lundi 29 septembre 2014

Lucien Jacques et ses amis

D'abord, les amis de jeunesse, puis les amis des tranchées, décimés par les obus, évoqués avec émotion et sans fard dans Les carnets de moleskine (Gallimard). Lucien Jacques, né en 1891, n'a pas échappé à la grande boucherie, ses blessures, ses traumatismes.

Et puis les amis artistes, ce petit monde parisien où Lucien évolue après guerre, lui qui est doué pour tout : poète, écrivain, artisan, peintre, graveur... Sa notoriété grandissant, il fréquente le beau monde, galéristes, éditeurs, intellectuels, sans jamais se départir de sa simplicité, de sa convivialité. Il devient le secrétaire de la célèbre danseuse Isadora Duncan, elle devient sa muse à tout jamais. Il voyage, expose ses aquarelles et ses gravures dans les capitales, publie des articles dans de nombreuses revues.

Enfin, il y a Jean Giono. Lorsque, pour raisons de santé, Lucien Jacques s'installe en Provence, en 1922, il découvre dans la revue La Criée, dont il est rédacteur, des poèmes d'un inconnu de talent, Jean Giono. Il lui écrit, une correspondance régulière, puis une collaboration s'en suivent. Il publie le premier recueil de poèmes de Giono, Accompagnés de la flûte, illustré par ses bois gravés. Et le présente aux éditeurs parisiens. La suite, c'est l'immense succès de Colline, paru en 1929 chez Grasset. Giono est lancé. Une  amitié indéfectible les unira jusqu'à la mort de Lucien Jacques, en 1961.

Aujourd'hui, Les Amis de Lucien Jacques, des bénévoles réunis en association à Gréoux, font vivre la mémoire et l'oeuvre de cet artiste protéiforme. En quarante ans de présence au village, il avait noué de belles amitiés. Comme celle qui le liait au père de Jacky, l'actuel président de l'association. Jacky n'a pas hésité, quand il s'est retrouvé avec les archives de l'artiste : il a installé un musée de Lucien Jacques dans son propre garage, en attendant que la municipalité se décide à lui céder une aile du château. Il multiplie les publications, les expositions, les lectures. Et accueille volontiers les curieux dans sa caverne d'Ali Baba, pour partager sa passion.
Qu'un ami véritable est une douce chose...

Visites sur rendez-vous : 06 84 83 98 11


mercredi 24 septembre 2014

La Maison de Giono

Le Paraïs, Montée des Vraies Richesses, est une adresse qui invite à gravir la colline du Mont d'Or, point culminant de Manosque, sur les pas de Jean Giono. A l'écart, bien cachée dans un paradis de verdure, sa maison se déguste en petit comité, sous la houlette de bénévoles érudits.

Rien de prétentieux, la bâtisse est simple, morcelée, elle s'est agrandie au fil des années, des besoins. Car Giono abritait non seulement femme et filles, mais aussi mère, belle-mère et grand-mère ! Ainsi que les amis de passage, artistes et intellectuels, ou Parisiens en goguette. Le bureau de Giono ? Il y en a quatre, eux aussi évoluant en fonction des nécessités familiales, puis de la santé de l'écrivain : Giono y a vécu de 1930 jusqu'à sa mort, en 1970. Résultat, dans chaque pièce, une multitude de livres, les bibliothèques couvrent les murs, 8000 volumes, dont beaucoup sont annotés de sa main, des archives qui font le bonheur des chercheurs.

Jean Giono était un lecteur boulimique, passionné, il a rassemblé des écrits de toutes provenances, pour sa documentation et pour assouvir sa curiosité. Peu d'objets d'art, à part les tableaux de son ami Lucien Jacques. Des petits riens qui marquent encore sa présence : un buvard, une lettre, ses pipes. Le marteau de cordonnier de son père, les plumes qu'il utilisait pour écrire. Il fabriquait lui-même ses porte-plumes, qu'il voulait légers, la moitié d'un gramme, en fendant l'extrémité d'un petit morceau de bois.

Devant la maison, une terrasse surplombe la ville, donnant accès à un jardin méditerranéen ombragé. Palmiers, plaqueminier, marronnier, pivoines et rosiers, c'est un lieu de détente et de méditation. L'esprit de Giono y flotte toujours, inspirant visiteurs et créateurs : Hermès vient d'y lancer son dernier parfum, Cuir d'Ange, d'après un extrait de Jean le Bleu.

