Bruno Catalano est un sculpteur de renommée mondiale. Ses Voyageurs
de bronze, aux corps traversés par une grande faille, décorent les capitales de
nombreux pays. Et depuis peu, une de ses sculptures orne le parvis de la mairie
de Valence. Mais c’est à Crest qu’il habite, et Crest lui rend hommage par une
grande exposition de ses œuvres, dans les rues et au Centre d’Art.
Ces sculptures monumentales, des hommes chargés d’un bagage
et largement fissurés, intriguent et interpellent le spectateur. Par leur
réalisme, leur taille, mais aussi par l’alchimie entre le vide et le plein.
Comment tout cela tient-il ? Johnny sur le quai de la gare de Crest, avec
bandana et sac de voyage, un cadre cravaté allant au travail dans la rue, un
touriste affalé qui attend l’embarquement, un migrant désemparé, chacun est à
la fois attiré et interrogé sur ses propres fêlures, que ce soit un pays, une
famille, un amour, un travail, des amis…
Bruno Catalano n’a pas toujours créé de tels personnages,
c’est même le hasard d’une faille dans le processus de coulage de la fonte, qui
lui a donné l’envie d’exploiter l’idée d’incomplétude de l’être humain. Lui
aussi a connu des départs douloureux. D’origine franco-sicilienne, né au Maroc
en 1960, il a suivi ses parents à Marseille en 1970. A 20 ans, il s’est embarqué
comme mécanicien sur les bateaux, avant de découvrir la sculpture d’argile puis
de bronze et de s’y consacrer dès 1991. Autodidacte, la sculpture est devenue
son activité principale, au point d’être sollicité en 2001 par la mairie de
Marseille pour exécuter un buste de Yves Montand. Mais ce sont les Voyageurs
qui ont fait son succès depuis 2004.
Dans le Centre d’art de Crest, des petites figurines
réalistes pleines côtoient harmonieusement les géants de bronze évidés. Bruno, qui
se définit comme artisan sculpteur, a voulu que l’exposition « Traversée
commune » mêle l’artistique au pédagogique. Et rende hommage aussi à ses
équipes de fondeurs locales, en détaillant les diverses étapes du processus
créatif. De l’argile au moule en élastomère, du moule au plâtre puis à la cire,
qui est retravaillée, remoulée, jusqu’à sa réplique en bronze, ensuite soudée,
poncée, ciselée, patinée. Ses sculptures sont le résultat d’un travail artisanal
collectif et exigeant.
Lors du vernissage de l’exposition, vendredi 20 juin, Bruno
Catalano, immense artiste dont la modestie et la gentillesse sont bien connues
des Crestois, a reçu la décoration de Chevalier des Arts et Lettres de la main
de Hervé Mariton, ancien ministre et maire de Crest. Une reconnaissance bien
méritée. Dont la ville bénéficie largement, puisque grâce à lui, elle est
devenue le pôle culturel de la vallée de la Drôme.
Exposition visible du 21 juin au 5 octobre, dans les rues et
au centre d’Art de Crest. Des rendez-vous, rencontres, visites, sont organisées
tout l’été. Tél : 0475766138.
Article publié dans le JTT du jeudi 31 juillet 2025.
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