vendredi 23 juin 2017

Les mappemondes géantes de Coronelli


Vincenzo Coronelli (1650- 1718) est un moine, géographe et astronome, qui a conçu et réalisé des globes terrestres et célestes géants. Les deux plus imposants (4 m de diamètre ; 2,3 tonnes) ont été réalisés pour Louis XIV, ils sont actuellement conservés à la BNF. Ils représentent l'état des connaissances géographiques des continents Asie, Afrique, Amérique et Europe pour la décennie 1670-1680, et l'état du ciel au XVIIème siècle. On peut voir d’autres spécimens de ces globes en Italie, particulièrement dans la magnifique salle du Tasse de la Bibliothèque Civique de Bergame.

Né à Venise, Coronelli apprend la gravure sur bois, puis entre chez les Frères Mineurs en 1665, où il étudie l’astronomie, la fabrication de sphères armillaires et la théologie. Il crée ensuite un atelier de gravure de cartes, dont la renommée explose après la réalisation des globes géants pour le roi de France, pour laquelle il reste deux ans à Paris (1681-1683). En 1684, Coronelli fonde l'Académie des Argonautes, la plus ancienne société géographique du monde, qui va l'aider à diffuser son œuvre. Couronnement de sa carrière, le 12 mars 1685, il est nommé par le sénat Cosmographe de la Sérénissime République de Venise.

Les deux globes exposés à la Bibliothèque historique de Bergame mesurent 3,3 m de circonférence. Chacun est couvert de 50 feuilles de papier ayant la forme de quartiers, aquarellées et collées sur une structure de noyer. Le globe terrestre représente océans et terres, pays, fleuves, côtes et points d’abordage, il est agrémenté de petits éléments décoratifs : bateaux, animaux locaux. Le globe céleste recense les coordonnées astronomiques de 1902 étoiles, dans un décor de signes du zodiaque et animaux mythologiques. Les minuscules inscriptions manuscrites sont rédigées en italien, français, latin, grec et arabe. Une performance.

Ce travail est d’une précision remarquable, alors qu’il a été réalisé en 1688, au début de la connaissance de notre planète : Christophe Colomb avait découvert l’Amérique en 1492, et Galilée avait été condamné en 1633 par l’Eglise à abjurer sa théorie (C’est la terre qui tourne autour du soleil et pas l’inverse). Coronelli a participé aux débats scientifiques sur les découvertes de Newton, Képler, et Halley, son ami et contemporain (célèbre par sa fameuse comète). Il a su recenser toutes les données de son époque et cartographier la Terre et le Ciel avec un réalisme époustouflant. On voudrait s’approcher pour déchiffrer les indications, mais les globes sont protégés par d’épaisses vitrines. Et pourtant, ils tournent !

Article publié dans le JTT.


jeudi 15 juin 2017

Quand le jazz est là...


Dimanche soir, ambiance surchauffée à la Maison des associations de Tain. En première partie  le jazz-band de Bourg de Péage a exécuté un choix de musiques composées entre les années 1950 et les années 2000, de Duke Ellington aux Beatles, en passant par Umberto Tozzi. Les nombreux instruments ont été successivement mis en valeur, ainsi que la bonne humeur du groupe. Puis les Luettes Noires ont fait leur show.



Les Luettes noires sont un ensemble de jazz vocal dirigé par Dominique Pinet. La vingtaine de choristes amateurs est en réalité issue de deux groupes : un qui se réunit à Lyon, et l'autre qui répète à Tain. Ardéchois, Drômois, Lyonnais réunis ont interprété avec beaucoup d'humour et d'énergie les grands standards du jazz, du swing, de la Nouvelle Orléans au Brésil, arrangés par David Buisson au piano. Les jeux de scènes comiques, tels ceux accompagnant James Bond ou GI Joe, avec  chapeau, gants, pistolets et luNettes noires, ont amusé le public, qui n'a pas hésité à reprendre en choeur les refrains, et à danser sur les bossa novas de Carlos Jobim. Chaud dehors, chaud dedans, mais surtout chaud au cœur ce dimanche à Tain.

On peut déjà songer à la prochaine rentrée : L'ensemble vocal Les Luettes Noires recrute tous pupitres. Répertoire: jazz, pop, funk... Contact : Dominique Pinet au 06 08 54 52 17 ou cevem@free.fr

Article publié dans le JTT du jeudi 15 juin.

mercredi 7 juin 2017

Chronique littéraire : L’exercice de la médecine, de Laurent Seksik  

Une saga familiale passionnante, à la fois romanesque et savante, poétique et réaliste, qui, à travers l’histoire d’une famille de médecins, de Russie à Berlin, de Nice à Paris, évoque l’histoire des Juifs au XXème siècle.

Une histoire tragique et mal connue. Laurent Seksik en brosse le tableau avec verve, à travers des personnages idéalistes, portés par leur tradition familiale de médecine. Le premier est Pavel, médecin des pauvres dans la Russie tsariste et antisémite en 1905, en proie aux humiliations, violences et pogroms. Son fils Mendel, réfugié à Berlin, devenu chef de clinique, est chassé d’Allemagne après les mesures d’interdiction d’exercer et le grand autodafé des ouvrages écrits par les Juifs. Son petit-fils Tobias, survivra à Nice aux rafles nazies, qui remplaceront en 1943 l’occupation bienveillante des Italiens. Enfin Léna, cancérologue à Paris, est l’héritière de cette lignée douloureuse, marquée par la violence à chaque génération. Difficile pour elle de prendre la vie avec légèreté.

On apprend beaucoup de choses dans ce roman, en suivant des personnages très impliqués, mais chaleureux et fantasques. L’intrigue est distillée subtilement, les chapitres alternent l’histoire ancienne et la vie de Léna à Paris en 2015. Le style, simple et précis, parfois technique mais toujours accessible, ouvre la porte à l’imagination par des descriptions fouillées. Et un brin d’humour !
Un vrai bonheur de lecture.

Laurent Seksik, né à Nice en 1962, est lui-même médecin et écrivain à succès.

L’exercice de la médecine est disponible en poche chez J’ai Lu.

Chronique publiée dans le JTT.