L'association "Les Amis de Jean Giono" fait vivre ce haut lieu de littérature et de mémoire, labellisé Maison des Illustres depuis 2011.
Visites le vendredi sur rendez-vous, tél : 04 92 34 47 30.


samedi 20 septembre 2014

L'Occitane, un conte de fées provençal

Dans les années 1970, Olivier Baussan a 23 ans, il est étudiant à la fac de lettres d'Aix-en-Provence, et amoureux de la nature. Un jour, dans un champ de lavande, il rencontre un vieil homme avec son alambic. Curieux, il engage la conversation, se fait expliquer le procédé de distillation des huiles essentielles. Une vocation est née, le vieil homme désirant prendre sa retraite, il lui rachète l'alambic. Et pendant quelques années, au volant de sa 2CV, il va vendre sa production sur les marchés de Manosque, Digne, et Forcalquier.

Deuxième rencontre déterminante, quelques années plus tard, avec un savonnier sur le point de cesser son activité. Sans enfants, et séduit par le charisme du jeune homme, il lui lègue sa petite usine de savon. Un rêve de diversification prend corps. Avec tous les parfums de la garrigue, thym, sarriette, romarin, lavande, cade, avec les amandes et l'huile d'olive, Olivier Baussan développe une gamme de cosmétiques naturels, savons, shampooings, lotions et eaux de toilette.

Troisième rencontre, un jour, dans un aéroport, avec une journaliste qui fait un reportage sur les cueilleuses de noix de karité du Burkina Fasso. Le beurre de karité est réputé pour ses propriétés médicinales. Olivier Baussan instaure une relation commerciale avec elles, s'implique dans leur coopérative. Il élargit son activité aux crèmes, onguents, baumes.

La petite usine est devenue une multinationale, qui distribue ses produits dans le monde entier, avec plusieurs unités de production et plus de 2000 boutiques. Une Fondation promeut la lutte contre les déficiences visuelles, et s'implique pour l'emploi des femmes au Burkina.
Dans l'usine hypermoderne de Manosque, un millier de personnes sont maintenant  employées. La visite des lieux permet de découvrir la complexité des mélanges, l'importance de la recherche, le souci  d'innovation et de respect environnemental. De Paris à New York, de São Paulo à Tokyo, l'Occitane porte haut les couleurs et les parfums de la Provence.

Visite de l'usine, du musée et du magasin, sur le site de Manosque.
Vente en ligne : fr.loccitane.com

dimanche 14 septembre 2014

Les santons de Gréoux

C'est un artisanat emblématique en Provence, que la famille Truffier met un point d'honneur à préserver. Et pour cause : ils sont santonniers à Gréoux depuis 8 générations. A partir d'argile rouge de Moustiers et de moules de plâtre, les figurines prennent forme, sont ébarbées, sèchent au soleil, avant leur cuisson au four. De la fabrication à la décoration, tout se fait à la main, et dans le respect de la tradition. L'atelier Truffier-Douzon a obtenu le label convoité d'Entreprise du Patrimoine Vivant.

A l'origine, les santons, symboles de piété populaire, n'étaient pas  cuits. Chaque famille réalisait les siens, qui ne duraient que le temps d'un Noël. Puis les modèles artistiques destinés à décorer les églises se sont démocratisés, l'artisanat des santons s'est développé en France autour de Marseille, au début du XIXème siècle. Les premières grandes foires spécialisées ont permis aux artisans de confronter leurs techniques, de stimuler leur créativité. Santons peints, santons habillés, crèches, villages, décors, les santonniers ont développé toute une gamme d'objets autour de la Nativité, et des petits métiers traditionnels de la région provençale.

Les santons, d'abord commercialisés pour Noël uniquement, ont connu un grand essor avec le développement du tourisme. Puis l'engouement s'est tari, seuls les collectionneurs continuaient de s'y intéresser. Aujourd'hui, un regain d'intérêt pour le patrimoine les remet en lumière. La maison Truffier-Douzon s'inscrit dans la tradition et le savoir-faire. Point de sujets à la mode, mais de l'authentique, en habits neufs. Il faut voir la perfection des détails, vêtements et accessoires du rémouleur, de la poissonnière, du ravi ou de l'Arlésienne...

Leur santon fétiche, c'est le Pistachié, appelé ici Bartoumiou, un coureur de jupons un peu naïf, qui apporte en offrande à Jésus tous les produits du terroir : fougasses, fruits secs, morue et chapelet de saucisses !

