samedi 25 juin 2016

André Japy, pionnier de l'aviation

Tout le monde connaît Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944). Mais qui se souvient d’André Japy, autre pionnier de l’aviation, son rival dans la quête aux exploits ?
André Japy est né en 1904 en Franche-Comté, dans une famille d’industriels. Passionné par l’aéronautique, outre son diplôme d’ingénieur, il obtient son brevet de pilote en 1932. C’est la grande période de l’Aéropostale, et de ses héros. Japy multiplie les records de vitesse sur Paris-Oslo, Paris-Tunis, Paris-Moscou… En 1935, il relie Paris à Saigon en 87 h, record absolu.  
Saint-Exupéry tente de battre le record d’André Japy, sur le même avion. Il décolle de l’aéroport du Bourget le 29 décembre mais dans la nuit de 30 au 31 décembre, l'avion percute le haut d'un plateau du désert égyptien et s'écrase. Le 2 janvier 1936, après avoir marché trois jours dans le désert du Wadi-Natrum, sans eau ni vivres, Antoine de Saint-Exupéry est secourus par des bédouins. Cet accident sera l’élément central de son roman Terre des hommes.

En novembre 1936, Japy tente un nouveau record : rallier Paris à Tokyo, sur son Caudron Simoun. Tout se passe bien jusqu’à Hong-Kong, puis la météo change, un violent vent contraire et le brouillard l’obligent à essayer d’atterrir en urgence lorsqu’il arrive en vue du Japon. Hélas Japy ne peut éviter le Mont Sefuri et s’y écrase. Les villageois qui ramassaient du bois dans cette montagne difficilement pénétrable entendent le crash, mais mettent plusieurs heures avant d'arriver sur le lieu de l’accident. Et là, surprise, ils découvrent un pilote blessé, et Blanc ! C’est l’époque de l’Axe Rome-Berlin-Tokyo, Japy s’inquiète en les voyant armés de serpes et haches. Mais les villageois prennent soin de lui, le désincarcèrent, construisent un brancard, le descendent au village, alertent les autorités, qui le transportent à l’hôpital de Fukuoka, où il sera opéré et soigné. André Japy reçoit tant de marques de sympathie qu’il reconnait que son accident lui a fait apprécier l’âme japonaise.

Retour triomphal en France quelques mois plus tard. Puis c’est la guerre. Antoine de Saint-Exupéry disparaît en 1944, André Japy survit à la tragédie. En 1946, il change de vie, et s’installe en Polynésie, où il se lance avec son épouse dans l’agriculture. Parallèlement, il effectue avec son nouvel avion Piper des vols d’assistance à la population, désenclavement des îles, livraison de courrier, évacuation sanitaire, recherche de disparus, et même lutte contre la coqueluche ! Et multiplie les records de vitesse entre les îles, Nouvelle-Zélande, Nouvelle- Calédonie…
La fin des années 60 marque l'émergence d’une nouvelle aviation commerciale, en équipage, dans des appareils sophistiqués. Pour André Japy, c’est l’heure d’une retraite bien méritée, il revient en France. Son ultime voyage : il « monte au ciel » en 1974.
Mais une petite piste d’atterrissage, aux confins d’un atoll polynésien, porte encore son nom.

A l'occasion de son trentième anniversaire, le musée Frédéric Japy de Beaucourt (90) rend hommage à cette dynastie d'industriels, qui a modelé la vie locale : exposition d'objets fabriqués dans leurs usines, nombreuses animations ludiques et  conférences sur les membres éminents de la famille, dont André Japy.

Article publié dans le JTT du jeudi 23 juin 2016.

vendredi 17 juin 2016

Chronique littéraire : Amours, de Léonor de Récondo

Une demeure bourgeoise, dans le Cher en 1908. Deux femmes coincées dans leur époque, dans leur statut social, dans leur sexe : Victoire, la maîtresse de maison, incomprise et délaissée par son mari, le très convenable notaire Anselme de Boisvaillant. Et Céleste, la petite bonne qui travaille tout le jour, fourmi invisible. Le soir, elle subit en plus les pulsions sexuelles d’Anselme. Et bientôt se retrouve enceinte.

Un vaudeville signé Maupassant ? Pas du tout, Léonor de Récondo revisite par son regard contemporain une situation classique, elle approfondit les caractères de ses personnages, les fait évoluer vers un épanouissement non conventionnel. Les vernis craquent, les corps se découvrent, l’ajustement à la situation surprend par sa résonance moderne. Seul le dénouement revient au mode classique.

Léonor de Récondo est née en 1976. Violoniste professionnelle, son écriture fluide avance comme une petite musique douce, de plus en envoûtante, obsédante, qui pulvérise la peinture convenue de la vie sociale du début du XXe siècle. Des personnages complexes, aux réactions inattendues, manifestent leur volonté de se libérer des carcans. Andante, allegro, ritenuto, lento… Une partition subtile, sensuelle, et féministe, qui a obtenu de nombreux prix.

Amours est disponible en poche chez Points.

