forêt, un endroit idéal pour le goûter. Bonne promenade !


*Les Bains de Saint-Georges-les-Bains font référence à une ancienne station thermale, fermée en 1900, dont le plus célèbre curiste fut Bonaparte, alors en garnison à Valence.

Article publié dans le JTT du jeudi 6 mai 2021.