Boutique et atelier à Gréoux-les-Bains (04)
Vente par internet : santons-truffier.fr

mercredi 10 septembre 2014

Chronique littéraire : Indigo, de Catherine Cusset

Un extraordinaire voyage en Inde, en compagnie d’artistes français invités à un festival littéraire.
A leur suite, nous découvrons les multiples facettes de ce pays mystérieux, envoûtant. De Delhi à Bombay, du Nord au Sud, de la vie des rues à celle des palaces, le dépaysement des Occidentaux est total, ils doivent apprendre à vivre à un autre rythme, avec d'autres valeurs.

Mais pas question d’un simple roman exotique : Catherine Cusset s’attarde brillamment sur la psychologie des personnages, leurs relations, leur évolution. Chacun, sous un vernis social lisse, cache une fêlure ancienne. Charlotte, Roland, Raphaël, les écrivains invités, autant que Géraldine, responsable de l’Alliance Française, ont rendez-vous avec leur vérité profonde. La moiteur tropicale dans laquelle ils sont immergés exacerbe les tensions. La couleur indigo du ciel annonce l’orage.

Catherine Cusset est née en 1963 à Paris. Après des études à l’université de Yale et une carrière de professeur de littérature, elle s'est installée à New York et se consacre à l’écriture.

Indigo est disponible en poche chez Folio, au prix de 6.80€.

Chronique publiée dans le JTT.

vendredi 5 septembre 2014

La Bibliothèque de Grandvillars fête ses 30 ans

30 ans de livres, de magazines, de disques, puis de CD, DVD, logiciels, partagés;
30 ans de bénévoles et de salariées, d’association en service municipal, de salle du foyer en ancienne poste;
30 ans d’animations, expositions, lectures, contes, ateliers, concours;
30 ans d’accueil d’auteurs, d’artistes, troupes théâtrales et conférenciers;
Bref, 30 ans d’émotions !
                             
Le 6 septembre, la bibliothèque fête son anniversaire, et propose à ses visiteurs de nombreuses animations. Le programme est détaillé sur le site : http://www.grandvillars.fr/culture-sports-et-loisirs/bibliotheque/calendrier-des-animations/140/30-ans-demotions/
Des ouvrages désherbés  seront en vente à partir de 0.20€. Qu'on se le dise ! Pour les amateurs de science-fiction, j'ai rédigé une petite nouvelle, la Bibliothèque dans 30 ans, à découvrir sur :
http://short-edition.com/oeuvre/tres-tres-court/la-bibliotheque-dans-30-ans


Mais le plus beau, c’est l’exposition de photos d’Elena Fedorovich : Petits scènes de la vie. Des instants émouvants, poétiques ou cocasses, saisis dans la rue lors d’un séjour à Saint Petersburg. Cette expo restera visible à la Bibliothèque de Grandvillars jusqu’au 11 octobre. Courez-y !

lundi 1 septembre 2014

L'autre Foire aux Oignons

Le 29 août est jour de fête incontournable à Tournon : La Foire aux Oignons, qui marque la fin des vacances, attire les visiteurs de toute la région. Mais savez-vous qu'il existe, dans un autre coin d'Europe, un marché aux oignons de grande renommée lui aussi, qui se perpétue chaque année depuis l'an 1405 ? Il s'agit du marché aux oignons ( Zibelemärit) de Berne. Une fête rituelle qui mobilise toute cette région suisse, depuis Fribourg jusqu'au Seeland. Des milliers de badauds, des centaines de stands, et des tonnes d'oignons s'échangent entre producteurs et consommateurs. L'atmosphère festive avec bonimenteurs, musique et buvettes, est traditionnelle. Mais là s'arrête la comparaison avec notre foire aux oignons. Car les différences sont notables !

D'abord, le symbole : ce sont les oignons qui sont tressés. Rouges, jaunes, ou en mélange, les tresses d'oignons frais garnissent les stands des maraîchers, alors que les ails, comme tous les autres légumes et fruits de saison, sont vendus en bottes ou en sacs.
Ensuite, le temps : loin de la chaleur rhodanienne, il est plutôt frisquet, il peut même s'accompagner d'averses de neige, car le jour du marché est rituellement fixé au quatrième lundi de novembre. Inutile de dire que les gens sont emmitouflés, et si la boisson traditionnelle reste le vin de pays, c'est de vin chaud qu'il s'agit ! D'autant que la nuit tombe vite, en novembre.

Le soir, justement, la fin du marché prend des allures de Carnaval, avec grandes batailles de confettis, personnages déguisés et, dans les auberges, mise en scène de couplets ironiques sur les événements de l'année. Un Festival des Humoristes, en somme...

Si vous avez raté la Foire aux Oignons ou le Festival de Tournon, il vous reste une possibilité de rattrapage fin novembre. Rendez-vous à Berne, en Suisse !