Chronique publiée dans le JTT du jeudi 16 juin.

vendredi 10 juin 2016

Les cabanes de l'étang Verchat ouvrent leurs portes

L’étang Verchat, à Joncherey, est un havre de sérénité, enfoui en pleine forêt terrifortaine. Une beauté naturelle immuable émane du lieu. Au printemps et en été, cerné par une végétation mousseuse, il constitue un terrain de jeux et de promenades idéal. En automne, les couleurs dorées des feuillus se reflètant dans l’eau calme enchantent les photographes. En hiver, l’étang gelé, entouré de silhouettes d’arbres enneigés, transporte le promeneur au cœur du Grand Nord...
Pas étonnant que ce patrimoine naturel apprécié par les pêcheurs, chasseurs, cueilleurs de champignons et autres randonneurs, ait fait l’objet d’un tollé lorsqu’il a été question de le dédier à une résidence de loisirs, pour doper le tourisme régional. La Communauté de Communes du Sud-Territoire avait accepté l’offre d’un investiteur privé : construire un village de cabanes à vocation hôtelière, dans les arbres et sur l’eau. Il a fallu parlementer, négocier, pour arriver au déménagement des sociétés de pêche, de chasse… Et les travaux ont commencé dans l’hiver.

Le résultat est superbe, et convainc même les grincheux. Une dizaine de luxueuses cabanes de bois ont investi les arbres et l’étang. Les Cabanes des Grands Reflets sont toutes différentes, dans leur forme, leur disposition, leur capacité. Perchées ou flottantes, accessibles par escaliers, passerelles, pontons ou barques, meublées en bois naturel, elles disposent de tout le confort, terrasses, toilettes sèches et même plus : un spa extérieur pour certaines. Le nid d'amour, suspendu à une dizaine de mètres, simplement garni d'un grand lit circulaire, fait rêver !

Un bâtiment central accueille la réception, une salle de séminaire et assure la livraison des petits-déjeuners : Une corde fixée à un treuil attend le panier garni du matin sous chaque cabane. Les observatoires nichés dans les arbres permettent d’observer les étoiles la nuit. Et en journée, on peut se balader dans la forêt, aller admirer les daims, ou pêcher dans l'étang.
Attention, le repas du soir n’est pas prévu, il faut emporter son pique-nique,  réserver une livraison par traiteur, ou encore aller dans un restaurant des environs. Mais quand on a posé ses bagages dans ces cabanes de rêve, on n’a qu’une envie, ne plus bouger !

Réservations, renseignements: http://www.cabanesdesgrandsreflets.com/

vendredi 3 juin 2016

Le Mokiroule, qui roule ... de l'Ardèche à la Drôme

Le Mokiroule, c'est une librairie itinérante, qui parcourt les villages. Ce superbe camion de livres égaie avec régularité les places de marché, de Alba-la-Romaine à Soyons, de Livron au Cheylard. Il était à Tournon mercredi, en collaboration avec les Petites Scènes Découvertes. Comme les épiceries d'antan, ce commerce de proximité permet aux enfants d'avoir un accès direct à toutes les nouveautés de la littérature jeunesse. On feuillette, on aime, on achète, en direct, sans passer commande sur … Amazon !

Pascale Girard est la propriétaire dynamique de ce beau camion-librairie. Comment l'idée lui est-elle venue ? C'est simple, passionnée de lecture, elle voulait ouvrir une librairie dans son village, Saint-Laurent-du-Pape. Mais un village ne suffit pas à faire vivre une librairie. Après avoir visité une librairie en vente à Valence, elle a réalisé qu'elle n'avait pas envie d'être enfermée entre quatre murs. En rentrant chez elle, elle a eu le déclic : si je créais plutôt une librairie ambulante ? Je pourrais bénéficier d'une clientèle dans tous les villages de la vallée de l'Eyrieux, et plus peut-être ?
Si la décision a été rapide, la gestation a pris quelques mois. Pascale a acheté un ancien bibliobus, déjà aménagé pour la présentation de livres. Elle l'a fait décorer par Magali Attiogbé, illustratrice de livres d'enfants. Un point déterminant : Pascale possédait le permis poids lourd, elle avait déjà sillonné les routes du sud de la France au volant d'un camion dans ses précédentes activités d'intermittente du spectacle. Restait à trouver un accord avec les éditeurs, un local pour entreposer ses stocks, puis lancer un site et sa pub sur internet.

Inauguré en octobre dernier, le Mokiroule a très vite trouvé son public. 3000 livres d'enfants à disposition, quelques-uns pour adultes, polars, occasions, ouvrages en anglais, BD. De jolis cartes et carnets qui donnent envie d'écrire. A chaque apparition dans un village, c'est le succès, les familles s’y rassemblent. Quelques chaises-longues et présentoirs installés dehors, pour prendre le temps de lire, parfois un auteur local en dédicace ou une lecture organisée … A l'intérieur du camion, Pascale accueille, conseille, vend et prend les commandes, qui seront livrées à son prochain passage.
Pascale en tournée dans son camion, avec son enthousiasme, c'est une amazone des temps modernes !

Le calendrier de la tournée du Mokiroule est disponible sur www.lemokiroule.fr.

Article publié dans le JTT du jeudi 2 juin.