Angkor Vat, le temple majeur du site est un des mieux conservés. Le
terme temple est impropre pour cette cité de pierre aux bâtiments somptueux
imbriqués les uns dans les autres. Une magnifique voie pavée passe au dessus d’une
douve, et pénètre dans une muraille de 3.5 km de long. Architecture de grès et
de latérite, les blocs ne sont pas assemblés par un mortier, mais par une
taille ajustée. Les différents niveaux s’étagent en terrasses successives,
reliées par des escaliers, jusqu’au centre, où on accède au sanctuaire dominé
par les cinq célèbres tours. Le temple est aujourd’hui encore un lieu saint,
mais dédié à Bouddha, alors qu’à l’origine c’était un lieu de culte hindouiste,
dédié à Vishnou. Le Cambodge est passé en douceur d’une religion à une autre,
dans une forme de syncrétisme paisible.
Deux autres sites spectaculaires,
à une vingtaine de kilomètres, attirent les touristes. D’abord Angkor Tom, la
ville royale fortifiée. Un carré de 3 km de côté, entouré d’une douve et d’une
muraille, percée par quatre portes. L’entrée principale est bordée d’un
alignement d’une cinquantaine de dieux d’un côté, de démons de l’autre, tenant
le serpent sacré, le naga. A l’intérieur, plusieurs palais, temples, dont le
fameux Bayon bâti par Jayavarman
VII. Ce fantastique monument, avec ses 54 tours à quatre visages,
fut dédié par le souverain à Bouddha
dont il diffusa la doctrine. Partout, on se sent regardé avec bienveillance.
Ta Prohm est le temple dissimulé
sous les fromagers géants, où végétal et minéral se livrent une lutte sans
merci. C’est hallucinant. Les racines des arbres, vieux de 300 ans environ, se
sont insérées entre les pierres des temples, ont poussé sur les ruines. Cette
double architecture grandiose donne l’impression de se trouver face au chaos,
dans un autre monde, après l’apocalypse.
Plus à l’écart se trouve la
« cité des femmes », Banteay Srei, temple de grès rose aux sculptures
raffinées, joyau de l’art khmer. Si beau qu’en 1923 André Malraux, alors jeune
explorateur, avait décidé d’en voler quelques bas-reliefs pour les revendre sur
le marché de l’art. Arrêté, emprisonné, il a enduré la prison, avant de mettre
en scène son aventure dans « La voie Royale », mais ce scandale a
permis de mettre en place la protection des œuvres d’art du Cambodge.
Angkor est un site exceptionnel,
où chaque temple a sa personnalité. Les dizaines de kilomètres entre les sites,
à travers la jungle, sont l’occasion d’apercevoir entre les arbres, d’autres
temples, d’autres ruines, que personne ne visite. Les archéologues de l’école
française d’Extrême-Orient ont encore de belles restaurations à faire !
Article publié dans le JTT du jeudi 24 août.
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